Anaruz, le Réseau national des centres d'écoute des femmes victimes de violence, a organisé, vendredi à Rabat, une table ronde au cours de laquelle il a présenté les conclusions de son 4ème rapport sur les violences fondées sur le genre. La réunion à laquelle ont participé des membres de ce réseau, des représentants d'ONU-femmes ainsi que des associatifs a également débattu du mariage des mineures et du partage des biens acquis pendant le mariage. Le rapport qui rappelle que l'enquête nationale sur la prévalence de la violence contre les femmes a montré qu'entre juin 2009 et janvier 2010, près de 6 millions, soit 62,8% des 9,5 millions des femmes âgées de 18 à 64 ans, en ont été victimes. Le document précise que 55% de ces mauvais traitements sont conjugaux et 47,4% extraconjugaux. L'essentiel de ces violences a pour cadre les lieux publics (3,1 millions de cas, soit 32,9%), les établissements d'enseignement (24,2%), le milieu professionnel (16%) et l'environnement familial (13,5%). Selon Anaruz, contrairement à ce que laissait penser l'amélioration des droits des femmes véhiculée par les dispositions de la Constitution de juillet et le nouveau Code de la famille, la situation a, en fait, empiré. Selon le réseau, les femmes subissent de plus en plus de violences économiques (35%), physiques (24%), sexuelles (13%) et juridiques (9%). Les violences économiques s'exprimant par la saisie du salaire et la dépossession de biens, tandis que les juridiques portent sur la privation de pension ou l'exclusion du domicile conjugale. Ces violences s'exercent plus particulièrement sur la tranche d'âge s'étendant de 18 à 49 ans (84,4%). Partant du constat que la violence conjugale est la plus commune et qu'elle est souvent le fait du mari, les rédacteurs en concluent que «l'institution du mariage au Maroc expose plus que toute autre à la violence basée sur le genre». Plus grave, note le rapport, le nombre des violentées de moins de 18 ans va croissant. 5% des plaignantes sont des mineures qui ont subi des abus sexuels (28%), un quart a pâti de violences juridiques et 21% de mauvais traitements physiques. Anaruz qui constate que le mariage des mineures progresse suivant une tendance alarmante en dépit de la fixation de l'âge légal à 18 ans, relève qu'en 2010, 41.098 actes de mariage contraires aux dispositions du Code de la famille sur l'âge minimum ont été conclus, soit une progression de 23,59% par rapport à l'année antérieure. Selon le centre, ce constat reste en dessous de la réalité, du fait de la pratique de la «Fatiha» et des sous-déclarations. La table ronde d'Anaruz a, par ailleurs, conclu à la nécessité de contractualiser la propriété des biens avant le mariage tant il est vrai que le droit au partage du patrimoine acquis lors de la vie commune se heurte à la méconnaissance de ses fondements et de sa portée. La réunion a, en effet, mis en évidence le fait que les adouls comme les avocats et même les femmes n'ont pas une grande connaissance du contenu de l'article 49 du Code de la famille. Il stipule que «les deux époux disposent chacun d'un patrimoine propre. Toutefois les époux peuvent se mettre d'accord sur les conditions de fructification et de répartition des biens qu'ils auront acquis pendant le mariage. Cet accord fait l'objet d'un document distinct de l'acte de mariage. Les adouls avisent les deux parties, lors de la conclusion du mariage, des dispositions précédentes. A défaut de l'accord susvisé, il est fait recours aux règles générales de preuve, tout en prenant en considération le travail de chacun des conjoints, les efforts qu'il a fournis et les charges qu'il a assumées pour fructifier les biens de la famille».