Je vous avoue d'emblée que je suis très admiratif du saut en avant – vous êtes témoins : je n'ai pas dit «fuite en avant» - de nos nouveaux gouvernants, mais en même temps, je suis très inquiet car je me demande où tout cela peut nous mener. Je vous avoue d'emblée que je suis très admiratif du saut en avant – vous êtes témoins : je n'ai pas dit «fuite en avant» - de nos nouveaux gouvernants, mais en même temps, je suis très inquiet car je me demande où tout cela peut nous mener. Ce que j'ai appelé «saut en avant», c'est la décision apparemment volontaire, mais, me semble-t-il, bien téméraire, de prendre des initiatives foncièrement antipopulaires, dont la plus spectaculaire, c'est la hausse inattendue et impromptue des prix des carburants. Je ne dis pas si je suis pour ou contre ce type d'initiatives, car c'est un autre débat, mais je me demande, légitimement, si nos amis savent bien ce qu'ils font et s'ils sont conscients des conséquences de tout cela sur leur avenir politique, voire sur leur présent de dirigeants. «Nous sommes prêts à sacrifier notre popularité dans l'intérêt du peuple marocain», clament-ils tous en chœur, la main sur le cœur. Oui, moi, je veux bien, mais il se trouve que le peuple, lui, ne voit pas quel est l'intérêt de mettre aux commandes, par son vote franc et massif, des gens qui, au lieu de lui faciliter la vie, comme ils le lui ont promis à cor et à cri, font tout pour la lui compliquer. Je m'excuse si mon langage est un peu touffu et pas très clair, mais il faut dire qu'avec toutes ces tergiversations, moi aussi, je me mélange les pinceaux. Pourtant, je vous jure que je fais tout pour comprendre. En vérité, je comprends un peu, mais pas tout. Par exemple, je comprends bien qu'on veuille mettre fin à la dérive injuste des objectifs si nobles de la Caisse de compensation, mais je n'arrive pas à piger comment, en augmentant le prix à la pompe, on va corriger cette dérive. Si c'était aussi simple, depuis le temps qu'on fait ce genre de «réajustements», ça fait longtemps qu'il n'y aurait plus de compensation, ni de caisse non plus. Parce que, voyez-vous, les gouvernements précédents l'ont fait également à chaque fois qu'ils l'ont pu, mais ça n'a pas empêché les grosses huiles de continuer de se sucrer allègrement sur le dos des masses «compensées». Maintenant, c'est vrai, on nous parle de «réformer», voire de faire disparaître, une fois pour toutes, cette caisse conçue pour aider les pauvres et les nécessiteux, le peuple quoi, et qui est devenue, au fil du temps, une caisse à faire du fric pour des gens qui en ont déjà pas mal. On nous dit que dorénavant, au lieu de «compenser» les prix en les subventionnant, on a pensé donner la compensation directement aux concernés, et, bien sûr, pas un sou aux autres, c'est-à-dire aux «méchants riches». Super ! Génial! Formidable ! Oui, mais, qui sont ces «concernés»? Comment ?! Les pauvres ?! D'accord, mais, comment pourrait-on déterminer avec précision, et sans parti pris, qui est pauvre chez nous et qui ne l'est pas ? Par le revenu ? Vous plaisantez ou quoi ? Qui est capable de déterminer avec exactitude, ou même juste approximativement, chez nous, qui gagne quoi et combien? Quant à comment, il n'est pas question de poser ce type de questions. Blague à part, moi j'aime bien les courageux et encore plus les téméraires, mais ceux que j'adore par-dessus tout, ce sont les audacieux, et, surtout, ceux d'entre eux qui sont clairs. Je sais que les choses ne sont pas simples, et que la réalité est l'ennemie de la volonté, mais ça, mes chers amis, il fallait y penser avant, et pas aujourd'hui. Aujourd'hui, vous êtes arrivés – déjà ?! – à la phase «ça passe ou ça casse», et il va vous falloir la dépasser sans trop de casse. C'est tout le malheur que je peux vous souhaiter pour le moment. Vous voyez bien que je suis gentil, n'est-ce pas ? En attendant, bon week-end les concernés, et bon courage les autres.