Le 5ème colloque maroco-français sur les finances publiques, qui s'est déroulé vendredi et samedi à Rabat, a centré ses travaux sur le constat que l'information et la participation des citoyens sont nécessaires à la cohésion du budget de l'Etat. C'est au pas de charge que les participants au 5ème colloque maroco- français sur les finances publiques ont dû boucler leurs travaux samedi à Rabat. Ouverts au siège de la Trésorerie générale du Royaume vendredi, ils avaient en effet accusé un sérieux retard dès l'entame. C'est que la cohérence des finances publiques est un «vaste programme», a cru devoir expliquer Rachid Benmokhtar, président de l'Observatoire national pour le développement humain et ancien ministre de l'éducation nationale qui a présidé la 1ère table ronde dédiée à «la globalisation de la prise de décision financière». Les deux autres tables rondes traitaient, l'une de «la cohérence budgétaire», et l'autre de «l'intégration des comptes publics». Curieusement, ce colloque qui de par sa nature et la qualité de ses organisateurs aurait dû être foncièrement technique, a été au contraire traversé de bout en bout par l'emphase politique. On y a en effet souvent parlé de démocratie et de la nécessaire participation du citoyen à la gestion des affaires publiques. C'est Michel Bouvier, président de la française Fondafip – cheville ouvrière de la réunion- qui le premier a dit ce que la cohérence des finances publiques doit à l'information et donc à la transparence qui engendre la légitimation et l'adhésion du public au devoir de contribuer aux dépenses de l'Etat. Quand on montre aux gens où va leur argent et quand la dépense est pertinente, ils comprennent, a-t-il déclaré en substance. Mais, ce pouvoir politique, prétendument suprême aux yeux des constitutionnalistes qui retrouve son ascendant sur l'économique, n'a pas été le seul apport de ce 5ème colloque organisé par le ministère de l'économie et des finances, l'Association pour la fondation internationale des finances publiques (Fondafip), le Groupement européen de recherches en finances publiques (GERFIP) et la Revue française des finances publiques (RFFP). On y a aussi entendu dire des vérités inhabituelles du genre de celle qui avoue que ce n'est pas la crise économique qui impose la cohérence dans les finances publiques, mais la nécessité de préserver la règle d'or en matière de déficit budgétaire. La crise, diront certains intervenants, cela fait dix ans qu'on y est et, ajouteront-ils, comme on ne semble pas en avoir retenu la leçon, tout porte à croire que ce n'est pas fini. Selon eux, le véritable danger vient de l'explosion des dépenses publiques. Celles de l'Etat, bien sûr, mais aussi celles des collectivités locales et celles réputées sociales (retraites, prévention sociale, couverture médicale…). Si bien que pas même les grandes puissances comme les Etats-Unis, qui ne sont pas victimes de la progression en ciseaux des dépenses et des recettes de l'Etat. C'est le grand défi du 21ème siècle , dira-t-on parmi l'auditoire où se reconnaissaient quelques anciens ministres. La nécessaire cohérence des finances publiques, le 5ème colloque international la fonde sur trois requis : les systèmes d'information financière, la cohérence de la prise de décision fiscale et les rapports entre acteurs et décideurs politiques en direction d'une plus grande intégration réciproque, Au demeurant une intégration qui s'inscrit dans la durée. Car le keynésianisme est révolu qui préconisait l'action sur le court terme. C'est le moyen et le long termes qui sont les nouveaux champs de manœuvre. Et en cela, ils avaient raison les Chinois qui disaient: «si tes projets portent sur l'année, travaille la terre, s'ils portent sur dix ans, instruis le peuple». Ayant posé que l'information est nécessaire à la cohérence budgétaire, le colloque s'est attaché à délimiter les contours de celle-ci. Sous la houlette de Chakib Benmoussa, président du Conseil économique et social (CES ) et ancien ministre de l'intérieur, la deuxième table ronde s'est attelée à l'étude de «la cohérence budgétaire des finances sociales», à celle des finances de l'Etat territorial, à «la place des opérateurs publics par rapport au budget de l'Etat», avant de se demander: «Peut-il y avoir un seul budget public?». A la 3ème et dernière table ronde où a officié M'hamed Sagou, professeur des universités et ancien ministre des finances, a été servi le thème de «L'intégration des comptes publics». On s'y est préoccupé de «La consolidation de la dette et des comptes publics», de «la cour des comptes et des enjeux de la certification des comptes publics», des «normes comptables internationales» et de «l'harmonisation des comptabilités». Ce foisonnement et cette variété des sujets n'ont pas empêché l'esprit de synthèse. Noureddine Bensouda, maître de cérémonie du colloque, s'y est essayé avec bonheur quand il a cité un proverbe africain qui dit: «Quand on voyage seul, on arrive plus rapidement; quand on voyage ensemble, on va plus loin». Et c'est précisément à voyager ensemble, loin sur le chemin de la gouvernance financière que le colloque a invité cette année tous les acteurs de la vie publique. Ahmed Salaheddine