Si Facebook était un pays, il serait plus peuplé que l'Europe toute entière. Cette base de données des communications de 600 millions de membres à travers le monde est en réalité un danger pour la vie privée des internautes et un outil puissant d'espionnage international. J'écris de manière hebdomadaire sur la technologie et ses enjeux. Mais j'aimerais commencer ce sujet par de la littérature. «Où que tu sois, certains voudront fouiller ta peau et tes prières. Garde-toi de flatter leurs instincts, […], garde-toi de ployer sous la multitude ! » C'est ainsi que le père de Léon l'Africain s'adresse à son fils, au tout début du roman du même nom d'Amin Maalouf. Ce désir de s'immiscer dans la vie privée des gens est probablement aussi vieux que le monde. La technologie n'a fait que faciliter cette collecte d'informations qui relève du filtrage et qui peut en réalité s'appliquer à tout moyen de communications électroniques. Téléphone, Email, Messagerie instantanée, Tchat, Surf sur Internet. Lorsque j'ai lu la révélation de Julien Assange lors d'un entretien accordé au quotidien «Russia Today» que Facebook était le plus vaste réseau d'espionnage de la planète au service des renseignements américains, j'ai rangé cette information quelque part pour la traiter un peu plus tard. Si vous faites quelques recherches sur Internet, vous trouverez que Facebook a été financé en majeure partie par une entreprise ayant des liens forts avec la CIA. Un autre élément intéressant, c'est que Facebook conserve toutes vos données depuis la création de votre compte. Par données, j'entends les vidéos, les photos, les messages, vos listes d'amis, etc. Si vous voulez vous en convaincre, je vous invite à naviguer dans l'interface de Facebook jusqu'à trouver «télécharger mes données». Si vous cliquez dessus, Facebook vous enverra après quelques jours un beau fichier zip qui contient tout sur vous dans un format facilement consultable. Ceci est la preuve par neuf que vos données sont conservées. Que ces données soient partagées avec les services de renseignements américains et par ricochet avec nos propres services de renseignements marocains est plus que hautement probable. Peut être que certaines personnes peuvent ne pas s'en soucier. La protection de sa vie privée ne fait pas nécessairement partie des besoins essentiels de l'humain. Ceci est modulé d'une personne à l'autre. Mais dans un pays où la corruption est une quasi norme, rien n'empêche qu'un usage frauduleux soit fait par ces mêmes personnes qui ont accès aux données de Facebook. Pour être explicite, nos services de renseignement. Imaginez, par exemple que vous soyez un cadre d'une entreprise et qu'un concurrent soudoie quelqu'un pour vous espionner et récupérez vos données confidentielles. Ceci pose le débat du contrôle des services de renseignements qui a déjà été mis sur la table par certains manifestants marocains. Dans un autre registre, en supposant que nos services de renseignements soient contrôlés correctement pour un usage éthique de nos données, un compte Facebook, c'est un email de connexion et un mot de passe. L'email de connexion est associé à un webmail lui-même protégé par un mot de passe. Un hacker qui réussirait à connaître à la fois votre nom d'utilisateur Facebook, votre mot de passe, ainsi que le mot de passe de votre boîte email pourrait de manière très simple, c'est-à-dire en quelques clics, télécharger l'ensemble de vos données Facebook. Ce qui est tout de même effrayant. Et je suis sûr que bon nombre de membres du réseau social de Mark Zuckerberg n'en ont même pas conscience. Certains publient «je kiffe la vie» et autres platitudes. Alors si comme eux vous voulez la kiffer, libre à vous, mais kiffez là en étant conscient.