Plus Nicolas Sarkozy se lance à grandes enjambées derrière le vote Front National, plus nombreux sont les électeurs qui lui font manifestement des infidélités. Quel que soit le résultat de ce second tour des cantonales, qu'il confirme la poussée de l'extrême droite ou le maintien de la gauche, Nicolas Sarkozy apparaît déjà comme le grand perdant de ce scrutin. Non seulement les modestes résultats de son parti l'UMP, dont le premier tour donnait déjà la tendance, paraissent sanctionner une gouvernance dans son ensemble, sans doute touchée par l'usure du temps, mais l'homme lui même, à travers ses multiples choix, semble manifestement avoir perdu la main. Premier signe de cet échec, la grande et contestable stratégie de labourer les terres du Front National pour mieux siphonner ses voix semble montrer les limites de son efficacité. Plus Nicolas Sarkozy se lance à grandes enjambées derrière le vote Front National, plus nombreux sont les électeurs qui lui font manifestement des infidélités. La programmation des thématiques sulfureuses comme le débat sur l'identité nationale, l'Islam ou la laïcité censée ramener vers lui les brebis séduites par les sirènes de l'extrême droite n'a pas fonctionnée. Le second signe apparaît dans la tentative désespérée de lancer le ministre de l'Intérieur et du Culte Claude Guéant pour capter ouvertement l'héritage du Front National en s'imposant en l'espace de quelques jours comme le ministre qui valide les thèses d'exclusion et de xénophobie sur lesquelles prospère Marine Le Pen. Les sorties de Claude Guéant sur l'immigration s'inscrivent si harmonieusement dans une démarche d'ensemble qu'il paraît aujourd'hui candide de les considérer comme une succession de gaffes d'un ancien conseiller de l'ombre qui fait le dur apprentissage de son métier de ministre. Le troisième signe que la magie Sarkozy a cessé d'avoir de l'effet est l'épaisse cacophonie qui s'est saisie de la majorité présidentielle quant à la consigne de vote en cas de duel FN-PS. Nicolas Sarkozy avait de manière virile tenté d'imposer le «Ni Front National, ni Front républicain». Non seulement sa directive ne fut pas entendue, mais son Premier ministre François Fillon s'est précipité pour le contredire ouvertement entraînant dans son sillage une rébellion de ministres et de personnalités de la majorité présidentielle qui font apparaître Nicolas Sarkozy au pire comme le sympathisant en chef du Front National et au mieux comme un dangereux pyromane. Les conséquences de tels râteaux est que Nicolas Sarkozy n'apparaît plus comme le candidat naturel susceptible de mener sa famille politique vers la victoire. De nombreux éditoriaux fleurissent dans la presse dont la Une du dernier numéro de «Marianne» avec ce titre : «Comment la droite est devenue allergique à Sarkozy?» pour souligner une donnée nouvelle et fracassante : l'UMP peut vivre la même situation que le PS en termes de leadership. Plus personne ne s'impose naturellement pour incarner l'espoir d'une victoire lors des prochaines présidentielles. Une question tout de même hante les esprits : que peut faire Nicolas Sarkozy pour tirer les enseignements de ce second tour des cantonales? La carte du remaniement a été usée. Les appels à l'unité de la majorité présidentielle paraissent inaudibles. Radicaliser davantage son discours paraît dangereux. Enclencher une marche arrière républicaine manquera de crédibilité. Ou tout simplement oublier vite cette mauvaise séquence des cantonales et se concentrer sur son but ultime, la reconquête de l'Elysée.