Le rapport de l'ICPC indique que les secteurs les plus corrompus par ordre d'importance sont : la fonction publique, le système judiciaire, le Parlement, les partis politiques, le secteur privé et les médias. Le gouvernement est déterminé à doter l'Instance centrale pour la prévention de la corruption (ICPC) de l'autonomie nécessaire afin de lui permettre de s'acquitter pleinement de sa mission. C'est ce qu'a affirmé le Premier ministre, Abbas El Fassi, qui présidait, lundi 5 juillet à Rabat, une réunion consacrée à la présentation du rapport de l'instance au titre de l'année 2009. Lors de cette réunion, le Premier ministre a appelé à l'élaboration d'une approche globale et de coordination entre les différentes parties œuvrant dans le domaine de prévention de la corruption. Le rapport qui apporte un diagnostic de la corruption au Maroc indique que les secteurs les plus corrompus par ordre d'importance sont : la fonction publique, le système judiciaire, le Parlement, les partis politiques, le secteur privé et les médias. Le manque de transparence, l'impunité, le désir de s'enrichir, la faiblesse des salaires et l'inefficacité de l'action de lutte contre la corruption figurent parmi les principales causes avancées par la majorité des ménages et des entreprises sondés. Par ailleurs, les indices internationaux relatifs au développement humain, au climat des affaires, à la compétitivité et à la gouvernance ont révélé l'existence de plusieurs obstacles auxquels le Maroc se trouve confronté. Ceux-ci se traduisent par la faiblesse de la reddition des comptes, l'absence de la protection des dénonciateurs, l'ineffectivité des lois, l'accès difficile des citoyens à l'information, l'impunité, la lenteur et la complexité des procédures administratives. Le rapport note que la corruption constitue non seulement un frein au développement économique et social mais qu'elle affecte la crédibilité des institutions et la suprématie de l'Etat de droit. S'agissant de l'évaluation des politiques de lutte contre la corruption, l'ICPC relève que l'adoption d'un plan d'action gouvernemental pour lutter contre le phénomène souffre de l'absence d'une dimension stratégique en dépit de plusieurs avantages. L'instance note que l'arsenal juridique reste insuffisant. En effet, les parties concernées par la corruption, les tiers intermédiaires et les bénéficiaires de ces actes sont souvent écartés. En outre, l'absence de protection juridique des témoins et des dénonciateurs constitue une lacune . Au niveau du système des sanctions, l'ICPC précise que le législateur est passé de l'allégement au renforcement des peines et a procédé depuis 2004 à une révision partielle de ce système. «Ce dernier gagnerait, du reste, à être réformé sur la base de données objectives déduites d'un diagnostic opérationnel relatif aux crimes et aux délits de corruption et de l'évaluation des deux expériences de la justice d'exception et de la justice transitoire», peut-on lire dans le rapport. Au niveau des instruments préventifs, la législation marocaine comporte diverses dispositions pertinentes qui connaissent, toutefois, des insuffisances. Celles-ci sont perceptibles à travers l'absence d'un cadre législatif garantissant le droit d'accès à l'information et dans l'ineffectivité de l'application de la loi relative à l'obligation de la motivation des décisions administratives. Le rapport met également en exergue les insuffisances concernant la loi sur les partis politiques et le Code électoral. Celle-ci ne prévoit pas l'obligation de publier les documents déposés à la Cour des comptes. Quant au Code électoral, il n'oblige que les candidats aux élections législatives à remettre l'inventaire des dépenses à la Commission de vérification sans exiger de celle-ci qu'elle publie son rapport. «Bien que le législateur ait doté cette commission du pouvoir de transmettre les rapports relatifs aux dépassements à l'autorité judiciaire compétente, il a omis d'incriminer ces dépassements et de prévoir les sanctions y afférentes, ce qui a pour effet de limiter la transparence recherchée», indique le document. Dans son rapport, l'Instance souligne que parmi les autres obstacles à la lutte contre ce phénomène figure la faiblesse du contrôle politique qui se manifeste à travers le retard dans le dépôt de la loi de règlement et la réticence de transmettre à la justice les rapports des commissions d'enquête parlementaires. Autre lacune : des instruments de communication et de dénonciation non consolidés et isolés qui restent difficiles à utiliser dans la pratique. A ce sujet, l'ICPC relève l'appréhension relative à la dénonciation, le faible niveau de résolution des affaires soumises aux administrations, le nombre limité des affaires transmises aux autorités judiciaires, l'insuffisance notoire au niveau de la communication. L'ICPC a élaboré une stratégie globale de prévention de la corruption qu'elle propose au gouvernement. Celle-ci comprend huit orientations (voir encadré). De ces orientations, l'ICPC a déduit les propositions et recommandations qui seront nécessaires à leur mise en œuvre. Il s'agit en premier lieu de la poursuite de l'actualisation et de l'harmonisation de la législation nationale à travers le parachèvement des instruments de répression. Pour cela, plusieurs mesures doivent être entreprises : la promulgation de dispositions législatives garantissant la protection juridique des victimes, l'édiction de dispositions légales qui prévoient la responsabilité pénale des personnes morales pour tous les actes de corruption ainsi que la révision du régime des sanctions applicables aux actes de corruption. Autres recommandations : le renforcement des mesures institutionnelles par l'amélioration de l'efficacité du contrôle politique, la redéfinition des compétences des organes de contrôle financier et administratif, le renforcement du rôle des juridictions financières, la consolidation de l'intégrité et de la transparence dans le secteur de la justice. Les grandes orientations d'une politique de prévention de la corruption Le diagnostic du phénomène de la corruption et l'évaluation des politiques de lutte ont révélé plusieurs insuffisances à caractère juridique, institutionnel ou opérationnel. Ces insuffisances ont servi de base à la détermination d'une stratégie globale de prévention de la corruption que l'ICPC propose au gouvernement sous forme de huit orientations : • l'approfondissement du diagnostic, de l'évaluation et de la programmation de la lutte contre la corruption. • le parachèvement du dispositif de répression pour lutter contre la corruption. • la consécration des valeurs de bonne gouvernance dans le secteur public. • le renforcement de la transparence de la vie politique et la moralisation de l'action des partis politiques. • la promotion de l'intégrité et de la transparence de la gestion des finances publiques et des marchés publics. • la moralisation du système judiciaire et le renforcement de son rôle dans la lutte contre la corruption. • la promotion des principes d'intégrité, de transparence et d'éthique dans le secteur privé. • la promotion de l'information et de la communication et le développement de partenariats et d'alliances objectives pour lutter contre la corruption.