Mohamed aime-t-il Meriem ? Sans aucun doute, l'acte qu'il a commis en était la réponse. Lorsqu'il a appris qu'un voisin l'avait harcelée, il a rapidement saisi un couteau et l'a poignardé mortellement. Nous sommes à Casablanca. À la chambre criminelle près la Cour d'appel, la salle d'audience est archicomble. L'assistance écoute attentivement les réponses de Mohamed, qui panique et n'arrive pas à ressaisir. Sans aucun doute, parce qu'il n'imaginait pas que son acte était au summum de sa gravité. Ce natif d'Amezmiz, âgé de vingt-six ans, a quitté, avec sa famille, son village à destination de la ville d'Agadir pour atterrir, quelques années plus tard, à Casablanca. C'est qu'il était chanceux à son vingt et unième printemps, il a décroché un emploi chez une famille, dont il gardait la villa. En fait, il passait la majorité de son temps à la villa puisqu'il était encore célibataire et ses employeurs le traitaient comme l'un des leurs. Mais, il retournait de temps en temps chez lui pour passer la journée avant de revenir la nuit à la villa pour reprendre sa tâche de gardien. C'est ce que savaient ses voisins du quartier où il demeure. Mais, ce qu'ils ne savaient pas, c'est que ses retours étaient également pour voir la fille qu'il aimait, Meriem. Certes, elle ne lui a jamais divulgué ses nobles sentiments. Jusqu'à quand ? Il ne savait rien. «Je retournais chez moi ce jour, M. le président, quand je l'ai croisée, tremblante de peur et secouée par des sanglots… Je ne savais pas ce qui lui est arrivé. Et je lui demandait ce qu'il lui est arrivé», a-t-il répondu à la Cour. Les larmes aux yeux, elle lui a expliqué qu'elle a été harcelée par un jeune du quartier, qui ne cessait de lui demander de l'accompagner chez lui. «Il voulait me toucher devant tout le monde. Je l'ai repoussé. Mais, il m'a saisie par le bras et a essayé de m'embrasser», lui a-t-elle raconté. Hors de lui, Mohamed lui a demandé de l'attendre et est rentré chez lui avant de ressortir. Il l'a accompagnée à la recherche du jeune homme. Quand elle l'a montré à Mohamed, il s'est dirigé directement vers lui et il l'a surpris d'un coup de couteau, puis un deuxième et un troisième. Il l'a tué. Meriem n'arrivait pas à comprendre ce qui est arrivé en un clin d'œil. Elle ne croyait pas que Mohamed la défendra jusqu'au point de commettre un meurtre. «Je n'avais pas l'intention de le tuer, M. le président… Je voulais juste le menacer », a-t-il répondu à la Cour. Le menacer avec trois coups de couteau ? Il a affirmé à la Cour que la victime était un drogué et soûlard qui agressait les habitants et les obligeait à leur donner de l'argent, qu'il avait déjà violé une jeune fille, qu'il avait purgé plusieurs peines d'emprisonnement ferme pour vol qualifié, consommation de drogue, coups et blessures. C'est comme s'il a cru avoir le droit de le tuer étant donné qu'il est un repris de justice, cruel et agresseur ! Le président de la Cour lui a expliqué qu'il n'avait pas le droit de le toucher et qu'il devait réagir autrement, en conduisant la victime vers le commissariat de police pour qu'elle dépose plainte. Verdict : quinze ans de réclusion criminelle pour coups et blessures ayant entraîné la mort.