Gâté, Abdellah n'hésitait pas à violenter sa mère lorsqu'elle s'abstenait de lui verser de l'argent au point qu'il a fini par la tuer. Nous sommes à El Jadida. La salle d'audience de la chambre criminelle près la Cour d'appel était archicomble. Abdellah se tenait au box des accusés. «Tu es accusé d'homicide volontaire avec guet-apens et préméditation », lui a rappelé le président de la Cour. Il n'hésitait pas à tourner ses regards vers l'assistance. Ses yeux croisaient ceux de sa femme qui tenait entre ses mains leur unique enfant. Le président de la Cour lui a ordonné de ne plus se tourner vers l'assistance. «Comment as-tu osé tuer ta mère? », lui a demandé le président de la Cour. Abdellah était son unique enfant. C'était un grand jour quand elle l'a mis au monde. Cela remonte à plus d'une trentaine d'années. Quand il est venu égayer son foyer, c'était comme si elle vient de renaître. Car le destin n'a décidé que tardivement qu'elle soit fertile. En fait, elle n'est tombée enceinte qu'après plusieurs années de mariage au point qu'elle a pensé être stérile. Bref, elle l'aimait à la folie. Quand son mari a rendu l'âme, elle a déployé tous ses efforts pour que son unique fils n'éprouve aucun besoin. Elle l'a inscrit à l'école. Mais, il n'a pas pu poursuivre ses études au-delà du primaire. Alors qu'au moment où elle sortait pour chercher son gagne-pain, il restait chez lui à ne rien faire. Ou bien, il sortait de chez lui pour discuter avec ses voisins du quartier. Au fil du temps, il a commencé à fumer des cigarettes. Et c'est sa mère qui devait lui donner l'argent pour en acheter. Elle ne pouvait pas lui dire non, craignant que son fils réagisse mal. Et pourtant, elle a gardé le même grand amour à l'égard de son unique fils. De son adolescence à sa jeunesse, ses besoins ont accru au point que sa mère ne pouvait plus supporter ses charges. Surtout qu'il n'a plus besoin d'argent pour les cigarettes uniquement, mais également pour acheter de quoi picoler. Des besoins qui l'encourageaient à chercher un emploi. Depuis, il est devenu journalier qui se débrouillait de temps en temps pour gagner sa vie. Mais l'argent qu'il gagnait ne lui suffisait pas pour satisfaire ses besoins notamment en boissons alcoolisées. Ces nécessités l'ont obligé de recourir, à chaque fois, à sa mère qui était toujours prodigue. Seulement, il était avide. Aucune somme d'argent ne rassasiait sa soif. Quand elle n'en avait pas, il n'hésitait pas à la violenter jusqu'au jour où il a été arrêté et condamné à trois mois de prison ferme pour violence contre ascendant. Regrettant d'être la cause de son emprisonnement, elle a décidé de lui faire un cadeau: le marier. Elle lui a organisé une belle nuit de noces et lui a préparé une chambre chez elle. Le fils unique a continué à se débrouiller pour gagner sa vie. Mais seulement pour payer de quoi faire tourner sa tête. Et s'il a besoin de plus d'argent, il n'hésitait pas à recourir à sa mère. Et si elle refusait, il la violentait. Même lorsque sa femme a mis un nouveau-né au monde, il n'a pas cessé de tendre ses mains à sa mère et lui demander de l'argent ou la frapper. C'est ce qui est arrivé dernièrement quand il est venu, alors qu'il était sous l'effet de l'alcool, pour lui demander un billet de cent dirhams. Quand elle a refusé, il est devenu un monstre sans pitié. Il s'est jeté sur elle, l'a frappée violemment et a fini par lui cogner la tête contre le mur. Les voisins qui ont entendu les appels au secours de la mère et de l'épouse, ont alerté la police. Le fils a été arrêté. La mère a été évacuée vers l'hôpital pour être soignée. Mais elle a rendu l'âme, au service de réanimation, suite à des fractures au crâne. «Je regrette, M. le président, d'avoir commis ce crime contre ma mère», a-t-il dit à la Cour. Un regret tardif puisque l'irréparable s'est déjà produit. Et il a été condamné à trente ans de réclusion criminelle.