Les amateurs de la chose politique en sont réduits à recourir à une loupe pour examiner les profils de tous ceux qui peuvent prétendre empêcher Sarkozy de réaliser le doublé parfait que lui autorise la Constitution réformée. La question n'est ni saugrenue ni fantaisiste. Elle ne fait pas partie non plus d'un quiz délirant pour étudiants zélés de sciences po, ni une plaisanterie légère au goût estival quelque peu salée. Elle est au cœur du débat politique français à la veille d'une rentrée dans les différentes universités d'été qui s'apprêtent à donner le ton et à fixer le tempo. Elle en est presque la matrice autour de laquelle tous les états-majors pivotent avec une frénésie plus au moins combative. Et le simple fait de formuler cette interrogation en dit long sur le grand vide que l'actuel président de la République a réussi à créer autour de lui. Les amateurs de la chose politique en sont réduits à recourir à une loupe pour examiner, avec plus au moins de doute, les profils de tous ceux qui peuvent prétendre empêcher Nicolas Sarkozy de réaliser le doublé parfait que lui autorise la Constitution réformée. Qui donc pour affronter Nicolas Sarkozy et l'empêcher de reconduire son bail à l'Elysée ? Les noms ne se bousculent pas au portillon. Ségolène Royal, l'ex-première dame socialiste qui avait failli le faire trébucher en 2007, n'est plus que l'ombre d'elle-même. Son divorce fracassant avec l'appareil socialiste, ses multiples combats menés en solo avec leur cortège de faux-pas et de grandes hésitations, son incapacité à chevaucher une nouvelle machine puissante après s'être confinée à animer son association «Désir d'avenir» aussi anonyme que peu présente, l'ont rendue évanescente. Au point que plus personne ne parie réellement sur son retour. Le troisième homme de la présidentielle, François Bayrou, l'ennemi intime de Nicolas Sarkozy n'est plus que l'ombre de lui-même. Après avoir focalisé toute la haine présidentielle comme aucun homme de sa génération n'a réussi à la subir, à tel point, suprême humiliation, d'échouer à décrocher un poste de député, François Bayrou a été astreint de jouer et les snipers contre Nicolas Sarkozy et une force d'appoint à un centre gauche en pleine recomposition. François Bayrou avait réellement raté la grande marche le jour où, au lendemain de la présidentielle de 2007, il n'avait pas réussi à transformer son nouveau parti le MoDem en machine de guerre. C'est justement pour régler cette question du «challenger» miraculeux à Nicolas Sarkozy que l'ensemble du Parti socialiste frétille à l'idée d'organiser des primaires au sein de la gauche pour permettre à une personnalité de sortir du lot, tout en anesthésiant les contradictions et les ambitions internes. Lancée au début par des quadras en mal de réformes comme une idée pour reconfigurer le processus de sélection au sein d'un grand parti politique d'opposition comme le PS, cette question des primaires est en train de s'imposer comme l'unique solution pour faire taire les querelles de clocher qui ont largement contribuer à affaiblir l'opposition et donner ce sentiment d'infaillibilité à Nicolas Sarkozy. Même un homme comme Laurent Fabius, qu'on aurait pu croire réticent par nature à ce genre d'exercice, se pâme devant la nouvelle trouvaille au point d'en devenir un des meilleurs vendeurs : «Il est devenu inévitable que ce ne soient pas simplement les militants socialistes mais un ensemble beaucoup plus vaste, disons des gens de gauche, qui votent pour le prochain candidat (à l'élection présidentielle)… C'est quelque chose qui s'imposera… qui introduira beaucoup, beaucoup de changements dans la vie politique». Pour Laurent Fabius, l'alerte a été chaude. Un sondage IFOP publié dans «Dimanche Ouest France» montre que son rival de toujours au sein du PS, Dominique Strauss-Kahn est le candidat préféré des Français en 2012. Il faut dire que DSK dont Nicolas Sarkozy avait favorisé, au début de son mandat, la nomination à la tête du FMI, est en train de se tisser patiemment une impressionnante légende de «recours» dans le cas où les chapelles hexagonales de gauche ne parviennent pas à se mettre d'accord sur l'homme qui doit représenter leurs couleurs dans la course à l'Elysée en 2012. Même atteint de plein fouet pour un médiatique scandale de mœurs, Dominique Strauss-Kahn donne l'impression de conserver intactes ses chances de séductions et de persuasion.