Lors d'une conférence de presse, vendredi 19 décembre à Rabat, la représentante de Human Rights Watch (HRW) reconnaît le manque de rigueur académique de son rapport sur le Sahara. Human Rights Watch (HRW) a présenté, vendredi 19 décembre à Rabat, son rapport sur la situation des droits de l'Homme dans les provinces du Sud et dans les camps de Tindouf. Il s'agit, en effet, d'un rapport de 170 pages (version arabe) qui se veut le fruit d'une enquête menée pendant plusieurs mois sur l'exercice des libertés publiques par la population sahraouie. Toutefois, cette étude censée être un document de référence en la matière, s'est avérée, être un ensemble d'appréciations personnalisées et généralement basées sur des informations et des données non recoupées. «Le rapport ne répond pas aux exigences académiques ni aux normes scientifiques», reconnait celle qui a mené l'opération. Sarah Leah Whitson, directrice de la section Moyen-Orient et Afrique du Nord de HRW, a affirmé lors de la conférence de presse que la rigueur académique n'a pas prévalu au moment de l'élaboration de l'étude. Elle ne l'était pas non plus lors de la rédaction des conclusions. Aussi, et de facto, les recommandations contenues dans ce rapport perdent l'essence de leurs valeurs juridiques et morales. «Nos recommandations adressées au Conseil de sécurité des Nations Unies pour élargir le mandat de la Minurso afin d'inclure le suivi et l'élaboration des rapports des droits de l'Homme dans le Sahara et dans les camps administrés par le Polisario en Algérie ne correspondent pas à une forme juridique», avoue Mme Leah Whitson. Outre les carences académiques du rapport, ce dernier souffre d'un déséquilibre notoire de la durée consacrée à chaque étape de son élaboration. Alors qu'il aura fallu plusieurs semaines, étalées sur les trois dernières années, pour mener à bien ses investigations dans les provinces du Sud, trois jours seulement ont suffi aux enquêteurs de cette organisation internationale pour s'exprimer sur la situation des libertés publiques à Tindouf. «Durant la visite de HRW au Sahara étalée sur trois ans, les autorités marocaines n'ont pas constitué un obstacle direct pour nos recherches, réunions et mouvements. Un groupe de travail constitué de trois personnes a visité, par ailleurs, entre le 10 et le 13 novembre 2007, quatre camps de réfugiés (Semara, Laâyoun, Février 27 et Rabouni) près de Tindouf, sans pouvoir se rendre sur les territoires contrôlés par le Poliario», avoue Eric Goldstein, directeur de recherche section Moyen-Orient et Afrique du Nord du HRW. Au sujet de la population des camps de Tindouf, ce rapport dénombre 125.000 personnes, alors que le dernier rapport du Haut commissariat aux réfugiés (HCR) a, récemment, fixé ce nombre à 90.000. Interrogé sur l'attitude de l'Algérie, le directeur de recherche section MENA de HRW a refusé tout commentaire, en se contentant de dire que les chiffres avancés dans le rapport sont conformes à ceux de l'ONU. Or, le HCR est non seulement une instance des Nations Unies, mais elle demeure l'unique autorité onusienne en la matière. S'agissant de la situation dans les camps de Tindouf, M. Goldstein a affirmé que le front du Polisario monopolise le discours politique et marginalise ceux qui remettent en question sa direction ou ceux qui s'opposent à lui sur les sujets fondamentaux. «Il n'y a ni dissidents, ni manifestations, ni médias ou organisations de grande importance qui peuvent ouvertement défier la légitimité du front Polisario en tant qu'incarnation de la cause nationale, ou faire pression en faveur de l'initiative marocaine d'autonomie du Sahara sous la souveraineté du Maroc», a-t-il précisé. Et d'ajouter que ceux qui s'opposent au Polisario sur des sujets fondamentaux trouvent des difficultés à militer. «Même s'il n'y a pas la moindre interdiction officielle et répression directe, ils finissent souvent par abandonner leur mission. Selon un ex-résident instruit qui a été forcé à quitter les camps, les gens qui veulent s'opposer au Polisario de l'intérieur ne peuvent aller nulle part, alors ils finissent par quitter les camps», souligne M. Goldstein. Les représentants de HRW ont exclu, par ailleurs, l'organisation d'une conférence à Alger pour exposer les conclusions de leur rapport. Eric Goldestein a annoncé, à ce titre, que cette ONG aurait voulu organiser une conférence en Algérie, «mais, il y a des obstacles». «Nous avons rencontré des problèmes liés à l'obtention de visa», précise Mme Leah Whitson. Le même rapport a montré du doigt l'Algérie en la responsabilisant de la détérioration de la situation dans les camps de Tindouf. «Il doit changer son attitude apparente de laisser au front Polisario la responsabilité de protéger les droits humains de la population des camps de réfugiés de Tindouf ; et reconnaître publiquement sa propre responsabilité à assurer le respect des droits de toutes les personnes se trouvant sur le territoire algérien. Ceci comprend la nécessité d'intervenir si et quand des violations des droits humains ont lieu et de s'assurer que les auteurs de ces violations en soient tenus responsables», concluent les auteurs du rapport.