La profession des boulangers a lancé un mot d'ordre de grève de deux jours, les 14 et 15 janvier, en guise de protestation contre ce qui ressemble à l'indifférence du gouvernement pour leur cahier revendicatif. La profession des boulangers a lancé un mot d'ordre de grève de deux jours, les 14 et 15 janvier, en guise de protestation contre ce qui ressemble à l'indifférence du gouvernement pour leur cahier revendicatif. Celui-ci se décline sous forme d'une demande d'augmentation du prix de la baguette de pain de 200 g d'un montant de 30 centimes qui doit intervenir en trois temps, selon un arrangement conclu entre le Syndicat national des patrons de boulangeries et la primature. La première étape devait intervenir en octobre et la dernière avant fin 2004. Mais il semble que le gouvernement ait fait marche arrière. Le prix du pain est resté inchangé depuis 1989. Il est toujours vendu à 1,10 centimes. Mais depuis cette date, que d'eau a coulé sous les ponts ! Les coûts de production (eau, électricité, levure, salaires…) ont, eux, subi une augmentation. Tel est l'argument déployé en substance par les professionnels de la boulangerie pour convaincre le gouvernement de la nécessité d'une révision du prix de la baguette. Nombre de boulangeries qui ne fabriquent que du pain, ayant du mal à rentrer dans leurs frais, ont mis la clé sous le paillasson. Ce qui représente un drame social. Or, les pouvoirs publics ne l'entendent pas de cette oreille, qui ont apparemment peur de donner satisfaction aux boulangers au risque d'allumer les feux de la contestation sociale. Les émeutes de Casablanca, en 1981, ont officiellement éclaté à cause de la hausse du prix du pain, un produit considéré par l'État comme stratégique alors même que les prix de la farine dite de luxe entrant dans sa fabrication sont libres depuis 2001. Malgré cela, le prix de vente de la baguette doit être homologué au préalable par les pouvoirs publics. Ce qui est un non-sens économique justifié au yeux de ces derniers par le coût politique supposé ou réel du pain. Par contre, personne ne s'interroge sur la subvention accordée à travers l'ONICL (Office national interprofessionnel des céréales et légumineuses) à la farine nationale de blé tendre. Pas moins de 10 millions de quintaux par an sont ainsi subventionnés à hauteur de 2 milliards de Dhs. Or, une certaine opacité, dénoncée à plusieurs reprises, continue à entourer l'usage de cette manne colossale qui, en l'absence d'un système de contrôle rigoureux des quantités de blé tendre réellement produites et mises sur le marché, profite moins au consommateur qu'aux minoteries industrielles. Le gouvernement actuel doit montrer un courage réformateur en se penchant sérieusement sur le rôle réel de cette grosse tirelire qu'est l'ONICL. C'est un préalable important à la mise à niveau du secteur des boulangers. Il est en effet anormal de refuser aux fabricants de pain une augmentation sur une matière première libre et qui se justifie en plus eu égard au renchérissement des facteurs de production alors que cet office très discret du reste continue à débloquer en toute liberté des sommes énormes dont le bon usage est largement sujet à caution. La sacralité nourrie autour du pain sonne dans le contexte actuel comme une survivance du passé qu'il convient de dépasser, du moment que la filière céréalière a été libéralisée en 1996. Ce produit de première nécessité doit suivre l'exemple d'un autre produit de même type qui a été libéralisé sous le gouvernement Youssoufi en novembre 2000. L'huile normale, que les Marocains achetaient à 8,30 Dhs le litre du temps de sa subvention par la Caisse de compensation, est aujourd'hui disponible sur le marché entre de 6 et 7 Dhs.