Depuis le lancement du MTD par Fouad Ali El Himma et ses amis, il n'y en a plus que pour un parti d'un autre temps, le FDIC. Or, sans parler des moins de vingt ans, la quasi-totalité de nos actuels quadras n'entendent rien à ce parti. Né au printemps de 1963, à la veille des premières élections législatives de l'histoire du Maroc, il s'éteint en 1965 avec le crépuscule du premier Parlement marocain.Comme aujourd'hui, le Mouvement de tous les Démocrates, le FDIC est animé par un proche du Roi, Ahmed Reda Guédira et comportait quelques ministres de l'époque. Mais là s'arrête la ressemblance. L'essentiel de la différence entre les deux formations, outre celle qui marque la démarche de leur fondation respective (cf. Un Vendredi par moi du 25 janvier), réside dans la conjoncture politique qui en a vu la naissance. Pour le FDIC, qu'on en approuve les méthodes ou pas, il s'agissait de faire barrage à un objectif précis, moins explicite chez l'Istiqlal de l'époque que chez ses frères ennemis de l'UNFP. Il ciblait les pouvoirs de la monarchie si ce n'est la monarchie elle-même. A lui seul, le nom du FDIC résume cette situation : Front pour la défense des institutions constitutionnelles et au premier chef tout naturellement l'institution monarchique. Récapitulons. En 1962, le Royaume adopte par référendum sa première constitution. L'UNFP de Mehdi Benbarka et ses amis s'y oppose tandis que l'Istiqlal vote en sa faveur. Cependant, dans l'esprit de Allal El Fassi, cette adhésion n'est qu'une étape qui ferait passer le Maroc du pouvoir absolu au pouvoir absolu constitutionnalisé. La nuance est ténue mais on est dans les balbutiements de la construction d'un Etat de droit. La subtilité n'est pas non plus évidente, mais vaut mieux une autocratie qui se fonde sur des textes qu'une autocratie ne s'appuyant que sur l'humeur d'un homme. Toutefois, le déroulement des élections et surtout la formation du gouvernement qui s'en suit renforcent dans la frustration une opposition «dépossédée» d'un pouvoir qu'elle estimait avoir amplement mérité par sa contribution à l'indépendance. L'UNFP, rejoint un peu plus tard par l'Istiqlal, ne faisant pas mystère de son appétit pour le pouvoir, ne revendique pas moins qu'une constituante, une assemblée en principe souveraine pour élaborer la Constitution. Sans s'en rendre compte, le Maroc s'enfonçait dans la genèse de ce qui allait devenir plus tard les années de plomb. La Constitution, dans une ambiance de complots et de contre-complots, se transforme rapidement en cet obscur objet du désir autour duquel se nouent les fils d'un drame passionnel. Au sein d'une classe politique pétrie de culture française on sait bien ce que veut dire une constituante : dans le meilleur des cas une monarchie parlementaire, sinon une république. Mais la référence aux évènements français de 1789 s'arrête là. Quand ceux-ci s'ouvraient sur la proclamation de la charte des droits de l'Homme, l'inspiration d'une bonne partie de l'opposition marocaine se trouve du côté du FLN algérien, du Destour tunisien, du Baath irakien. C'est donc avec l'ombre de ce risque à l'esprit que le pouvoir fait interdire le parti unique par la Constitution de 1962. Le reste est mieux connu. Ouverture et répression, avancée et régression, flux et reflux pour finir là où nous sommes. Une monarchie plus populaire que jamais et des partis qui touchent le fond. En empruntant à Hamid Berrada, on peut bien résumer ce qui a changé dans la donne : Dans les conditions de l'après législatives de septembre 2007, la tentation est plutôt forte d'intervenir pour combler, s'ils n'y arrivent pas eux-mêmes, les défaillances de partis devenus trop faibles. Dans celles des années soixante et soixante dix, c'était pour contrebalancer de partis trop forts.