Le président français est l'un des rares chefs d'Etat occidental à afficher fièrement son amitié avec l'administration Bush et prendre la distance indispensable à l'égard e la politique américaine dans la région. L'exercice a nécessité un immense talent de communication doublé d'un gigantesque bagout : comment, en terre égyptienne, faire la synthèse entre une amitié affichée et assumée pour Israël et une compréhension solidaire avec les préoccupations arabes. Comment se présenter comme l'un des rares chefs d'Etat occidental à afficher publiquement et fièrement son amitié avec l'administration Bush et prendre la distance indispensable à l'égard e la politique américaine dans la région ? Ce fut l'exploit tenté avec fougue et réussi selon beaucoup, au Caire par Nicolas Sarkozy. Cela ne fut pas une partie aisée. Les résistances étaient lourdes et les préjugés épais. Attendu au tournant sur son approche du conflit israélo-palestinien, le président français a osé cette planche de salut sous forme de rappel : «J'ai dit à plusieurs reprises (...) que c'était le moment pour Israël de faire les gestes qui permettraient de prouver que la paix est possible, y compris sur l'arrêt de la colonisation, de l'implantation des colonies (…) Notre position (à l'égard d'Israël), elle est constante, être un ami fidèle, ce n'est pas être un ami complaisant». Et parce que la diplomatie française, qui se présente comme n'étant «l'otage de personne», prête encore à l'Egypte une puissante capacité amplificatrice que le président français a ciselé cet appel : «Je veux être entendu dans toutes les capitales arabes sur ce discours (...) c'est ma position constante, et ça ne me gêne nullement de le dire ici au Caire». Si, sur la question palestinienne, Nicolas Sarkozy a fait dans le rond et le consensuel, il a, par contre, fait des étincelles sur le dossier libano-syrien. Les agences de presse se sont précipitées pour relayer cette virile déclaration à l'encontre de Damas : «Nous n'aurons plus de contact avec les Syriens tant que nous n'aurons pas des preuves de leur volonté de laisser le Liban se doter d'un président de consensus». En adoptant cette position, Nicolas Sarkozy revient sur un des ses actes de rupture majeurs avec l'ère Chirac. Tandis que l'ancien président français avait fait de l'isolement de Bachar Al Assad une stratégie de pression sur le régime syrien après l'assassinat de Rafiq Hariri, Nicolas Sarkozy avait parié sur la reprise du dialogue avec Damas pour adoucir ses mœurs et l'amener à plus de coopération pour sortir de l'inextricable impasse libanaise. D'où les voyages dans la capitale syrienne de ses plus proches collaborateurs comme le secrétaire générale de l'Elysée Claude Guéant et l'influent conseiller diplomatique Jean David Levitte. L'heure française n'est plus à la séduction ou à la persuasion. La menace est d'une limpide clarté. Pour que le message soit bien compris à Damas, Nicolas Sarkozy s'est dit «prêt à mettre l'argent nécessaire» pour la création et la mise en place du tribunal international chargé de juger les assassins présumés de Rafiq Hariri pour que «personne ne le considère alors comme une plaisanterie». Pour l'ensemble de la classe politique syrienne, la référence à ce tribunal international est un cauchemar permanent. Il constitue l'épée de Damoclès brandie par leurs détracteurs pour exercer diverses pressions. Pour ne pas subir les foudres françaises, les Syriens savent à quoi s'en tenir avec Nicolas Sarkozy : «Il y a un seul acte qui m'intéresse, l'élection d'un président au Liban (…) Je jugerai de la respectabilité de chacun en fonction de cette décision-là et pas d'une autre». Mais était-ce le légendaire l'autisme syrien doublé d'un déficit de traduction de cette détermination française on une manière syrienne de laisser les portes du dialogue ouvertes ? Les première réactions publiques des officiels syriens laissent planer un léger parfum des surréalisme comme en témoigne la déclaration du ministre syrien de l'Information Mohsen Bilal : «Nous n'avons pas interprété (ces propos) comme une accusation implicite. Les relations se poursuivent jusqu'à présent malgré les déclarations et nous œuvrons avec les Français pour tirer le Liban de cette crise». Et de se lancer dans une diatribe digne des grandes envolées politiques locales «Avant, ils (les Français) disaient que la Syrie était le problème, aujourd'hui, ils invitent la Syrie à résoudre le problème, vu sa grande influence chez son petit voisin (…) Qui s'ingère dans les affaires libanaises? Si cette allégation est vraie, ce seraient les Français qui s'ingèrent, et pas nous».