Nicolas Sarkozy reçoit, ce mardi, le président vénézuélien Hugo Chavez. A l'ordre du jour : la libération de la franco-colombienne Ingrid Betancourt, otage depuis 5 ans des FARC. En recevant pour la première fois ce mardi à Paris le président vénézuélien Hugo Chavez, Nicolas Sarkozy aura réussi une petite performance qui restera dans les annales de la diplomatie. Dans la même quinzaine il a cumulé deux attitudes à l'essence opposée : Il avait ému, jusqu'à une opinion américaine réticente, par une admiration dégoulinante du président George Bush et il reçoit avec des égards appuyés Hugo Chavez, un des plus violents détracteurs de Bush sur le continent américain. Au menu de ce tête-à-tête inédit deux questions brulantes. La première concerne les inlassables efforts de Nicolas Sarkozy pour obtenir la libération de la franco-colombienne Ingrid Betancourt détenue depuis cinq années comme otage par les Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC). Tout au long des nombreux contacts téléphoniques, Sarkozy avait demandé à Chavez de s'investir personnellement pour obtenir la libération d'Ingrid Betancourt en usant de l'influence qu'il peut avoir sur le président Uribé et sur la direction des insurgés des Farc. Il y a tout lieu de penser que Hugo Chavez a pris cette requête comme un challenge personnel à travers lequel il peut déployer une grande opération de charme et de communication sur le continent européen. Avant la visite , l'Elysée avait fait savoir que «le président Chavez voudra sans doute informer le président Sarkozy de l'état de ses efforts et ils essaieront de voir comment faire avancer ce processus pour que cesse le calvaire enduré par les otages étrangers des Farc (…) Bien sûr, la question des preuves de vie d'Ingrid Betancourt sera au centre de cette discussion». Le président Chavez laisse planer le suspense : «J'espère pouvoir apporter la preuve de vie. Je ne l'ai pas encore, mais j'espère l'obtenir avant d'arriver à Paris». Le second sujet de discussion entre Nicolas Sarkozy et Hugo Chavez sera la crise du nucléaire iranien et les bruits de botte qui résonnent dans un certain nombre de capitales dont Paris. Hugo Chavez arrive en France en provenance directe de Téhéran. Le journal français «Le Monde» avait créé quelques tensions lorsqu'il a dévoilé, citant des sources diplomatiques françaises, la tonalité d'une lettre que le président Ahmadinejad avait récemment adressée à son homologue français. Après avoir souligné que le président iranien traite le dirigeant français de «jeune et inexpérimenté», «Le Monde» qualifie le ton de la lettre comme «acrimonieux» et affirme qu'elle contenait «des menaces voilées». La position de Hugo Chavez sur une éventuelle guerre contre l'Iran est connue. Voilà comment, participant à la réunion de l'OPEP en Arabie Saoudite, il avait argumenté la question : «Si les Etats-Unis sont assez fous pour attaquer l'Iran ou pour commettre une agression contre le Venezuela (...), le pétrole ne sera pas à 100 dollars mais à 200 dollars». C'est un Hugo Chavez, traditionnellement éruptif, extrêmement remonté qui arrive à Paris. Il vient de provoquer un esclandre international avec le Roi d'Espagne lors de la session finale du sommet ibéro-américain qui s'est tenu à Santiago avec le dorénavant célèbre. «Pourquoi ne la fermes-tu pas?» lancé à Hugo Chavez par un souverain espagnol excédé avant de se retirer de manière théâtrale de la réunion. Le président vénézuélien a, depuis, affirmé à plusieurs reprises que, sans excuses publiques du Roi, il menace de revoir l'ensemble de la relation économique et financière qui lie son pays à l'Espagne. «Je ne veux pas que cela s'envenime, mais le Roi ou le gouvernement de l'Espagne doivent d'une manière ou d'une autre reconnaître qu'ils ont eu tort». Comportement qui met les autorités de Madrid dans une inquiétude fébrile. Hugo Chavez a mis dans l'embarras un autre Roi, celui de l'Arabie Saoudite, le Roi Abdallah, qui organisait ce week-end une importante réunion de l'OPEP. Fait inhabituel dans ces contrées, Hugo Chavez fait le signe de croix, évoque le Christ et donne des leçons de stratégie révolutionnaire sur le rôle de l'OPEP comme instrument de «lutte contre le colonialisme» : «Nous savons (...) que l'unique chemin de la paix, comme l'a dit le Christ, c'est la justice (…) L'OPEP est née comme acteur géopolitique, pas seulement comme acteur économique ou technocratique de régulation des marchés du pétrole».