Après le premier round de négociations à Manhasset, la balle se trouve dans le camp du Polisario, appelé à saisir l'opportunité qu'offre le Royaume pour tourner la page du conflit. Serait-ce le début du « dégel » du conflit autour des provinces sahariennes ? Le premier round de négociations, qui s'est déroulé les 18 et 19 juin à Manhasset, en banlieue new-yorkaise, a au moins le mérite d'avoir mis autour d'une même table les parties au conflit : le Maroc et le Polisario. Que faut-il retenir de cette «prise de contact», initiée par l'ONU, conformément à la résolution 1754 du Conseil de sécurité ? Au-delà de l'objectif initial qui lui a été assigné, -«briser la glace»-, cette rencontre, qui est la première depuis celle de Houston, a donné naissance à une réalisation majeure : l'accord des deux parties de se rencontrer, et de se parler une nouvelle fois, à New York, dans la deuxième moitié du mois d'août prochain. C'est ce qui a poussé le président du Conseil de sécurité de l'ONU, l'ambassadeur belge Johan Verbeke, à se déclarer «confiant» que le processus de négociations entamées à Manhasset «mènera à une solution définitive de la question du Sahara». Plus qu'une simple «prise de contact », le premier round de négociations a permis à la délégation marocaine de réaliser une percée qui ne saurait laisser indifférent : le Conseil royal consultatif pour les affaires sahariennes (Corcas), représenté aux négociations par son président Khalli Henna Ould Errachid et son secrétaire général Maouelainine Maouelainine Ben Khellihenna, a réussi à imposer sa légitimité au Polisario. La délégation polisarienne, présidée par Mahfoud Ali Beiba, a eu face à elle un représentant des deux tiers des Sahraouis, ceux-là mêmes dont le Polisario prétendait être «le représentant légitime et exclusif». «C'est un bonheur pour moi que d'exposer directement les vues d'une majorité à laquelle l'occasion a été rarement donnée d'exprimer librement ce qu'elle pense, et de faire entendre sa voix au sein des Nations unies et auprès de la communauté internationale», s'est réjoui Khalli Henna Ould Errachid, à l'ouverture du premier round des négociations. Lors de ce round, il y a eu, d'une part, le représentant d'une majorité sahraouie, le Corcas, et de l'autre, le Polisario, qui ne devrait représenter pratiquement que le tiers des Sahraouis. Le chemin du deuxième round qui s'annonce est ainsi balisé : ce sera un débat entre une majorité unioniste et une minorité séparatiste. Autre percée à mettre à l'actif de la délégation marocaine, présidée par le ministre de l'Intérieur, Chakib Benmoussa, c'est qu'elle a réussi à imposer sur la table «l'Initiative marocaine pour la négociation d'un statut d'autonomie au Sahara» comme base principale de discussion, ce qui revient à balayer d'un revers de main la thèse éculée de «l'indépendance». «Les options qui s'offrent à nous sont peu nombreuses : la première (l'offre marocaine d'autonomie) consiste à choisir une solution possible, réaliste et appropriée (…) La deuxième option (proposition du Polisario) est négative et nihiliste. Nul ne s'en réjouit, et elle n'arrange l'intérêt de personne. Au contraire, elle est porteuse de malheurs pour notre région, et ne peut qu'attiser la division et les souffrances pour nos populations», a martelé le président du Corcas. Revenant sur les deux journées de négociations à Manhasset, le ministre Benmoussa a, pour sa part, relevé que la proposition marocaine «se fonde sur une approche de compromis qui garantit l'autodétermination et garantit également la gestion locale aux plans politique, économique et social par la population de la région», appelant l'autre partie à mesurer «l'opportunité historique actuelle» en vue de résoudre définitivement la question du Sahara. Une issue tournée vers l'avenir à un conflit hérité de la guerre froide.