Longtemps, les instances internationales et régionales se sont comportées avec ce principe comme si c'était un dogme irréfragable qui ne pouvait conduire qu'à l'indépendance. Une idée reçue qui repose sur une lecture erronée de l'histoire. Sans triomphalisme béat, et surtout en ne considérant pas que la partie est d'ores et déjà gagnée, la dernière résolution du Conseil de sécurité de l'ONU sur la question du Sahara constitue bien plus qu'un tournant. Et d'abord pour les méthodes marocaines de travail. Une large consultation nationale à travers les partis qui, constitutionnellement, «concourent à l'organisation et à la représentation des citoyens.» Un think-tank de qualité qui a su mener un travail d'équipe performant. Une offensive diplomatique touts azimut Convaincante réussissant à gagner à l'initiative marocaine une large adhésion internationale. Résultat sans précédent : les grandes capitales qui soutiennent la démarche de Rabat, l'enterrement sans oraison du plan Baker II, près de 170 membres de la Chambre des représentants américaine qui en appellent à la Maison-Blanche pour ne pas laisser cette chance de paix passer et, last but not least, le Conseil de sécurité qui «se félicite des efforts sérieux et crédibles faits par le Maroc pour aller de l'avant vers un règlement.» Les choses sont au moins ainsi claires : on sait sans ambiguïté possible qui désire avancer et qui s'entête à faire du surplace. Un autre acquis majeur de cette opération qu'on ne peut éviter de commenter, les modifications intervenues sur la sémantique politique de l'autodétermination. Longtemps, les instances internationales et régionales se sont comportées avec ce principe comme si c'était un dogme irréfragable qui ne pouvait conduire qu'à l'indépendance. Une idée reçue qui repose sur une lecture erronée de l'histoire. Les indépendances africaines, essentiellement les cas algérien et namibien, ont alimenté cette croyance. Or, on oublie que si en 1962, le référendum sur l'indépendance algérienne a abouti à la création de l'Algérie, c'est seulement parce que la France, poussée au recul par l'émergence d'un nouvel ordre mondial dominé par Washington et Moscou, s'était résignée et résolue à quitter les colonies. Dans la foulée de cet oubli, on a omis de retenir qu'on ne joue pas une consultation populaire impliquant les équilibres régionaux et les frontières des Etats de la même manière que l'on va à des élections législatives devant déterminer une majorité pour un mandat limité dans le temps et pouvant être remis en cause à tout moment par dissolution. Le principe d'autodétermination est en politique internationale la validation d'une solution, quel que soit sa nature, obtenue par un processus de négociations sous-tendu par le consensus des parties en conflit. C'est justement ce que la Maroc n'a cessé de crier à tue- tête et c'est précisément, de l'antre même des Nations Unies, ce qu'a enfin rappelé l'envoyé spécial du secrétaire général de l'ONU à l'occasion des débats sur l'initiative marocaine. Pour avoir refusé de le comprendre, Alger, ankylosée dans les schémas du passé, a exaspéré la communauté internationale. Ses vociférations contre Washington et Paris, ses pressions très maladroites sur l'Espagnol Zapatero, son chantage au gaz et au pétrole, l'arrogance de son discours «autodéterministe» n'ont pas été payants cette fois-ci. En revanche, patiemment et sobrement, le sérieux du Maroc qui a fait un gros effort sur lui-même lui a valu de la crédibilité. Son sérieux dans l'initiative qu'il a présentée bien sûr, mais aussi son sérieux dans la construction d'un modèle démocratique pour la région, sa résolution à élargir les espaces de liberté, son investissement dans les projets structurants loin des chimères d'une domination régionale, sa lutte autant que faire se peut pour la réduction des espaces de pauvreté, son engagement avec succès dans la lutte contre le terrorisme… ont rendu son argumentaire audible au sein de la communauté internationale.