L'avenir du Musée de Marrakech, inauguré en 1997, suscite des inquiétudes. Les artistes de la perle du Sud s'interrogent sur le devenir de cet établissement censé animer la ville et contribuer à son rayonnement. Explications. Qu'en est-il advenu du musée de Marrakech ? Les citoyens, et les connaisseurs du milieu artistique, en particulier, se posent des questions sur le devenir de ce musée. Ce lieu, censé promouvoir l'art marocain et animer la ville, est aujourd'hui un simple espace abritant quelques expositions. La dernière en date, celle qui a été inaugurée le 30 septembre dans le cadre du Festival «Arts in Marrakech». L'exposition qui se poursuivra jusqu'au 15 janvier 2006 présente un groupe d'artistes anglais sous l'intitulé «Wonderful fund collection». Cette manifestation a d'ailleurs été à l'origine d'une polémique, car elle aurait été très «shooking» pour les Marrakchis. Interrogée par ALM sur le bilan de l'activité 2005 du musée, sa directrice, Naymah Benjelloun, a été réservée. «Je ne crois pas que cela puisse intéresser le public, car l'important dans tout cela, c'est que nous œuvrons pour la culture de notre pays». Cet avis est loin d'être partagé par plusieurs acteurs de la vie culturelle marrakchie et par certains passionnés. «C'est le désert des tartares», souligne un critique gastronomique de la place qui a regretté le manque de manifestations artistiques dans cet espace à vocation culturelle. Dans l'entourage du musée, les propos sont unanimes quant à l'absence d'un programme mettant en valeur la création nationale. Pour la responsable du musée, exposer les artistes marocains, cela reste une source de tracas. «Les artistes de chez nous demandent qu'on leur confectionne des catalogues, qu'on organise des cocktails, nous ne pouvons pas assurer tout cela», a-t-elle argué. Résultat : les expositions qu'abrite le musée ces derniers temps concernent généralement des artistes étrangers. Ce qui contredirait, riposte un observateur, les propos de Mme Benjelloun en disant bien vouloir contribuer au développement culturel de son pays. Toutes ces contradictions ont donné lieu à une montée de critiques et tout le monde se remémore l'époque glorieuse où le musée rayonnait sur la ville ocre, et bien au-delà. Plusieurs se mettent aujourd'hui à regretter la période où Sakina Rharib, conservatrice de formation, dirigeait le musée. A ce propos, le président du Conseil de la ville de Marrakech, Omar Jazouli, a exprimé sa désolation quant à la situation actuelle du musée. «Cet espace avait connu une phase florissante lorsqu'il y avait une dame qui était diplômée en muséologie et qui était compétente, aujourd'hui on assiste à un vide et c'est dommage». Cette période citée remonte au mois de janvier 1999 lorsque Sakina Rharib avait été recrutée par le regretté mécène Omar Benjelloun qui a contribué à financer le palais abritant le musée construit à la fin du XIXème siècle. Le palais, qui appartenait à la famille Menebhi, est aujourd'hui sous la tutelle du ministère des Finances. L'histoire raconte que ledit ministère avait accepté de le léguer pendant 40 ans à Omar Benjelloun moyennant 4000DH par mois, à condition qu'il soit restauré et qu'il contribue au rayonnement de l'art et du patrimoine marocains. D'après des sources confirmées, cette convention avait été signée entre l'Association des amis du musée de Marrakech dont le président n'est autre que le défunt Omar Benjelloun et le ministère de tutelle. Cette association créée en 1995 a été à l'origine de la restauration et de la naissance du musée de Marrakech en tant qu'institution culturelle. Derrière la genèse de ce projet se trouvait un groupe d'artistes dont Mohamed Melehi. Une exposition collective avait été organisée vers la fin de l'année 1995 au Palais des Congrès de Marrakech en appui à ce projet. Cette exposition a regroupé près de 113 artistes et 226 œuvres. Enfin, un total de 220.000 Dh aurait été versé à l'association. Les faits se sont succédé et trois années plus tard, la Fondation Omar Benjelloun a vu le jour. C'était une façon pour le défunt mécène de se donner plus de notoriété et de légitimité, d'autant plus que c'était le pourvoyeur essentiel de fonds. Après son décès en 2003, la conservatrice du musée, Sakina Rharib aurait eu des démêlés avec son épouse et quitte le musée en 2004, après avoir organisé des expositions de calligraphies arabes, de photographies et de peintres marocains, pour ne citer que ceux-là. Une époque qualifiée de dynamique et dont il ne reste que des souvenirs.