Chaque 12 juin, le monde entier réagit, avec force slogans, avec des tours de manches et toute une batterie de statistiques, mais le constat demeure le même. Il y a toujours plus d'enfants qui triment non seulement partout dans le monde, mais également au Maroc. En effet, il y a toujours davantage de galère pour les plus petits qui ne savent plus à quel saint se vouer face à la précarité, à la pauvreté et à la misère. Au Maroc, c'est l'arlésienne. On reprend les comptes, on publie des statistiques, alors que les réalités du terrain sont de plus en plus criantes. Des enfants entre 6 et 15 ans, qui ploient sous le poids du travail ingrat journalier, cela se compte par dizaines de milliers. Si au niveau mondial, les statistiques de l'Organisation internationale du travail (OIT) font ressortir que 218 millions d'enfants entre 5 et 17 ans sont occupés économiquement dans le monde. Parmi eux, 73 millions, 4,6% de l'ensemble des enfants entre 5 et 17 ans, accomplissent des travaux dangereux, il faut savoir que le Maroc a compté, en 2019, 200.000 enfants économiquement actifs parmi les 7.271.000 enfants âgés de 7 à 17 ans. Ce qui représente une baisse de 23,5% par rapport à 2017, selon le Haut-Commissariat au Plan (HCP). Parmi ces enfants économiquement actifs, 119.000 accomplissent des travaux dangereux, ce qui correspond à un taux d'incidence de 1,6% contre 2,3% en 2017. Les enfants astreints à ce type de travail sont à 74,4% ruraux, 84% masculins et à 75,6% âgés de 15 à 17 ans, ajoute la même source. Le HCP fait également savoir que quatre régions abritent 68,1% des enfants astreints au travail dangereux, précisant que Casablanca-Settat vient en tête avec 27,9%, suivie de Marrakech-Safi (16,1%), Fès-Meknès (13,1%) et de Rabat-Salé-Kénitra (11%). On le voit bien, malgré cette petite baisse, la situation du travail des enfants reste alarmante. Généralement quand on parle de travail des enfants, on pense à ce que l'on appelle communément «petites bonnes». Mais il n'y a pas que les travailleurs domestiques qui sont forcés de gagner leur vie à la sueur de leur front. Dans les usines, les magasins, les épiceries, les manufactures, des ateliers de confection, chez les menuisiers, dans presque tous les métiers de l'artisanat, faire travailler un enfant est très rentable. Certains enfants sont presque des esclaves. Ils ne perçoivent même pas de rémunérations. Ils sont juste nourris ou logés. Ce qui, pour leurs employeurs, fait office de salaire. Sans parler des mauvais traitements. Plusieurs affaires ont défrayé la chronique sur des personnes qui ont infligé de véritables tortures à leurs «domestiques». Cela est allé jusqu'au meurtre et des tentatives de meurtre. C'est dire qu'il ne fait pas bon être gamin quand on est pauvre et que la vie nous force à travailler pour subvenir aux besoins des siens. Car, il faut le préciser, ces dizaines de milliers d'enfants qui travaillent le font pour aider leurs familles. C'est une double exploitation. D'un côté, la famille. De l'autre, la société, sans aucun égard ni pitié pour l'enfance sacrifiée. Ce sont là les tristes réalités de cette journée mondiale contre le travail des enfants. Force est de dire qu'il reste du chemin à faire au Maroc pour que cette date rime avec bonheur. Pour le moment, elle rappelle juste le calvaire de l'enfance à la marocaine.