Baisse de la fécondité, hausse de la population âgée… le salut viendra probablement de cette catégorie «Les travailleurs âgés font souvent face à des stéréotypes, ce qui n'est pas sans conséquences sur leur estime de soi, leur bien-être et leur capacité à rester productifs». Y a-t-il une vie après la retraite ? Le rôle des seniors dans le développement du pays est plus que jamais d'actualité. Le Maroc se retrouve dans une situation paradoxale. D'un côté, il y a l'urgence de trouver de l'emploi pour les jeunes et réformer le système des retraites, de l'autre la question du changement irréversible de la pyramide d'âge impose de réfléchir sur des solutions dès maintenant. La baisse de la fécondité et l'augmentation accélérée des personnes âgées poussent aujourd'hui les responsables à s'interroger sur les pistes pour associer cette catégorie au façonnement de l'avenir et à la participation au développement du pays. En gros, il s'agit d'en finir avec les stéréotypes des employés avec une date de «péremption» ou le retraité comme un fardeau pour la société. C'est d'autant plus vrai que cette catégorie représente une matière grise qui a cumulé une expérience et un savoir-faire sur des décennies. Le sujet a été soulevé récemment à l'occasion de la quatrième édition des rencontres scientifiques de la CMR, placée sous le thème «Inclusion des seniors : une opportunité pour le développement social et économique». Le directeur de la Caisse marocaine des retraites (CMR), Lotfi Boujendar, avait souligné la nécessité de reconsidérer le rôle des seniors dans la société comme force de travail ou en tant que main-d'œuvre qualifiée, entrepreneurs créateurs d'emploi ou en tant qu'acteurs actifs dans la société civile. Il avait à ce propos noté que «les travailleurs âgés font souvent face à des stéréotypes, ce qui n'est pas sans conséquences sur leur estime de soi, leur bien-être et leur capacité à rester productifs». La même source a relevé que la structure du marché du travail et les lois en vigueur peuvent parfois constituer une barrière à l'inclusion des seniors ou du moins ne pas l'encourager. Pour sa part, le directeur du Centre d'études et de recherches démographiques (CERED) du Haut-commissariat au Plan, Mohammed Fassi Fihri, avait indiqué lors du même événement que le Royaume est appelé à tirer profit de ses ressources humaines, jeunes et seniors, pour bien profiter de la première et la seconde aubaine démographique, relevant que l'avenir des seniors se profile au regard des jeunes d'aujourd'hui. Il y a donc urgence à agir et élargir le débat qui se profile concernant la réforme du système de retraite. A noter que le Conseil économique, social et environnemental (CESE) vient de préconiser dans sa récente «Alerte-CESE» l'accélération de la mise en œuvre de la réforme structurelle et globale du secteur des retraites au Maroc. La mise en place d'un système national de retraite solidaire, efficace, pérenne et capable de répondre aux attentes et de garantir les droits des générations actuelles et futures d'actifs et de retraités nécessite à la fois la formalisation et l'accélération du processus de consolidation des équilibres et de mise en convergence du financement, des prestations du cadre réglementaire et de la gouvernance des régimes de retraite existants, a estimé le CESE. Affaire à suivre. Statistiques Dévoilant quelques statistiques sur les seniors au Maroc, le directeur du CERED avait relevé que la tranche d'âge des seniors est actuellement de 6 millions d'individus et serait de 12,9 millions en 2050, faisant remarquer une augmentation de son poids dans la population en âge d'activité (de 21,9% actuellement à 36,1% en 2050). Dans les détails, M. Fassi Fihri a noté que les quasi-seniors (55-64 ans) sont au nombre de 3,2 millions, précisant que 44% sont des actifs occupés, 0,8% sont au chômage et 55,2% sont en dehors du marché du travail. Pour le DG de la CMR, le Maroc est en voie d'achever sa transition démographique par l'effet combiné de l'amélioration de l'espérance de vie et de la chute de la fécondité. Et de poursuivre : «Ces constats auront sans doute des répercussions inéluctables sur les besoins socio-économiques et sur l'équilibre des transferts intergénérationnels, qu'il faudra anticiper en repensant le modèle social qui organise la vie des individus en trois phases, à savoir une jeunesse studieuse, une maturité laborieuse et une retraite heureuse». Cette trilogie, a expliqué le directeur de la CMR, se heurte aujourd'hui à une situation économique et démographique totalement différente de celle dans laquelle elle a vu le jour et qui ne permet plus de focaliser l'activité économique sur la tranche d'âge 25-60 ans.