Khalid Boulami, médaillé de bronze aux J.O. d'Atlanta 96 (5000m), ne cache pas sa fierté de voir son poulain devenir champion du monde du 1500m. L'entraîneur de Rachid Ramzi et de l'équipe nationale du Bahreïn, estime que ce dernier mérite largement cette consécration. Entretien. ALM : qu'avez ressenti après le sacre de votre poulain Rachid Ramzi, mercredi soir, sur le 1500m des championnats du monde de Helsinki ? Khalid Boulami : Je ne peux qu'être fier de ce jeune athlète qui a rencontré de grandes difficultés dans le passé ; une véritable traversée du désert avant de pouvoir monter sur la plus grande marche du podium dans une discipline reine de l'athlétisme mondiale. Après un excellent parcours lors des différents meetings qui ont précédé ces championnats du monde, durant lesquels il a étalé son grand potentiel, il était clair que Rachid Ramzi était le nouvel homme fort du demi-fond mondial. Sa jeunesse, sa fraîcheur et son talent sont ses plus grands atouts. C'est une joie encore plus grande que j'ai toujours dans les capacités de ce jeune athlète, au moment où tout le monde, fédération et staff technique en tête, l'ont lâché à cause d'une blessure qui l'a handicapé pendant deux longues années. Il n'a reçu de soutien financier et moral que de la part des responsables bahreïnis qui l'ont beaucoup soutenu. Les motivations, notamment matérielles, de la Fédération d'athlétisme du Bahreïn ont-elles été alléchantes ? Oui. Je ne voudrais pas entrer dans les détails, mais je dirais qu'aucune requête de Rachid Ramzi n'a jamais été refusée, et ce depuis qu'il a intégré l'équipe nationale de ce pays. Alors que la Fédération royale marocaine d'athlétisme lui a suspendu son salaire, qui ne dépassait d'ailleurs guère les 500 dirhams, pendant la période où il a été blessé, les Bahreinis lui ont proposé un travail, puisqu'il a intégré l'armée de ce pays. Les trois autres athlètes marocains qui ont d'ailleurs rejoint l'équipe nationale bahreïnie durant cette même période (2001-2002) ont tous reçu la même offre. Alors que les Marocains ne voulaient pas le soigner, les Bahreïnis, eux, se sont empressés de lui organiser des séjours dans les plus grandes cliniques d'Europe. Et bien, à Helsinki, ils n'ont fait que cueillir le fruit de leur investissement. Estimez-vous que Rachid Ramzi a réussi à prendre sa revanche ? Il s'agit d'une belle revanche née d'une grande ambition. Rachid est un jeune athlète qui a toujours su ce qu'il voulait faire, à savoir régner en maître incontesté sur le demi-fond mondial. Et il a travaillé dur pour atteindre ce très haut niveau de compétition. Après sa grande déception d'Athènes, lorsqu'il a perdu tout espoir d'atteindre le podium du 1500m olympique, il n'a nullement baissé les bras. Une année après, les résultats ont été, grâce à Dieu, au rendez-vous. Cependant, je voudrais ajouter qu'il s'agit d'une revanche pour moi, encadrant marocain travaillant à l'étranger. C'est une preuve que le talent sportif marocain existe bel et bien. Il ne lui manque que la mise à sa disposition de moyens matériels à même de l'aider à mener à bien sa fonction. Quelle a été la réaction des officiels marocains présents le soir de la finale à Helsinki ? Tous sont venus féliciter le nouveau champion du monde du 1500m. A commencer par le responsable du département du Sport, Abderrahmane Zidouh, qui s'est adressé à Rachid Ramzi pour le féliciter. Tous les athlètes marocains engagés dans ces championnats du monde de Helsinki ont été contents pour Ramzi. Il ne faut pas oublier que tous s'entraînent pratiquement dans la même région. En outre, ils se côtoient régulièrement dans les grands meetings et compétitions internationax. Après cette belle réussite de Rachid Ramzi sous d'autres cieux, quel regard portez-vous sur ce phénomène de fuite des athlètes ? Ce n'est pas à moi de répondre à cette question. Il faudrait la poser aux responsables de la Fédération royale marocaine d'athlétisme qui est, notons au passage, gérée par une commission provisoire depuis de nombreuses années. Que font-ils pour encourager les jeunes marocains à pratiquer cette discipline sportive dans laquelle de nombreux champions nationaux ont brillé à l'échelle internationale? Quelle vision ont-ils pour le développement de l'athlétisme dans notre pays ? Quels sont leurs programmes pour assurer la relève ?