Au lendemain de son retour triomphal à Khartoum, l'ex-chef historique de la rébellion, John Garang, a prêté serment le week-end dernier comme premier vice-président. Une nouvelle étape dans le processus de paix est ainsi franchie. «Moi, John Garang Demavior, je jure devant Dieu Tout Puissant qu'en ma qualité de premier vice-président de la République du Soudan, je serai fidèle et ferai allégeance à la République du Soudan». C'est par ces mots que John Garang, ex-chef de la rébellion sudiste a prêté serment le week-end dernier comme premier vice-président du Soudan, six mois après la signature d'un accord de paix avec le régime de Khartoum. Cet accord de paix a ainsi mis fin à une guerre qui a ravagé le pays durant une vingtaine d'années. Son ennemi d'autrefois, Omar El-Bashir, a également prêté serment comme président pour une période de six ans, comme prévu par les accords de paix. Les deux hommes, qui doivent former d'ici le 9 août un gouvernement de coalition, ont par ailleurs signé la nouvelle Constitution provisoire, qui prévoit le partage du pouvoir et des richesses entre Nord et Sud. À l'issue de cette transition à haut risque, les populations du Sud seront appelées à se prononcer par référendum en faveur de l'indépendance ou de leur maintien dans un Soudan uni. Le retour de M.Garang à Khartoum fut triomphal. Après 22 ans d'absence, l'ex-chef de l'opposition a été accueilli par des centaines de milliers de personnes. La cérémonie d'investiture s'est déroulée en présence d'une dizaine de chefs d'Etat et de gouvernement, notamment ceux d'Afrique du Sud, de Centrafrique, de Djibouti, du Sénégal et d'Ouganda. Le secrétaire général des Nations unies Kofi Annan, celui de la Ligue arabe Amr Moussa et le secrétaire d'Etat adjoint américain Robert Zoellick étaient aussi présents à cet événement historique qui marque une nouvelle étape dans le processus de paix. La paix au Soudan doit être irréversible, a insisté M. Annan. Par ailleurs, Kofi Annan a mis l'accent sur la nécessité de régler politiquement le conflit au Darfour, ravagé par la guerre civile depuis février 2003. «La première, et la plus essentielle, tâche de ce nouveau gouvernement est d'assurer que la paix s'étende à toute la nation», a poursuivi M. Annan. Dans son discours marquant la fin de la cérémonie, El-Bashir s'est engagé à aider au développement du Darfour. «Nous promettons à notre peuple au Darfour de déployer le maximum d'efforts pour utiliser l'accord de paix (Nord-Sud) afin d'instaurer la stabilité au Darfour et de reprendre nos efforts interrompus pour le développement et la prospérité de cette région», a déclaré M.El-Bashir. Pour sa part, M.Garang avait déclaré que la paix ne serait pas complète tant qu'il y aura la guerre au Darfour et à l'Est du Soudan. «J'appelle tous les Soudanais à se réconcilier. Que l'on se réconcilie tous», a-t-il lancé. Né en 1945 dans une famille chrétienne de l'ethnie Dinka, John Garang, cet homme politique soudanais a fait ses études aux Etats-Unis. Après un doctorat en économie agricole au Grinnell College (Iowa) et une formation militaire à Fort Benning (Georgie), il rentre et prend part à la 1ère rébellion des animistes et des chrétiens du Sud (mouvement Anya-Anya) contre le pouvoir central musulman de Khartoum. Après un accord donnant l'autonomie au Sud, il devient officier dans l'armée régulière. Cependant, dès que cet accord fut brisé, suite à la découverte de pétrole dans le Sud, Garang entre en dissidence et fonde en 1983 l'Armée de libération des peuples du Soudan. Depuis lors, la guerre civile s'éclata à nouveau faisant des millions de morts au Sud du pays. L'accord de paix signé entre rebelles et autorités soudanaises marque ainsi la fin d'une guerre qui n'a fait que trop durer.