Viol conjugal répété, menace de divorce, privation de nourriture… Des violences faites aux femmes au travail, notamment dans les usines, ont été signalées. Parmi ces violences figurent l'abus et coercition à l'égard des femmes, les empêchant de faire valoir leurs droits à un environnement sûr vu la crise sanitaire ainsi que le non-respect des règles relatives à l'hygiène, aux mesures de désinfection, aux horaires de travail, à la distanciation. L'ONG MRA Mobilising for Rights Associates, en collaboration avec 16 associations marocaines de défense des droits des femmes, a publié, mercredi 1er juillet, son rapport sur l'impact de la Covid-19 sur les violences faites aux femmes. Pour ce rapport, l'équipe de MRA a élaboré des versions trilingues arabe, français et anglais d'un questionnaire. Une version Survey Monkey du questionnaire a été créée pour offrir aux ONG la possibilité de remplir les questions directement via une plateforme en ligne. La collecte des données a eu lieu du 16 avril 2020 au 20 mai 2020. Il en ressort que 76,47% des répondants en ligne ont déclaré avoir remarqué des changements importants dans la nature des violences faites aux femmes durant l'état d'urgence sanitaire. En effet, de nouveaux types de violence ont émergé. S'agissant de la violence psychologique et verbale, on relève la menace d'expulsion de la femme de son domicile conjugal, la menace de divorce et la pression exercée sur les femmes pour qu'elles renoncent à leurs droits en échange d'un divorce. Il faut aussi noter les insultes et critiques concernant les travaux ménagers, la cuisine et la scolarisation à domicile des enfants. Certaines ont fait état d'un isolement imposé par leur mari. Elles se sont vues interdire de quitter leur domicile, refuser l'accès à un téléphone ou un ordinateur. Concernant la violence sexuelle, les associations ont relevé que des femmes ont été victimes de «pratiques extrêmes» (actes sexuels sadiques) par leur mari. A ceci s'ajoute le viol conjugal répété (par ennui ou pour défouler les frustrations et la colère). Il faut aussi signaler la violence et le harcèlement sexuel entre membres de la famille. Concernant la violence économique, le rapport indique que des maris privent leurs femmes de soutien financier, voire de nourriture et de médicaments en invoquant des difficultés économiques causées par le confinement. En outre, il a été constaté que des ex-maris refusent de verser des pensions alimentaires pour les enfants sous prétexte de la pandémie. La perte d'emploi et de revenu chez de nombreuses femmes a engendré une dépendance financière à l'égard du mari. Les associations ont aussi signalé le vol par le mari des économies de son épouse pour contribuer aux dépenses du ménage ou encore le fait que des maris bénéficiant des indemnités Covid-19 ne les utilisaient pas nécessairement pour subvenir aux besoins de leurs femmes et leurs enfants. Par ailleurs, des violences faites aux femmes au travail, notamment dans les usines, ont été signalées. Parmi ces violences figurent l'abus et coercition à l'égard des femmes, les empêchant de faire valoir leurs droits à un environnement sûr vu la crise sanitaire ainsi que le non-respect des règles relatives à l'hygiène, aux mesures de désinfection, aux horaires de travail, à la distanciation. Des violences sexuelles contre les travailleuses ont été signalées sur le lieu de travail. Des obstacles majeurs pour déposer une plainte Les femmes se sont heurtées à de nombreux obstacles personnels, familiaux et externes pour demander de l'aide, accéder aux services et déposer une plainte auprès des autorités pour les violences dont elles ont été victimes. Vu le contexte de confinement, elles avaient moins de possibilités d'échapper à la violence et qu'elles n'avaient pas d'autre alternative que de rester au foyer. Il a été observé qu'elles avaient des difficultés à demander de l'aide en raison de la présence constante de l'agresseur à la maison. Le rapport mentionne que de nombreuses femmes ont préféré continué à vivre avec l'agresseur et attendre la fin du confinement pour signaler les violences qu'elles ont subies et ce soit par crainte d'une violence accrue, soit par peur d'être infectées par le coronavirus en se déplaçant à l'extérieur. Pendant le confinement, les affaires familiales ont été suspendues. Par conséquent, les femmes étaient souvent obligées de vivre avec leur mari dont elles étaient en instance de divorce pendant le confinement en attendant la reprise des audiences. Propositions de réformes Dans son rapport, l'ONG MRA Mobilising for Rights Associates et les associations participantes ont émis plusieurs propositions de réformes que les acteurs publics devraient prendre pour protéger les femmes victimes de violence. Elles recommandent de donner aux forces de l'ordre des pouvoirs suffisants. Autrement dit, l'obligation aux policiers et aux gendarmes d'intervenir immédiatement dans les cas de violences faites aux femmes, de procéder à une évaluation des risques, de détenir l'agresseur, de recevoir une plainte, de recueillir les dépositions des témoins et de fournir une assistance et une protection immédiate sans attendre une autorisation du procureur. Les ONG estiment que le ministère public doit émettre des ordonnances de protection dès la réception d'une plainte à titre de mesure de prévention et de protection. Il doit aussi autoriser d'autres acteurs tels que les ONG désignées par des femmes victimes de violence à déposer une plainte en leur nom. Le ministère public doit aussi prévoir des ordres pour retirer immédiatement l'agresseur violent du domicile dès la réception d'une plainte afin que les femmes et les enfants puissent y rester. Selon les associations, les tribunaux doivent imposer la peine maximale pour toutes les infractions violentes commises contre les femmes et faire en sorte que les agresseurs reconnus coupables ne soient pas libérés avant que leur peine ne soit entièrement purgée.