S'exprimant en marge du Méditour 2003, organisé à Tanger, M. Jilani Ben M'barek, président de l'Association des Chambres de commerce et d'industrie de la Méditerranée (ASCAME), nous fait part du plan tunisien pour la promotion du tourisme. ALM : L'espace méditerranéen a toujours été un espace de concurrence entre ses pays sur le plan touristique. Passer de cette concurrence à une logique de complémentarité, est-ce possible? Jilani Ben M'barek : la concurrence est une donne qui s'impose et qui s'imposera toujours d'elle-même. Sans concurrence, il n'y a pas de qualité. C'est un facteur inaliénable qu'il faut gérer, qu'on le veuille ou non. Il y a concurrence entre hôtels, entre compagnies aériennes…au sein du même pays. C'est le moteur de tout développement économique. Au lieu de continuer à s'en plaindre, pensons à ce que chacun de nous sait faire le mieux. C'est là où la notion de complémentarité pourra prendre corps. En termes de produits touristiques et d'offres. Refuser cette donne revient à refuser de se mettre à niveau par rapport au Nord. Le Maroc est un pays qui excelle plus que la Tunisie en tourisme de plaisance. La Tunisie développe des produits où le Maroc accuse un certain retard. Donc, pourquoi ne pas faire de nos forces et faiblesses des facteurs certes de concurrence par rapport au marché international mais aussi de complémentarité. Que pensez-vous de l'ouverture de l'UE sur l'Est européen ? Cette ouverture ne risque-t-elle pas de pénaliser les pays du Maghreb ? C'est un marché de plus de 350 millions de consommateurs qui nous a été ouvert grâce à cet élargissement. Au lieu d'adopter une attitude craintive, le mieux serait de saisir cette opportunité. Alors que le marché maghrébin ne dépasse guère 60 millions de consommateurs. Sans même poser la question sur qui consomme le plus. Si nous sommes capables, compétents, nous allons nous imposer là-bas. Si nos produits sont de qualité. La part qui nous reviendra sera plus grande de cet échange. Ça va être noir ou blanc. Si nous restons avec une mentalité de protégés, c'est le scénario catastrophe. La seule loi est celle du marché. On a tendance à mettre cela sur le dos du politique. Alors que le rôle du politique se limite aux grandes orientations. C'est à l'entreprise maghrébine de faire le reste. Au sein de l'ASCAME, vous travaillez également pour la mise à niveau des Chambres de commerce du Sud de la Méditerranée et leur alignement sur celles du Nord. En quoi consiste cette démarche ? Il ne s'agit pas de les aligner. Chacune des chambres obéit à une législation qui diffère d'un pays à l'autre. Les prérogatives et le champ d'action de chaque Chambre s'en trouvent différents. La Chambre de commerce de Marseille par exemple gère le port et l'aéroport de la ville. Chose qui n'est pas possible dans un pays du Sud de la Méditerranée. Ce que nous voulons faire, les Chambres de commerce des pays du Nord ayant une certaine expérience, c'est établir un dialogue dans un souci de bénéficier de cette expérience. A commencer par la mentalité avec laquelle on gère les Chambres de commerce. Le premier problème auquel ces dernières sont confrontées est celui des ressources humaines. Qu'en est-il de la coopération Sud-Sud, notamment entre le Maroc et la Tunisie, en matière de tourisme ? Les ministères du Tourisme des deux pays sont plus habilités à répondre à cette question. Cela dit, je vois entre le Maroc et la Tunisie, et même l'Algérie, une dynamique qui s'est imposée dans tous les domaines économiques. Celle de la solidarité. C'est à travers la solidarité que l'on arrivera à faire face au Nord, en oubliant d'abord ses propres intérêts personnels et en œuvrant dans le sens d'une démarche globale et profitable à tous. La Tunisie est également un pays à forte vocation touristique. Quelle est la stratégie adoptée par votre pays ? La Tunisie en est à son dixième plan de développement du secteur. L'objectif de cette phase est d'atteindre une croissance harmonieuse de l'activité touristique. La Tunisie accueille actuellement plus de 5 millions de touristes par année. Et nous visons d'atteindre 10 millions à fin 2006. Il faut y mettre le prix en termes d'infrastructures et de construction. Les chantiers allant dans ce sens sont déjà entamés. A titre indicatif, le plus grand aéroport d'Afrique est en voie de construction. Sa capacité d'accueil sera de 5 millions de passagers par année dans un premier temps. Elle atteindra 30 millions par la suite. Il sera implanté au centre du pays et il fait partie de ces nouveaux défis que la Tunisie s'est lancés. Une augmentation moyenne de 10.000 lits est également enregistrée par an. Il y va de notre survie économique.