Les salles des marchés furent longtemps convoitées par des jeunes fascinés par l'image de la City et par le chic des golden boys new yorkais. Plus réalistes, les nouvelles recrues, même bardées de diplômes, gardent la tête froide. Le réalisme est donc de rigueur. La fièvre autour de la Bourse et de ses métiers a fini par retomber. Depuis que la morosité s'est installée, minant de l'intérieur le marché financier naissant, la profession n'a plus la cote. «L'effet de mode est passé. Le marché est devenu plus mature. Les observateurs de la sphère financière plaignent les opérateurs actuels plus qu'autre chose» a avoué avec amertume Adil Bouifrouri, associé gérant de la jeune banque d'affaire Financia. Pour cet ex-Directeur de Financement de marchés de la prestigieuse banque d'affaires CFG Group, le marché est devenu plus pointu dans sa recherche de profils appropriés. «Mon contact permanent avec les grandes entreprises laisse apparaître un besoin spécifique depuis que le marché financier s'est rétréci» affirme Adil Bouifrouri. Selon ses dires, les profils les plus en vogue sont ceux du conseil. La recherche, de son côté, a souffert plus que les autres filières. Actuellement, les débouchés sont plutôt à rechercher du côté de la finance d'entreprise. Les perles rares restent les directeurs financiers, les gestionnaires de trésorerie et dans un large champ, de bons directeurs administratifs et financiers. «Le manque de culture financière fait passer un comptable pour un directeur financier. Pourtant, le savoir-faire n'est pas le même» a expliqué un chargé de recrutement au sein d'un grand cabinet. C'est pourquoi, généralement, les salles de marchés plus précisément, ont laissé de côté les golden boys et recherchent aujourd'hui des gens diplômés voir très diplômés et ayant la tête sur les épaules. «Si les salaires sont restés attractifs, ils descendent rarement au-dessous de 6000 DH nets par mois pour un débutant» a confié Azzedine Maher, directeur administratif à Wafa Bourse. Cette dernière, à l'image du reste du milieu de la finance, a fortement réduit ses embauches. «Pour nous, les choses se sont passées en douceur. Le fait d'être adossé à un grand groupe comme Wafabank, nous a permis de procéder à un reploiement interne sans trop d'incidence sur les personnes» précisé le directeur administratif de Wafa Bourse. En effet, la crise actuelle doublée de l'introduction des nouvelles technologies, la fin de la criée, les fusions entre grands groupes, la complexification des produits financiers et des procédures de contrôle ont provoqué une sérieuse baisse en volume des emplois du secteur au cours de ses dernières années. Ainsi, plusieurs analystes ont été redéployés vers les métiers de la banque classique. Dans le cas de la société de bourse Wafa Bourse, plusieurs analystes, 11 au total, ont réintégré l'activité commerciale. Ailleurs, à la BMCI notamment, certains membres du pôle banque d'affaires sont actuellement directeurs d'agences commerciales. Un ex-trader, ainsi qu'une gestionnaire de SICAV, sont à la tête d'agences à Casablanca. L'activité commerciale a aussi largement pâti de ce marasme. Une société de bourse a été liquidé, alors qu'une autre, a été rachetée par un groupe familial afin de se doter d'un instrument d'action sur le marché. Côté chiffres, les observateurs parlent «d'un taux de casse» très important. «Comme les commissions en provenance de l'activité intermédiation sont devenues limitées, nous étions obligés de réorienter notre activité vers d'autres génératrices de plus de commissions. Le conseil notamment y a contribué en grande partie», a expliqué Azzedine Maher. De plus, l'accès aux salles de marchés est désormais réservé aux diplômés des plus grandes écoles de commerce ayant opté pour une dominante financière, et aux diplômés des plus grandes écoles d'ingénieurs. Le cumul de formations - ingénieur et commercial ou commercial et DESS de finance représentent un atout considérable à l'embauche. La demande se fait essentiellement autour des marchés de changes ainsi que la gestion obligataire. La carence en profils pointus est à combler. C'est pourquoi, plusieurs écoles spécialisées, à l'image de polyfinance, consacrent davantage d'intérêt pour ces créneaux. Enfin, la maîtrise parfaite de l'anglais est indispensable…Ouverture oblige !