Le cancer du sein et du col utérin représente, à lui seul, près d'un tiers des cas de cette maladie enregistrés par l'INO (Institut national d'Oncologie). Ce fléau ne cesse de se développer alors que les moyens font défaut. Selon le registre des tumeurs de l'INO, il ressort que les cancers de la femme sont prédominants avec 31,8 % pour les cancers du sein et du col utérin. Depuis 1993, l'évolution de la fréquence du cancer du sein est bien marquée. «Rien qu'au titre de l'année 2004, nous avons eu 1.100 cas de cancer du sein», souligne le professeur Brahim El Gueddari, médecin chef de l'INO. Nouvelle forme de cancer dont souffrent les femmes : les cancers liés au tabac qui représentent un pourcentage de 15,2 %. Ce pourcentage est le moins qu'on puisse dire alarmant «Le cancer n'a jamais été une priorité en matière de santé publique. Pour le ministère, nous arrivons largement derrière les accidents de la route, la tuberculose et les maladies infectieuses », avouent certains cancérologues. Les maladies cancéreuses présentent un réel problème au Maroc. D'un côté, les statistiques demeurent quasiment approximatives et de l'autre la faiblesse des moyens rend la lutte contre cette maladie très ardue. La prise en charge des maladies de cancer se fait par le biais de trois cliniques privées et deux centres publics. L'INO de Rabat et le Centre d'oncologie Ibn Rochd à Casablanca COIR) reçoivent des malades venus de tout le Royaume. L'INO est le Centre le plus important en la matière puisqu'il accueille pratiquement 70 % des cas. Il est prévu que deux autres centres régionaux soient prêts cette année même : l'un à Agadir et l'autre à Oujda. C'est dans ce sens que ses statistiques donnent une bonne indication des tendances générales de la maladie. «Chaque année, nous prenons en charge une moyenne de 35 mille à 40 mille nouveaux cas», informe le Pr Brahim El Gueddari. Ce qu'il faut savoir par contre c'est que ces chiffres sont à prendre avec réserve. Certains médecins parlent de 30 mille nouveaux cas de cancers par an, quand d'autres les évaluent à 60.000. Seule quasi-certitude, le chiffre de 12.000 nouveaux cas traités annuellement dans les cinq centres. «Les malades qui viennent demander des soins à l'INO représentent la tête de l'iceberg. Plusieurs malades, surtout dans les régions éloignées de Rabat et Casablanca, meurent à petit feu alors qu'ils ne savent même pas ce qu'ils ont !», remarque le médecin chef. Le Dr. Abdellatif Benider, médecin chef au COIR, corrobore : «nous avons commencé, il y a quelques années avec un groupe d'amis, à faire des consultations gynécologiques, dermatologiques ou encore ORL dans des douars reculés du Haut Atlas. Nous avons trouvé des personnes avec des cancers très évolués, notamment du col utérin, de la langue, de la peau ou encore de l'œsophage». Alors que la guérison de la maladie du cancer est tributaire du facteur temps, l'inaccessibilité des soins aggrave encore plus la situation. Selon le médecin chef au COIR, «la prise en charge dans les deux centres publics des malades du cancer n'est pas totale. C'est au malade d'acheter les médicaments pour la chimiothérapie. Or, ces derniers coûtent très cher ». Telle est la situation générale pour cette grave maladie qu'est le cancer. Quant aux cancers de la femme, la situation est plus critique. La pauvreté de la population féminine ne les aide pas à faire face à leur maladie. Comme certaines patientes ironisent avec le sombre sourire : «Le cancer est une maladie de riches. Pour nous, le cancer est fatal : aucun moyen de s'en sortir ». Dr. Samlali, secrétaire général de l'Association marocaine de lutte contre le cancer (AMLCC) le confirme : «si le cancer nous guette tous, sans distinction, il touche surtout les plus défavorisés». Rien que pour le dépistage du cancer du sein, une mammographie coûte au moins 800 DH. En moyenne, le coût moyen du traitement d'un cancer du sein représente entre 40 mille et 50 mille DH.