L'administrateur civil américain, Paul Bremer a quitté inopinément Bagdad pour Washington où il a été reçu, dès son arrivée, à la Maison-Blanche. C'est dire l'importance accordée à la situation qui prévaut en Irak et l'urgence de trouver de nouvelles réponses aux enjeux sur le terrain où la guérilla intensifie ses opérations. Les Américains disent s'attendre à la multiplication des attaques contre leurs forces et misent sur le renseignement pour les prévenir. Pour mieux anticiper les attaques de la guérilla, ils tablent sur un travail accru du renseignement en recrutant systématiquement des indicateurs irakiens. Paul Bremer l'a réaffirmé en soulignant que «Washington allait devoir faire face à un plus grand nombre d'attaques et plus de terrorisme». «Le renseignement est devenu notre priorité. Car les militaires ne pourront jamais infiltrer, à eux seuls,les réseaux des affidés du régime déchu». «Plusieurs centaines d'activistes professionnels » se sont infiltrés en Irak depuis le Soudan, la Syrie, le Yémen et l'Arabie Saoudite, a ajouté l'administrateur américain, dont l'équipe doit être renforcée dès la semaine prochaine. L'ambassadeur américain au Koweït la rejoindra comme adjoint pour les questions d'ordre politique et économique, les actions des ministères et des administrations publiques. L'armée américaine vient de vivre sa semaine la plus sanglante depuis la fin officielle des combats, avec 32 soldats tués dans des actions de guérilla. Le Pentagone affirme que ces attaques sont le fait de trois groupes différents, les cadres du parti Baath, des islamistes engagés dans le Jihad et des criminels de droit commun. Versant dans la même logique, le Président George W. Bush a estimé mardi que des éléments étrangers infiltrés en Irak avaient pour objectif d'instaurer un régime Taliban dans ce pays : « Des combattants de la cause de l'Islam dur ont traversé les frontières irakiennes en petits groupes avec pour but d'installer un régime similaire à celui des Taliban. Se retrouvent également dans ce pays, des activistes d'Ansar al-Islam et d'al-Qaïda qui veulent tuer et se venger de leur défaite en Afghanistan », a affirmé Bush qui a souligné que «ces activistes sont très dangereux». Il a établi une distinction entre les activistes étrangers et les éléments restés fidèles à Saddam Hussein : « Ceux qui sont restés loyaux au président déchu et les activistes étrangers peuvent avoir des objectifs différents, à long terme, mais ont la même stratégie à court terme: intimider les Irakiens et terroriser les Américains et leurs alliés . De récentes informations confirment qu'en dépit de leurs différences, ces activistes travaillent ensemble pour répandre le chaos et la peur. Depuis la chute de Saddam Hussein, 93 % des attaques ont eu lieu à Bagdad et dans cinq des 18 provinces irakiennes », a précisé M. Bush. La détresse de l'exécutif américain se lit en filigranes à travers les déclarations de son Président. Cet exécutif est toujours à la recherche de nouveaux scénarii susceptibles de le faire sortir du bourbier irakien. On parle même du remplacement du secrétaire d'État à la Défense, Ronald Rumsfeld dont la politique et les prévisions ont mené droit à l'actuel fiasco. Dès les premiers jours de la guerre en Irak, les esprits se sont emportés et de nombreux analystes ont prédit la vietnamienne de l'occupation américaine, ce que le Pentagone a toujours rejeté. Ce qui est sûr aujourd'hui, c'est que l'intervention américaine a eu pour conséquence directe la clochardisation du peuple irakien qui offre l'image d'une société perdue qui vit l'occupation en détruisant systématiquement les symboles d'un régime détesté. Un peuple en proie à une hystérie collective qui détruit les vestiges de sa propre histoire. C'est une société meurtrie par 34 années de dictature, de torture et d'exil, vingt ans de guerres et douze ans d'embargo. Pourquoi en vouloir aux seuls Américains, dans ces conditions ?