Driss Basri a poursuivi pour diffamation, le directeur de la publication et l'éditorialiste de Maroc Hebdo International, respectivement Mohamed Selhami et Abdellatif Mansour. Ce dernier assure qu'il n'assistera pas au procès. Entretien. ALM : Où en est le procès que l'ancien ministre de l'Intérieur, Driss Basri, vous a intenté ainsi qu'à Mohamed Selhami? Abdellatif Mansour : Il y a eu une première audition en septembre 2004, lors de laquelle madame le juge chargée de l'affaire a estimé que la plainte déposée par Driss Basri était recevable. Elle a fixé au 11 mars 2005 la première audience. Personnellement, je n'étais pas présent à cette première audition et je n'irai pas à Paris pour assister à l'audience du 11 mars. Cette affaire a au moins le mérite de m'apprendre que j'étais justiciable français sans le savoir. Qui vous défend dans cette affaire? En fait, il y a deux avocats. Il s'agit de Maître Noureddine Habibi Alaoui et Maître Aïcha Ansar-Rachidi. Tous les deux sont Marocains et avocats au barreau de Paris. Pourquoi ne vous êtes-vous pas rendu à Paris pour la première audition? J'ai décidé de ne pas y aller car j'estime que je n'ai rien à dire au magistrat français. Je suis Marocain, je travaille dans une publication écrite et distribuée au Maroc. Dans l'article incriminé, j'ai abordé le cas d'un ancien ministre marocain. L'affaire est donc totalement maroco-marocaine. Je ne comprends pas pourquoi j'irais m'expliquer devant la justice française. Je n'arrive pas à comprendre ce type de délocalisation ou d'exterritorialisation judiciaire. Certes, les avocats disent qu'il suffit que le journal soit distribué en France pour que la justice de l'Hexagone soit saisie. Mais mes principes et ma logique m'interdisent de subir ce fait accompli. Pour ce qui est du fond de l'affaire, reconnaissez-vous avoir difammé M. Basri dans votre article de juin 2004? Absolument pas. Le contenu de mon article était en deçà de ce qu'ont écrit bon nombre de mes confrères. D'ailleurs, ce n'est pas moi qui devrais vous le dire, mais plutôt mes confrères, il n'est pas dans mes habitudes d'user de l'insulte, de l'invective ou de porter atteinte à la dignité des personnes. Je n'ai fait que relater des faits avérés, tout en usant de mon droit le plus absolu de commenter ces faits. En fait, ce procès n'a rien d'une affaire de diffamation classique. Il a une résonance politique certaine. D'ailleurs, tout ce qui touche à Driss Basri prend une dimension politique. Prenez le procès Slimani-Laâfora, l'ancien ministre de l'Intérieur est présent dans tous les esprits. Pensez-vous que ce procès n'est, en définitive, qu'un règlement de comptes entre MHI et Driss Basri? Si l'ancien ministre veut régler ses comptes avec la presse marocaine, il ne va jamais s'en sortir. En tout cas, s'il se présente à l'audience du 11 mars, on saura s'il veut utiliser ce procès comme une tribune politique ou pas. Si une commission rogatoire est demandée par le magistrat français, serez-vous prêt à y répondre? Evidemment. Si c'est un juge marocain qui me convoque, je n'hésiterai pas une seconde. Mais pendant qu'on y est, pourquoi pas le Tribunal pénal international. A ce moment-là on parlera de sujets sérieux qui concernent Driss Basri, pendant ses 25 années de pouvoir quasi absolu. On pourra aussi, si Monsieur Basri le veut bien, parler d'un problème grave comme celui des prisonniers marocains détenus à Tindouf. Quand il s'est répandu dans la presse algérienne, il aurait pu leur en parler, au lieu de régler ses comptes sur un registre pas très crédible.