ALM : L'aéronautique a atteint une croissance à deux chiffres à l'export. Quelle lecture faites-vous de cette dynamique ? Karim Cheikh : La dynamique de l'aéronautique au Maroc a permis une croissance de plus de 18%, tirée principalement par une croissance organique des acteurs déjà implantés et qui enregistrent une bonne hausse de cadence et des carnets de commandes très intéressants. Ce résultat ne s'est pas fait du jour au lendemain mais c'est le fruit de plusieurs années de labeur. Cette conjoncture favorable est naturellement portée par une industrie mondialement en croissance. Les investisseurs à l'échelle mondiale s'intéressent à notre pays, qui est aujourd'hui considéré comme une base crédible et compétitive. Toutefois, une croissance durable doit nécessairement être accompagnée d'une bonne structuration de la filière et d'une prospective qui nous permettront de rester fortement présents. Selon vous comment peut-on pérenniser cet élan ? Un des volets déterminants pour la pérennité de notre industrie est la formation et le développement des compétences. Pour cela, l'Etat est fortement engagé avec le Gimas pour déployer tous les efforts permettant l'adéquation entre les besoins de nos industriels et les dispositifs de formation. Certains sont à développer et à réformer et d'autres à créer, pour répondre aux besoins tant en volume, en infrastructures, qu'en filières de formation. Cette dynamique est donc centrale à l'employabilité de nos jeunes et de nos ressources. La hausse de 18% ne se traduit que par un additionnel de 1,6 milliard de dirhams. Comment s'explique cette progression ? L'additionnel de 1,6 milliard DH, ou les 18% de croissance, portés principalement par la croissance organique, ferait en 10 ans l'additionnel de 1,6 milliard de dollars, effectués en 15 ans depuis les débuts de notre industrie. A cela se rajoutera l'impact de croissance qui sera apporté par les nouveaux investisseurs. Il est utile de souligner que le taux de croissance de 18,4 % est dû à la forte croissance des acteurs implantés, qui bien sûr dépend des commandes des constructeurs, des motoristes et équipementiers mondiaux. Nous avons une fenêtre de tir qui nous permet de nous positionner correctement et de profiter au maximum de ce cycle favorable de ce secteur très porteur, où les capacités de production à coût compétitif manquent dans les bases européenne et nord-américaine. Le Maroc s'y est préparé et récolte aujourd'hui les fruits des mesures qui ont été mises en place. Où en sont les contrats-programmes signés avec l'Etat? Nous constatons des résultats probants pour certains objectifs. Certains dépassent même les attentes, sachant que la mise en œuvre des actions n'a démarré que récemment. Pour le taux d'intégration locale, l'objectif à 5 ans de 35% sera revu à la hausse, vu que nous avons déjà atteint 29%. Nous avons mené une étude qui a montré que le chiffre d'affaires cible de 2,6 milliards de dollars pourrait être atteint avec la croissance organique seule, sans compter les nouveaux investisseurs. Il est vrai que la croissance n'est pas linéaire sur les emplois, mais l'objectif de création de 23.000 est atteignable avec une mise en opération rapide de l'ensemble des mesures visant à développer les compétences, principalement sur de nouveaux postes ou métiers. Nous travaillons étroitement sur ce sujet avec les départements de l'industrie et de la formation professionnelle. Le Maroc se positionne comme étant une importante plate-forme de production aéronautique. Sur quels segment et marché devrait-il renforcer ses parts ? Le Maroc opère principalement sur les 4 écosystèmes définis dans le cadre du Plan d'accélération industrielle : Assemblage, EWIS-Système électriques et câblage, MRO-Maintenance et réparation et Ingénierie. Les nouveaux métiers sur lesquels nous souhaitons nous développer, et dans lesquels le Maroc dispose de réels atouts, ce sont les nouveaux écosystèmes portant sur des activités à très forte valeur ajoutée autour des moteurs et des composites. Nous avons comme ambition de mettre notre secteur sur le chemin et la mouvance de l'industrie 4.0 ou industrie du futur. De point de vue marché, nous travaillons à nous diversifier et augmenter notre part dans des pays tels que le Royaume-Uni, l'Allemagne, le Japon et l'Amérique du Nord.