Dans ses relations conflictuelles avec le Maroc, l'Espagne n'essaye pas d'ouvrir ses frontières d'esprit sur des faits pourtant établis. Personne ne comprend qu'un pays de l'UE continue à occuper des territoires marocains comme Sebta, Mellila, les îles Jaffarrines en ce début du troisième millénaire. Feu Sa Majesté Hassan II aimait à répéter que l'on ne pourrait jamais changer la géographie en faisant référence à la nécessité de l'entretien des relations de bon voisinage. Le défunt souverain ne cessait pas, non plus, de clamer sa philosophie de ne pas insulter l'avenir en atténuant les crises qui opposaient le Maroc à la fois à l'Algérie et à l'Espagne. Ses propos visionnaires trouvent aujourd'hui toute leur perspicacité face aux relations conflictuelles avec l'Espagne. Ni le Maroc, ni l'Espagne ne peuvent déplacer leurs territoires pour chercher un autre voisin plus agréable et moins intransigeant. C'est dire que les deux pays, qui sont liés en outre par des relations historiques lointaines dans le temps, sont condamnés à vivre ensemble dans la paix et l'harmonie. Les gouvernements et les peuples n'ont que cette alternative pour la fructifier dans le bon sens de l'entente et de la coopération. Pour ce faire il est plus nécessaire aujourd'hui que jamais de franchir les tabous et de dégager les préjugés par un dialogue franc, rationnel et futuriste. L'histoire des relations conflictuelles entre deux pays est immuable, elle n'a jamais connue une issue heureuse par des rapports de force ou un cantonnement rigide dans des positions morbides. Dans l'état actuel des rapports maroco-espagnols, c'est à une ouverture de frontières d'esprit que l'on doit s'atteler. Mais c'est à nos voisins ibériques de faire cet effort par une ouverture d'esprit qui outrepasse des préjugés figés devant l'évolution du temps et la révolution de la mondialisation. Car le Maroc, gouvernement et peuple, a toujours essayé d'établir des bonnes relations avec l'Espagne malgré le dossier volumineux du contentieux qui l'oppose à son voisin. Sauf que notre pays, comme tout autre pays y compris l'Espagne, ne peut indéfiniment réclamer son bien le plus précieux sans le reconquérir : son intégrité territoriale et sa souveraineté sur tous ses territoires. L'Espagne ne peut pas céder le pays-Basque à des séparatistes, ni admettre que Gibraltar est un rocher qui se trouve outre-manche dans la Grande-Bretagne. Il n'existe pas de deux poids deux mesures dans la colonisation de Sebta et Melilla, les îles jaffarines, Leila et les autres. Tous ces présides et ces iles font partie intégrante du territoire marocain par la force de l'histoire et la preuve de la géographie. Le gouvernement espagnol sait très bien, malgré une conjoncture politique régionale et internationale qui lui est favorable, que personne n'oserait soutenir un comportement révolu de la colonisation au début du troisième millénaire. Les Espagnols sont assez intelligents pour savoir qu'ils pêchent dans les eaux troubles du non-droit, mais ils en ont fait une fixation qui leur fait miroiter le mirage en réalité. C'est cet aveuglement qui a poussé le gouvernement Aznar à déployer toute une armada militaire pour investir une poignée de rochers dans l'île marocaine Leila. Elle est bel et bien marocaine cette île puisque les Espagnols qui l'ont occupée ont consenti à la quitter à la condition qu'elle reste terra nullus. Exactement comme ils ont essayé de le faire croire aux juges de la cour internationale de justice de Lahaye à propos du Sahara marocain en 1974. Mais le verdict de la cour a confirmé l'histoire, la géographie et l'allégeance séculaire de ses habitants aux rois du Maroc. L'Espagne est sortie du Sahara marocain avec la force de la loi appliquée par la volonté de tout un peuple, ce qui ne l'a pas empêché d'ouvrir des brèches dans nos provinces du sud par Alger et Polisario interposés. Pourtant le Maroc a récupéré son territoire d'une manière pacifique sans qu'aucun soldat espagnol ne soit tué, ni blessé. Mais depuis la récupération du Sahara marocain en 1975, l'Espagne n'a jamais cessé de soutenir, financièrement et diplomatiquement, la bande armée d'Alger. Une attitude incompréhensible de la part d'un pays colonisateur qui avait pourtant signé les accords de Madrid validant la rétrocession de cette partie de notre territoire. C'est cet acharnement espagnol contre notre pays que ne comprennent pas les Marocains. D'autant plus que nos voisins rechignent à soutenir les plans de paix de l'ONU comme l'accord-cadre de James Baker. Ils s'alignent sur les positions de l'Algérie et son bâtard, le Polisario, comme si les Marocains pouvaient oser un jour s'aligner sur les mêmes positions de tirs des attentats de l'ETA. Il n'y a point de concordance entre ce qui est légitime et ce qui ne l'est pas. Et les revendications du Maroc sont légitimes comme l'a déclaré récemment le ministre de l'aménagement du territoire, Mohamed Elyazghi, à «la vanguardia». Le ministre marocain a résumé tout le contentieux maroco-espagnol en une phrase : «le gouvernement espagnol est appelé à revoir sa méthode, sa façon de voir et de concevoir les relations avec le Maroc.» Les Espagnols sont capables d'ouvrir leurs frontières d'esprit face à un Maroc qui n'aspire qu'à la paix et au bon voisinage.