S'il n'est pas le plus meurtrier qu'ait connu le pays, ce mois de Ramadan a encore vu les attaques islamistes redoubler d'intensité. Avec une nouvelle donne : leurs cibles principales sont devenues les services sécuritaires. Moins persécutée que les années précédentes, la population algérienne n'a pas moins vécu dans la psychose en ce mois de Ramadan 2002. Car les islamistes armés l'ont démontré à maintes reprises : ils peuvent attaquer à n'importe quel moment, de nuit comme de jour, et n'importe où, sur les routes, dans les centre-villes, et dans les demeures. Dimanche, ils ont d'ailleurs encore une fois attaqué un quartier de la Commune d'Ammi Moussa dans la wilaya de Relizane, à 300 km à l'ouest d'Alger, tuant quatre personnes et en blessant six autres. Selon Le Matin de mardi, qui citait des témoignages de rescapés, le groupe armé a fait irruption dans le quartier et «tiré sur un groupe de citoyens qui profitait de la soirée de Leïlat El Qadr». Parmi les victimes, la presse a relevé la présence de deux enfants âgés de 4 et 6 ans. Le Matin rapportait aussi que cette attaque avait été perpétrée par un groupe islamiste local du nom de Katibat Eddaoua Es-Salafia, actif dans les wilayas de Tiaret, Chlef, Relizane et Tissemsilt. Le même soir, deux policiers ont par ailleurs été tués lors d'une nouvelle attaque du GSPC d'Hassan Hattab en plein centre de Boumerdès (50 km à l'est d'Alger). Quatre hommes ont alors tiré à bout portant sur les deux agents en poste, répétant ainsi le même scénario que celui emprunté dix jours plus tôt dans la même région, à Dellys, lorsque des hommes avaient également abattu deux agents. En tout, six autres policiers ont été tués de la même façon à Berrouaghia (80 km au sud d'Alger), Boghni (130 km à l'est d'Alger) et Bouira (120 km à l'est d'Alger) la semaine dernière. Ces attentats rentrent dans le cadre d'une série de violences visant spécialement les services sécuritaires, lesquels ont enregistré quelque 40 morts et plus de 25 blessés dans leurs rangs en un mois. L'action la plus meurtrière remonte au 23 novembre lorsque, près de Tizi-Ouzou, en Kabylie, neuf militaires ont été tués et 12 autres blessés dans une embuscade tendue par des islamistes. Près de Bouira, cinq autres soldats avaient été tués et 23 blessés dans deux attaques similaires il y a trois semaines. Face à ses attaques ciblées, les militaires ont d'ailleurs intensifié leurs opérations de ratissage dans les régions les plus sensibles du pays. Ils ont ainsi abattu samedi dernier trois islamistes dans la région de Sidi Bel Abbés (450 km à l'ouest d'Alger), tandis que deux autres avaient été tués et un troisième capturé dans le courant de la semaine dernière, près de Sétif (300 km à l'est d'Alger). Ces opérations n'ont cependant en rien empêché la poursuite des massacres sur la population civile. Ne serait-ce que samedi dernier, quatre personnes ont été tuées et une autre blessée à Ouled Ali Bouziane, dans la wilaya de Mascara (450 km au sud-ouest d'Alger). Les victimes étaient deux civils armés par le pouvoir et deux gardes communaux, deux autres catégories largement visées par le GSPC et le GIA ces derniers temps. Dans la wilaya de Médéa (45 km au sud d'Alger), une famille du douar Ouled Brahim a quant à elle été attaquée à son domicile le 27 novembre. Un adolescent de 15 ans a alors été tué d'une balle dans la tête. Depuis le début du mois de Ramadan, le 6 novembre dernier, plus d'une cinquantaine de personnes ont été tuées dans des violences en Algérie, selon un décompte établi par la presse algérienne. Un bilan certes moins terrifiant qu'en 1997, lorsque quelque 1.200 personnes avaient été tuées, mais qui en dit long sur le manque de sécurité et de volonté politique face à la présence toujours inquiétante de l'intégrisme algérien.