Les dirigeants de l'USFP ont face à eux, aujourd'hui, un champ de ruines. Dans un certain sens, c'est une bonne chose. Cela veut dire qu'il n'y a plus d'autres alternatives que la reconstruction et la reconquête méthodique des sympathisants et de l'opinion publique. Or, l'USFP tel qu'il est, aujourd'hui, semble incapable sur le plan politique, organisationnel et structurel de faire face à ce nouveau défi. Quand l'USFP est malade, la démocratie marocaine est fébrile. Si on admet ce postulat de base par honnêteté intellectuelle, on peut alors dire que le parti socialiste marocain est très malade. Il l'est, c'est indubitable, pour la première fois de son histoire, non pas à cause de la répression d'État, à cause d'un hypothétique parti secret ou à cause des forces réactionnaires, il est malade, et c'est un fait remarquable, uniquement du fait de ses propres égarements. Les batailles de clans, les ambitions personnelles, l'absence de vision programmatique collective, la carence de démocratie interne et un accaparement, souvent injustifié, des «outils administratifs » du parti ont fini, à la suite des élections communales, par marginaliser, au moins sur le plan électoral, l'USFP dans le champ politique marocain. Force est de constater, aujourd'hui, que le parti qui était le fer de lance de la transition démocratique, de la propagation des valeurs de l'État de droit et des droits de l'Homme, d'une certaine idée de l'égalité des chances et de la solidarité sociale n'est plus que l'ombre de lui-même. Un congrès raté d'une manière spectaculaire, une mutilation syndicale sans précèdent avec le sabordage de la CDT, une liquidation d'une organisation de la jeunesse, certes turbulente mais dynamique, et une mise à l'écart, aussi sévère que contre-productive, d'intellectuels «organiques» qui ne revendiquaient que le droit à l'écoute et à la différence ont fini par laminer l'USFP. Les dirigeants de l'USFP ont face à eux, aujourd'hui, un champ de ruines. Dans un certain sens, c'est une bonne chose. Cela veut dire qu'il n'y a plus d'autres alternatives que la reconstruction et la reconquête méthodique des sympathisants et de l'opinion publique. Or, l'USFP tel qu'il est, aujourd'hui, semble incapable sur le plan politique, organisationnel et structurel de faire face à ce nouveau défi. Sans une introspection critique et sans concession, aucune projection dans l'avenir ne peut se faire. Le bilan de l'alternance. Le sens de la place de l'USFP dans le gouvernement actuel. Une clarification idéologique nette. Le pluralisme interne. Une redéfinition des responsabilités. Le rôle et la fonction d'un leadership rénové…L'on voit bien que le chantier est immense et douloureux. Mais cette révision-là est inéluctable et incontournable. Dans la tourmente et l'adversité, l'USFP a toujours su resserrer les rangs et faire front uni. Mais, cela n'est vrai que quand ce parti est attaqué de l'extérieur. Or, aujourd'hui, l'USFP est son propre ennemi. Devant ce cas de figure inédit, le parti de Abderrahim Bouabid semble, apparemment, ne pas disposer des armes nécessaires. A ce parti, il manque, et c'est un fait aujourd'hui majeur, un rassembleur. On peut, et on le dit avec rigueur et clairvoyance, constater que la majorité gouvernementale actuelle est caduque. Ce fait rend encore plus improbable et incertain le gouvernement de Driss Jettou, mais cette analyse assumée n'a de valeur que si les partis politiques qui constituent cette coalition tirent les premiers la leçon de leur échec électoral. L'USFP est, dans ce sens précis, le premier parti à être interpellé s'il veut continuer à assumer ses responsabilités historiques. La faiblesse structurelle des partis politiques marocains, la limite de leurs scores électoraux, la faible discrimination « politique et idéologique » entre eux ont fait qu'après les élections législatives du 27 septembre 2002 que le Maroc est sorti du cadre de la feuille de route politique tracée par feu Hassan II en instituant l'alternance consensuelle. Le chef de l'État a, incontestablement, dans ce contexte avec une lecture objective de la conjoncture, assumé ses responsabilités constitutionnelles. Mais si l'on veut revenir à l'esprit de cette feuille de route, seul à même de faire éclore une démocratie moderne, participative et mobilisatrice, il va falloir que les partis politiques, dans leur globalité, soient à la hauteur des ambitions du pays. C'est la seule solution au-delà de tous les bricolages.