Il peut commencer de façon anodine et dégénérer rapidement Au Maroc comme partout dans le monde, le harcèlement scolaire est en train d'atteindre des proportions alarmantes. Cette violence qui s'installe de plus en plus sur les bancs de l'école s'ajoute aux nombreuses lacunes du système éducatif. Exercé par le corps enseignant ou par les camarades de classe, le harcèlement laisse des effets néfastes sur la psychologie de l'enfant et sur son développement. Ce n'est certes pas un phénomène nouveau, mais depuis quelques années cet acte abominable semble prendre de l'ampleur en raison de l'émergence des nouvelles technologies. Ainsi, des centaines de vidéos sont partagées sur les réseaux sociaux levant le voile sur l'humiliation, la violence et les rackets que subissent certains élèves. Cette violence cause très souvent des séquelles graves chez l'enfant pouvant aller de l'échec scolaire jusqu'au suicide. D'ailleurs, Martin Teicher, professeur de psychiatrie à Harvard, a utilisé l'IRM pour montrer que l'intimidation endommage les neurones de la zone centrale du cerveau. Il a aussi mis en évidence la relation entre le harcèlement scolaire et les problèmes d'addiction à l'âge adulte. D'autres études scientifiques ont prouvé que le harcèlement scolaire augmente le taux de cortisone, l'hormone du stress, ce qui entraîne très souvent des troubles de la mémoire et de la concentration ainsi que des difficultés de raisonnement. C'est justement ce qui a attiré l'attention de Fatiha. H., maman d'une fillette harcelée à l'école : «Ma fille était brillante, elle a toujours eu de très bonnes notes, mais il y a quelques mois, elle refuse d'aller à l'école sous prétexte qu'elle a mal au ventre. Petit à petit, ses notes ont chuté et sa maîtresse m'a expliqué que ma fille n'était plus attentive en classe et qu'elle n'arrivait plus à se concentrer. Quand on a consulté un pédopsychiatre, il a réussi à faire parler ma fille : elle était harcelée par ses camarades de classe, qui l'insultaient et l'humiliaient devant tout le monde. J'ai fini par l'inscrire dans une autre école». Le harceleur est une personne en souffrance Le harcèlement scolaire peut commencer d'une façon anodine et peut dégénérer rapidement surtout que le harceleur ne connaît pas ses limites comme l'explique Kenza Hokimi, coach maître praticienne en PNL, coach scolaire et coach familial : «Le harceleur est un enfant qui n'a peut-être pas connu de limites ou qui a cumulé tellement de brimades et de violence dans son enfance qu'il est devenu une personne rebelle qui défie les autres. L'agresseur a un certain charisme. Il éprouve un fort besoin de domination et cherche à apparaître comme un «dur» aux yeux des autres enfants. Souvent, le harceleur a du mal à accepter la différence et voudrait rendre les autres conformes à ce qu'il est. Les harceleurs n'ont pas une bonne image d'eux-mêmes mais aussi de leur scolarité et de leur établissement. Je pense que le harceleur est quelqu'un qui a besoin d'être recadré et qui est aussi, quelque part, en difficulté et en souffrance». Cette souffrance, Hicham l'a connue de très près : «A l'âge de 6 ans, je passais souvent inaperçu. Avec mes cousins, mes voisins ou mes amis de classe, personne ne prêtait attention à moi. Petit à petit, je suis devenu turbulent, j'accumulais les bêtises pour attirer leur attention et bizarrement, j'ai réussi. Je suis devenu un peu leur Caïd. Pour me venger de tous ceux qui ne me prêtaient aucune attention, j'humiliais et tabassais les enfants timides et effacés. C'était une manière pour me prouver et prouver aux autres que je suis le plus fort. Cela a duré plusieurs années. Avec l'âge de l'adolescence, mon état s'est aggravé puisque mon délire était devenu d'attaquer les filles et de leur faire subir des châtiments insupportables». Inutile de rappeler qu'il arrive souvent que le harcèlement scolaire soit aussi commis par le corps enseignant ou administratif. Que ce soit dans les écoles publiques ou privées, certains professeurs ont l'art d'humilier et de violenter les élèves. Tous les moyens sont bons pour remettre «de l'ordre» dans la classe comme les gifles, les coups de bâton ou la fameuse falaqa. Les chiffres, quant à eux, restent insignifiants, peu d'enfants dénoncent ce qu'ils subissent par peur de représailles. Par : Khaoula Benhaddou