Alors que Washington et Bagdad campent sur leurs positions, la France et la Russie tentent de décrisper les débats au sein du Conseil de Sécurité. Le chef des inspecteurs, Hans Blix, devient l'homme clé pour sortir de l'impasse. Hans Blix, le chef des inspecteurs en désarmement, est désormais l'homme clé qui est en mesure de rapprocher les positions sur l'Irak. Son intervention hier devant le Conseil de Sécurité était donnée pour décisive pour les pays indécis face aux exigences américaines et à l'impératif d'éviter la guerre. Malgré d'interminables palabres entre les cinq membres permanents du Conseil qui disposent du droit de veto, la situation ne paraît guère évoluer vers l'adoption rapide de la résolution américaine. L'intervention du diplomate suédois, qui préside la mission d'inspection des armes irakiennes pourrait faire pencher la balance, selon qu'il dira ou non si les modalités d'inspection revendiquées par l'administration Bush renforceront ou gêneront leur travail. «La tendance au sein du Conseil de Sécurité est de dire que Blix est l'arbitre de tout cela», commente un diplomate d'un pays membre permanent. «Ce que les pays non-membres permanents voudront entendre, c'est si ce projet de résolution aide ou gêne les inspections », ajoute-t-il. Le ministre français des Affaires étrangères, Dominique de Villepin, a proposé de réunir le Conseil au niveau ministériel pour lever les derniers blocages avant le vote d'une résolution. «J'ai évoqué cette idée avec plusieurs de mes collègues y compris Colin Powell qui l'ont bien accueillie», a-t-il dit dans un entretien au Figaro. «Nous allons essayer de travailler avec les Américains sur la base du texte qu'ils ont proposé. Si nous n'y arrivons pas, nous proposerons évidemment officiellement notre propre texte. Notre désir, c'est d'aboutir». «Nous avons atteint le point où nous devons prendre quelques décisions fondamentales et aller de l'avant. Nous ne pouvons pas continuer à avoir un débat qui ne finit jamais», a déclaré de son côté M. Powell. Le débat de l'ONU sur l'Irak est donc entré dans une phase cruciale et dans une semaine clef. La France et la Russie s'opposent à un projet de résolution américain qui donne automatiquement aux Etats-Unis la possibilité d'attaquer l'Irak. Le ministre français de la Défense, Michèle Alliot-Marie, a encore estimé qu'une guerre avec l'Irak aurait pour conséquence la déstabilisation de toute la région et pourrait conduire à la recrudescence d'attentats terroristes dans le monde. «D'autres attentats seraient à craindre» si un nouveau conflit devait éclater. Ces risques ne semblent pas inquiéter outre mesure les Etats-Unis dont le président vient de réitérer qu'il était prêt à mener une action militaire unilatérale en Irak. «Je l'ai dit et je l'ai répété très souvent ces derniers temps, les Etats-Unis sont prêts, si l'ONU n'adoptait pas une résolution qui rime avec quelque chose, à diriger une campagne pour débarrasser l'Irak de ses armes chimiques et biologiques», a-t-il lancé. L'Irak accuse Bush de vouloir manipuler le Conseil de Sécurité. «L'infâme administration américaine pratique un terrorisme à l'intérieur et à l'extérieur de l'ONU de façon à faire passer son nouveau projet de résolution. Chaque paragraphe de ce projet attise les tensions et donne une excuse pour lancer une agression», écrit un journal officiel du parti Baath. Washington a déjà fait disparaître ou atténué la portée de plusieurs dispositions d'un projet initial, jugée par la France et la Russie, notamment, comme des provocations à l'égard de Bagdad. L'administration Bush a notamment renoncé à sa demande de pouvoir placer ses propres hommes au sein des équipes d'inspection, ou les faire accompagner par des escortes armées. Mais elle continue toujours de réclamer le droit de décréter des zones interdites à tout trafic aérien ou terrestre autour des sites suspects. Elle demande également que le Conseil de Sécurité déclare que l'Irak est en violation des conditions du cessez-le-feu qui a mis fin à la première guerre du golfe en 1991.