Pour qu'elle ne soit pas confrontée, dans l'avenir, aux questions à propos de son bébé, fruit de relations extraconjugales, sur son origine et son père, Nadia a fini par le tuer en l'étouffant. Nadia n'a jamais imaginé tomber enceinte et accoucher d'un enfant depuis qu'elle a rejoint les rangs des filles de joie à Khemisset. Et pourtant, c'est ce qui lui est arrivé. Comment ? Cette fille de vingt-trois ans est née au douar Lakhzazna, Caïdat de Sidi Abderrazak, à Khemisset. Atteignant l'âge de la scolarisation, elle a été inscrite à l'école la plus proche de chez elle. Seulement, elle n'a pas dépassé le niveau de la cinquième année d'enseignement fondamental pour se retrouver du jour au lendemain près de sa mère. Elle est restée à faire la lessive et laver le linge. Arrivant à l'âge de l'adolescence, elle a commencé à chercher sa liberté personnelle. Elle ne voulait plus rester emprisonnée chez elle, derrière quatre murs comme le harem. Elle désirait sortir, bavarder, accompagner ses amies au centre-ville et connaître de jeunes hommes. Toutefois, la recherche d'une liberté sans conscience et maturité semble ne mener qu'à l'enfer. Nadia a vécu, âme et chair, cette expérience. Au fil du temps, elle a commencé par fumer des cigarettes et parfois du haschisch. Certes, les jeunes qui s'amusaient avec elle étaient au départ généreux. Seulement, quand elle est devenue facile pour tout le monde, personne ne veut rien lui livrer qu'en contrepartie de quelques moments de plaisir. Enfin, elle s'est habituée à coucher avec n'importe quel jeune à la recherche du plaisir et ce, contre une somme d'argent. Bref, elle s'est convertie en une fille de joie. Depuis, Nadia ne rentre plus chez elle que rarement. Sa mère qui était, également, en besoin de soutien matériel ne lui a rien reproché et n'a pas protesté contre elle. Au contraire, elle l'accueillait chaleureusement à chaque fois qu'elle retournait chez elle pour lui glisser dans la main des billets de banque. Après quoi, elle rebroussait chemin à la rue en quête de clients avec lesquels elle passait des nuits. Un jour, Nadia est tombée enceinte. Que doit-elle faire? Comment doit-elle affronter son calvaire ? Se contente-t-elle de patienter neuf mois avant de mettre au monde son nouveau-né ? Qui est son père ? Plusieurs questions lui ont hanté la tête sans avoir de réponse. Sa mère et sa sœur lui ont conseillé d'utiliser des produits traditionnels pour se faire avorter. Mais en vain. Il semble que cet embryon qui colle dans son ventre s'accroche à la vie. Neuf mois plus tard, elle a accouché d'un garçon. Qui en est le père ? la question se pose toujours. Mais elle reste sans réponse. Sa mère et sa sœur lui ont demandé de ne plus penser à l'avenir de son enfant et de s'intéresser à son présent, à sa nourriture et à son habillement. Elles lui ont expliqué qu'elle doit penser à l'argent nécessaire pour veiller sur lui. En conséquence, elle doit retourner à la rue en quête des clients. Effectivement, elle a repris son activité, vendant sa chair. Est-elle sur le bon chemin ? Que doit-elle dire à son enfant quand il sera grand ? Peut-elle lui expliquer qu'il n'a pas de père, qu'il est l'enfant du péché, le fruit de quelques moments de plaisir vendus à un client ? D'une semaine à l'autre, elle voit son enfant grandir, ses problèmes s'accroissent. Et la solution? Difficile de la trouver. Quatre mois plus tard, elle s'est rendue chez sa sœur, mariée, pour passer quelques jours avec elle. Le premier jour est passé, puis son séjour chez elle a duré une semaine. Il semble qu'elle désirait encore rester chez elle. Ce jour de novembre, la sœur de Nadia et son mari sont sortis de chez eux depuis le matin. Ils vont rendre visite à quelques membres de leur famille au douar Lahrabla, commune de Makam Talba. Quand ils ont retourné chez eux, ils ont remarqué l'absence du nourrisson. Où est-il ?. “Je l'ai confié à une famille riche qui va prendre soin de lui”, leur a répondu Nadia. Racontée-t-elle la vérité? Son beau-frère ne l'a pas cru, lui a demandé de raconter la vérité. Mais en vain. Nadia lui a confirmé qu'elle l'a donné à une famille qui le prendra en charge. Sans dire mot, son beau-frère qui n'a pas avisé son épouse de son initiative, part à destination du poste de la Gendarmerie Royale à Sidi Abderrazak. “Je doute de ses comportements et ses paroles, je ne l'ai pas crue”, a-t-il expliqué aux enquêteurs. Il a mis la puce à l'oreille de ces derniers qui ont décidé de l'accompagner chez lui afin d'interroger Nadia. D'une question à l'autre, cette dernière a craché le morceau :“ Je l'ai étouffé avec mes deux mains et je l'ai enterré au-dessous de la paille” Son corps a été effectivement retrouvé et Nadia a été traduite devant la justice à Rabat.