S'appuyant sur une interprétation de la Charte communale, les présidents des cinq arrondissements de Rabat exigent que l'entretien des petites artères de la ville leur soit dévolu. Le conseil de la ville de Rabat a voté, vendredi dernier, son budget pour l'exercice 2005, dans des conditions pour le moins extrêmes. En effet, la session s'est déroulée en l'absence, notamment, du maire de la ville, Omar Bahraoui, en déplacement à l'étranger, du secrétaire général du conseil de la ville, également à l'étranger, et du rapporteur du budget, pour un motif incertain. En clair, le deuxième vice-président du Conseil de la ville, Reda Benkhaldoune (PJD), a présidé la séance quand le premier vice-président du Conseil, Hassan Cherkaoui, a lui aussi pris la tangente. Pourquoi ce désistement en masse? La raison est simple: la séance s'annonçait très chaude. Et pour cause, les présidents des cinq arrondissements de la capitale (Yaâcoub Mansour, Hassan, Agdal-Riad, Youssoufia et Souissi) avaient fait front-commun pour faire passer deux importantes décisions dans le budget de la ville. La première a trait à la distribution des fameux bons de secours pour les démunis, lors du mois sacré de Ramadan. Chaque année, le conseil de la ville distribue aux nécessiteux l'équivalent de 2,4 millions de DH en denrées alimentaires. La proposition des présidents des arrondissements a consisté d'accaparer le droit de distribuer eux-mêmes une partie de ces bons. Craignant que cette distribution directe des bons par les présidents d'arrondissements ne finissent par devenir un achat prématuré des voix électorales, les membres du Bureau du Conseil ont catégoriquement refusé la proposition. Abdelmounim El Madani, Péjidiste et septième vice-président du Conseil, a proposé, pour éviter tout dérapage politicien, que la dépense des 2,4 millions de DH soit carrément institutionnalisée. En termes clairs, "nous avons proposé que la somme doit entièrement être remise entre les mains de la Fondation Mohammed V pour la solidarité", explique El Madani. "C'est une aberration", rétorque Faouzi Chaâbi, président de l'arrondissement de Souissi. Pour ce dernier, il faut diviser de manière arithmétique les 2,4 millions de DH ou carrément supprimer ces bons en utilisant cet argent dans la réalisation de projets sociaux dans la ville". Car Chaâbi estime que l'objectivité fait affreusement défaut dans la distribution de ces bons. Autre revendication des présidents qui a soulevé un tollé lors de la réunion de l'assemblée: la division du territoire de la ville en grandes et petites artères. Les premières seront du ressort de la ville, et les secondes de celui des arrondissements. "Alors que cette proposition du président de l'arrondissement de Hassan allait être acceptée à l'unanimité, Benkhaldoune a carrément stoppée l'opération de vote", s'insurge Chaâbi. Pour sa part, le Dr. Abderrahim Chab, président de la Commission de la communication et de l'information à la municipalité, rappelle que "la Charte communale est claire, elle stipule que les grands travaux dans les grandes et les petites artères font partie des attributions du Conseil de la ville". C'est ainsi que l'arrondissement de Souissi, organise une session extraordinaire lors de laquelle Faouzi Chaâbi présentera les problèmes qu'il rencontre avec le Conseil de la ville, et plus particulièrement le président Bahraoui. A noter par ailleurs, que le budget de fonctionnement de la municipalité en 2005 est de l'ordre de 600 millions de DH, seulement, dont 60% serviront au paiement des 7.000 fonctionnaires. "La ville a même réussi à dégager un excédant de 17 millions de DH, grâce notamment à la dynamisation des recouvrements", assure Benkhaldoune. En tout cas, le bras de fer entre les présidents des arrondissements et la municipalité ne fait que commencer. C'est même tout à fait normal car dans une ville comme Rabat, dont le statut est assez particulier, la période transitoire risque de durer plus longtemps que prévu. La wilaya commence à lâcher du lest. Dans cette ambiance, les différents intervenants essaient de tirer la couverture de leur côté, avant de repartir sur des bases solides.