Des chefs de partis réagissent à l'avant-projet de loi sur les partis politiques. Dans leur majorité, ils saluent l'esprit du texte, mais recommandent quelques amendements. Les concertations sont ouvertes entre les formations politiques et les autorités pour que le projet soit adopté de façon consensuelle. Ismaïl Alaoui, secrétaire général du Parti du progrès et du socialisme (PPS) : «Notre démocratie n'est pas mûre» J'estime que le fait d'avoir recours à un projet de loi sur les partis politiques signifie que la démocratie dans notre pays n'est pas encore mûre. Notre démocratie n'est pas idéale. L'avant-projet de loi sur les partis politiques répond donc à une nécessité historique de l'étape que nous traversons. En ce qui nous concerne, le texte ne revêt pas beaucoup inconvénients. Nous déplorons juste la forte présence du ministère de l'Intérieur et espérons que ses compétences soient transférées au pouvoir judiciaire. Il n'y a rien d'anormal dans cette suggestion, car comme tout avant-projet, celui sur les partis politiques est sujet à des amendements. Mohamed El Abied, secrétaire général de l'Union constitutionnelle (UC) : « On l'attendait » C'est une loi qu'on attendait. On la réclamait et nous nous réjouissons beaucoup au sein de l'UC de la voir sous forme d'avant-projet. Ce projet de loi va donner de la crédibilité à la chose politique au Maroc. Il va mettre un terme au népotisme, clientélisme et autres agissements qui ne permettaient pas de se faire une haute idée du travail politique des partis. Ces agissements avaient contribué au désintérêt des jeunes pour la vie partisane. Je n'en veux comme preuve que le taux élevé des abstentions lors des dernières législatives. Aujourd'hui, chaque parti sait à quoi s'en tenir. Evidemment, il y a un toilettage à faire pour rendre certains articles applicables au quotidien, mais nous n'avons aucune réserve à formuler sur l'esprit de ce projet de loi et sur ses fondements. Plus de transparence dans les comptes des partis et moins de balkanisation stérile au niveau de l'exercice politique, qui peut ne pas applaudir un projet qui vise à donner de la crédibilité à l'action politique des partis. Ahmed Osman, président du Rassemblement national des indépendants (RNI) : «Il n'est pas aisé d'en parler» Il s'agit d'une loi très importante, mais le poids de son importance en rend difficile l'appréhension sans des concertations préalables au sein du parti. Il n'est pas aisé de parler d'une loi sur les partis politiques. Dans les pays à forte tradition démocratique, comme la France, il n'y a pas de loi sur les partis politiques. Mais chez nous, elle est rendue nécessaire. Et SM le Roi Mohammed VI a insisté sur l'élaboration d'une loi sur les partis politiques. Nous allons la discuter au sein du RNI et faire part de nos observations au ministère de l'Intérieur. En ce qui me concerne, j'y suis favorable, mais sous réserve de quelques amendements, notamment l'article qui concerne la création d'un parti politique. Les conditions me semblent trop contraignantes. Et puis, ce ne sont pas les 1000 membres fondateurs qui déterminent l'importance d'un parti politique, mais les urnes. Autrement, je salue l'esprit de cette initiative. Saâd Eddine Al Othmani, secrétaire général du Parti de la justice et du développement (PJD) : «Nous le signons» Globalement, l'initiative est très bonne, et nous nous en félicitions. Le texte qui nous été soumis est une amélioration de l'avant-projet de loi sur les partis politiques, élaboré par l'ancien gouvernement. Nous avons noté avec satisfaction que les recommandations des partis politiques ont été prises en considération dans le nouveau texte. Nous saluons cette concertation avec les partis politiques. C'est très bien et nous signons le nouveau texte à deux mains. Nous avons toutefois deux réserves à formuler : la première concerne la création d'un parti politique. 1000 membres fondateurs, c'est trop! Ils constituent un obstacle qui pourrait devenir insurmontable pour la création d'un parti. Nous demandons que ce chiffre soit revu à la baisse. La seconde réserve concerne les articles 42, 43 et 49 de l'avant-projet de loi. Il y est question des prérogatives du ministère de l'Intérieur. Ces prérogatives peuvent faire l'objet de mauvaises interprétations, c'est pour cela que nous souhaitions leur transfert au ministère de la Justice. Mahjoubi Aherdane, secrétaire général du Mouvement national populaire (MNP) : «Il est valable» C'est un avant-projet de loi très important. Toute organisation de la vie politique est valable. Au sein de la MPU, nous sommes en train de discuter le projet et allons communiquer nos observations et suggestions aux autorités. Le projet en soi comporte des éléments positifs. Mais il y a aussi des choses à revoir. Il ne faudrait pas que les formations politiques soient assujetties à des exigences trop contraignantes. Les partis doivent garder leur liberté. C'est très bien d'exiger de la transparence au niveau de la comptabilité des partis, mais il faut aussi tenir compte de la réalité du pays. Est-ce que je vais demander une facture à un député qui se déplace en taxi ou paie des services pour 100 DH ? Notre pays ne se prête pas à ce type d'opérations. Je comprends parfaitement que l'Etat veuille savoir où passe l'argent, mais il y a la manière. Et cette manière me semble manquer à l'avant-projet tel qu'il a été élaboré. Autrement, je répète que l'idée de l'organisation de la vie politique est louable. Thami El Khiary, secrétaire national du Front des forces démocratiques (FFD) : « Le texte est clair » L'élaboration de ce projet est le signe d'un progrès, d'un grand pas dans la démocratisation de l'action politique au Maroc. Pour ma part, je le considère comme le principal moteur de la nouvelle dynamique politique. Nous le saluons et sommes en train de l'étudier pour soumettre nos observations au gouvernement. Mais d'emblée, je dois dire que j'ai été gêné par ce que j'ai lu dans la presse concernant l'ingérence de l'Etat dans la vie partisane. Je ne sais pas ce qui a permis cette interprétation, d'autant plus qu'il me semble que le texte est clair et qu'il ne vise en aucun cas la mainmise de l'Etat sur l'action des partis. Mais pour éviter ces interprétations orientées, il convient de revoir la rédaction de certains articles du projet pour le mettre définitivement à l'abri des mauvaises volontés.