Mohamed, âgé de 19 ans, demandait à des familles d'Imintanout de lui confier leurs enfants mineurs, non scolarisés, pour les employer dans des laiteries contre des sommes d'argent. Seulement, il les emmenait à Sidi Bennour afin de les exploiter dans la mendicité et les "Halka". À Sidi Bennour, la Chambre correctionnelle près le tribunal de première instance est archicomble ce jour du mois d'octobre. C'est la première fois qu'elle examine une pareille affaire. La tête baissée, Mohamed se tient devant les magistrats. Personne ne concevait qu'une personne aussi jeune que lui pouvait exploiter des enfants à la fleur de l'âge. Exploitait-il des enfants ? Comment ? La majorité de l'assistance connaît déjà l'histoire. Parce qu'elle a fait le tour de la ville une fois l'affaire éclatée. Comment a-t-elle été soulevée ? C'était une ronde routinière pour lutter contre la petite criminalité dans cette ville qu'effectuaient les éléments de la police, lorsque ces derniers ont remarqué un enfant de sept ans s'adressant aux passants, leur tendant sa petite main et les suppliant de lui verser un sou. Il leur a expliqué qu'il était orphelin de ses deux parents et qu'il dormait à la belle étoile. Les policiers qui combattent ce fléau se sont adressés à lui et l'ont fait monter dans le fourgon. Certes, il pleurait et leur demandait de le relâcher. L'un des policiers lui a demandé sa demeure et ses parents. “Ou demeurent-ils ? Sont-ils aussi cruels au point qu'ils te livrent à la mendicité ?“, lui a-t-il demandé tout en le rassurant qu'ils ne lui feraient pas de mal et qu'ils allaient prendre soin de lui pour le remettre à ses parents que la loi va châtier. “Mes parents ne savent pas que je mendie“, leur a-t-il affirmé. Comment ? Qui l'a embrigadé dans les rangs de ces bataillons de mendiants ?. D'abord, ses parents demeurent à Imintanout, explique-t-il aux enquêteurs. Ils sont très pauvres au point qu'ils n'ont pas pu l'inscrire à l'école. Ils ont préféré le garder près d'eux en attendant qu'il trouve un boulot qui lui permette d'avoir quelques sous pour les aider. Et l'occasion est arrivée quand Mohamed, dix-neuf ans, est venu chez eux leur proposer de prendre l'enfant avec lui à destination de Rabat. “Là, il va travailler dans une laiterie“, leur a-t-il expliqué. Seulement, il n'a pas tenu sa promesse. Il l'a conduit à destination de Sidi Bennour, où il loue une chambre, pour l'engager dans la mendicité et parfois à faire la “Halka“. Cet enfant était obligé de verser la recette journalière à Mohamed qui se contentait de lui donner de quoi manger et boire et envoyer quelques sous mensuels à ses parents à Imintanout. “Je ne suis pas le seul enfant qui travaille pour lui, nous sommes trois“, a avoué l'enfant aux enquêteurs. Ces derniers se sont lancés à la recherche des deux autres enfants jusqu'à ce qu'ils les aient trouvés pour les conduire au commissariat et recueillir leurs déclarations qui accusent Mohamed. Effectivement, ils ont reconnu avoir été engagés par ce dernier pour amasser l'argent en recourant à la mendicité ou à l'organisation de “Halka“. Ils ont même précisé que Mohamed n'hésitait pas à abuser, à chaque fois, de l'un d'entre eux. Un comportement que Mohamed a nié quand il a été arrêté. Il a avoué aussi bien devant les enquêteurs que devant le procureur du Roi, les avoir exploités dans la mendicité et les “Halka“. Confirmant sa disculpation en ce qui concerne l'abus sexuel le procureur s'est contenté de l'accuser d'exploitation d'enfants pour mendicité. Une accusation qu'il a reconnue devant le tribunal lors de son interrogation et qui lui a coûté un an de prison ferme. Alors que les trois enfants ont été confiés à leurs parents.