Un père de famille de la région d'Azrou croyait avoir réalisé une belle affaire en achetant un champ d'oliviers à bas prix. Mais il va vite découvrir qu'on a abusé de sa bonne foi : le vendeur du terrain n'en était pas le propriétaire. Aïn Ceggag, région de Sefrou. Un père de famille veut acquérir un terrain de cinq hectares où sont plantés des oliviers. Il s'adresse alors à des courtiers du coin. Ces derniers sont au courant de tout ce qui se vend et s'achète dans la région. «Je voudrais acheter un terrain d'oliviers de cinq hectares, avec un prix qui ne dépasse pas deux cents mille dirhams», confie le père à un «professionnel» du secteur, certain qu'il peut répondre à sa demande. Les deux hommes se fixent un délai de deux ou trois jours, le temps pour le courtier de faire ses recherches. Une fois le terrain trouvé, les deux hommes se rencontrent à nouveau. «Son propriétaire est en crise financière et il veut se débarrasser de son terrain contre un bas prix», lui dit l'intermédiaire. La nouvelle ravit le père de famille qui pense réaliser un de ses rêves. «Quelle occasion, je n'aurais jamais penser trouver un tel terrain à un si petit prix», pense-t-il. Il n'hésite donc pas une seconde d'autant que le courtier lui assure que ce lopin est très fertile. Une bonne affaire. L'intermédiaire et le futur acheteur se rendent donc tous les deux jusqu'au terrain. Le propriétaire ? «Il sera de retour dans deux ou trois jours car il est en voyage», explique le courtier à son client inquiet. «C'est un homme brave, serviable et très pieux», ajoute-t-il. Effectivement, les trois hommes se retrouvent deux jours plus tard. Le propriétaire reste d'abord muet devant son futur acheteur et se contente de sourire. «Le champ et les oliviers sont fertiles, et je veux le vendre à un prix très raisonnable», finit-il par expliquer. Puis, avant que les trois hommes ne se quittent, le propriétaire saisit l'acheteur par la main et le prend à l'écart. «On doit entamer la procédure de la vente dès demain car j'ai besoin d'argent», lui confie-t-il. «Si je n'en ai pas besoin, jamais je ne me séparerai de ce terrain d'oliviers. J'y tiens énormément et je regrette déjà de devoir le perdre. Mais je crois en Dieu, qui va me récompenser Incha Allah de ce bon geste», ajoute-t-il. Le lendemain, le propriétaire entame les démarches relatives à la vente. La transaction peut ensuite se faire et il pourra recevoir cent quatre-vingt-dix mille dirhams. Quelques jours plus tard, l'heureux acquisiteur se rend sur sa nouvelle terre avec quelques amis. «Tu as réalisé une belle affaire» lui dit l'un d'eux. Surpris, un homme sort alors de sa maison située tout près du terrain. «Que voulez-vous ?», leur demande-t-il. «Et toi que fais-tu ici, sur mon champ ?», lui répond le père de famille. L'homme reste bouche bée pendant quelques secondes. «Mais qu'est-ce que tu dis ? C'est mon champ, le l'ai hérité et tout le monde le sait. Ce n'est pas le tien, tu es fou ou quoi?», finit-il par dire. La surprise est grande. L'acheteur rougit de honte. Il vient de comprendre l'arnaque et se met à chercher l'intermédiaire. Introuvable. Les deux propriétaires du champ d'oliviers finissent par alerter la brigade de la Gendarmerie Royale. Qui est légalement le véritable propriétaire ? Les limiers de la Gendarmerie Royale se retrouvent face à un casse-tête dans cette affaire singulière. Les deux hommes disposent en effet tous les deux d'un acte d'acquisition en bonne et due forme, l'un par héritage, l'autre par achat. Le faux propriétaire et le courtier ont disparu. Le second finit cependant par être retrouvé et arrêté. «La personne que j'ai présentée à l'acheteur comme propriétaire est mon beau-frère», avoue-t-il. Certes, les deux escrocs avaient bien monté leur scénario et ont empoché un magot de 190 mille dirhams. Seulement leur aventure les a directement conduits en prison. • Lahcen Meddas Correspondance régionale