Yasser Arafat n'a pas manqué la prière d'Al-Fajr, jeudi dernier. Un geste hautement symbolique pour montrer qu'il est toujours de la partie. En dépit de la dégradation subite de son état de santé, le Raïs semble ne pas avoir dit son dernier mot. Abou Âmmar est fatigué. Très fatigué. Son état de santé s'est dégradé de façon brusque, suite à ce qui ne semblait être qu'une simple grippe. Arafat souffrait aussi de douleurs abdominales depuis plus d'une semaine. Une armada de médecins s'est rendue à son chevet, dans la Moqataâ où il est confiné depuis septembre 2001, dès que l'écho concernant la détérioration de son état de santé s'est propagé. «Les équipes médicales venues de Tunis, de Jordanie et de Palestine se réuniront dans les heures qui viennent pour décider s'il a besoin d'être transporté ailleurs», soulignait-on jeudi. Ce genre de déclaration fait suite aux déclarations israéliennes, faisant état de la possibilité pour le leader palestinien de quitter la Moqataâ pour pouvoir se faire hospitaliser ailleurs. Des dispositions ont, en effet, été prises pour qu'Arafat puisse être évacué d'urgence vers un hôpital en cas de besoin, avant même l'arrivée des équipes médicales. Outre l'équipe jordanienne, des médecins américains et égyptiens étaient attendus dans la journée de jeudi. Les personnes qui ont pu rentrer en contact avec lui affirment qu'Arafat perdait sporadiquement connaissance et, à d'autres moments, semblait distrait et désorienté. Selon des sources médicales, il ne peut ni manger ni boire sans vomir et a été placé sous perfusion. A 75 ans, le leader de l'Autorité palestinienne symbolise, à lui seul, la cause de tout un peuple en quête d'un État indépendant, la lutte pour l'indépendance et la non-abdication devant l'arrogance israélienne. Yasser Arafat, connu également sous son nom de résistance Abou Âmmar est, de son vrai nom, Mohammed Abdel Rahman Abdel Raouf Al-Qudwa Al-Husseini. Mohammed Abdel Rahman est son prénom ; Abdel Raouf, le nom de son père ; Arafat, celui de son grand-père ; Al-Qudwa est le nom de sa famille et Al-Husseini est le nom du clan dont font partie les Al-Qudwas. L'appartenance à la famille Al-Husseini lui a parfois été contestée. En 1959, Yasser Arafat s'installe au Koweït, en tant qu'ingénieur. Dans cet émirat, déjà, travaillaient et résidaient de nombreux Palestiniens. Il y créa le Mouvement de libération de la Palestine «Harakat Tahrir Falastine», rebaptisé rapidement Al-Fatah «La conquête», une organisation ayant pour but l'établissement d'un État palestinien indépendant. En 1967, la guerre des Six Jours allait changer la donne géopolitique au Proche-Orient. L'impact d'un tel bouleversement constitua le véritable point de départ de Yasser Arafat. L'Égypte, la Syrie et la Jordanie furent défaites par Israël qui en profita pour conquérir Jérusalem-est, la Cisjordanie, la bande de Gaza, territoires palestiniens qui étaient passés en 1948 sous double occupation jordanienne et égyptienne, mais aussi le Golan syrien et le Sinaï égyptien. La fin des années 60 fut marquée par la montée en première ligne de l'OLP. En agissant de la sorte, Yasser Arafat, changea la nature même du combat des Palestiniens. Il s'agissait dorénavant de la «lutte de libération nationale» d'un peuple «colonisé», les Palestiniens, par un État oppresseur, Israël. L'année 1974 constitue, pour Yasser Arafat, une année importante d'avancées politiques à caractère pacifiste. En juin, l'OLP adopta le principe de création d'un État palestinien sur les territoires qui seront «libérés ». En novembre, son président reconnaît implicitement l'existence d'Israël en appelant, à l'Assemblée générale de l'ONU, toutes les parties à rechercher une solution pacifique pour la Palestine. Il fut le premier représentant d'une organisation non gouvernementale à participer à une session plénière de l'Assemblée générale de l'Organisation des Nations unies. Arafat ordonna que l'OLP cesse tout acte de violence à l'extérieur d'Israël, de la Cisjordanie et de la bande de Gaza. En août 1993, un plan de paix verra le jour à Oslo, fruit d'une série de négociations secrètes qui aboutiront à un accord de paix, signé à la Maison-Blanche sous l'égide du président Bill Clinton. Le monde entier retient la poignée de main échangée avec le Premier ministre israélien Yitzhak Rabin et la nouvelle donne géopolitique que constitua le plan d'Oslo. Yasser Arafat reçut, pour ce plan d'Oslo, le prix Nobel de la paix en 1994.