L'état de santé de Yasser Arafat fait l'objet de versions contradictoires. Dans les territoires occupés, les Palestiniens éprouvent des sentiments diffus à l'idée du vide que laisserait le départ du symbole de leur lutte. Dimanche dans la matinée, les sympathisants de la cause palestinienne, entourés de drapeaux palestiniens, de portraits de Yasser Arafat et de chandelles, étaient toujours à l'affût de nouvelles du Raïs palestinien, devant l'établissement hospitalier où il est soigné depuis le 29 octobre dernier. L'état de santé du leader de l'Autorité palestinienne, hospitalisé à Clamart en banlieue parisienne, n'avait pas enregistré de changement notoire par rapport à ce qu'il était vendredi. « Yasser Arafat se trouve dans un état inchangé par rapport au dernier bulletin de santé », avait indiqué, dimanche matin, le général Christian Estripeau, chargé de la communication au service de santé des armées françaises. Un peu partout dans le monde et, principalement, en Palestine, c'est le même sentiment de frustration qui prévaut. Pour le commun des mortels ayant assisté aux tristes épisodes de l'occupation israélienne, Yasser Arafat est plus qu'un dirigeant, il est le symbole de la cause palestinienne. Mieux, les Palestiniens, à l'unisson, voit en lui leur propre père. En effet, Abou Âmmar est perçu en tant que tel, au point que les Palestiniens semblaient faire leurs adieux à leur propre père. Rien de plus normal lorsque l'on sait que les jeunes Palestiniens, depuis qu'ils ont ouvert les yeux sur le monde, celui-ci était constitué de l'occupation israélienne, des actes de barbaries, des carnages et des tueries d'une part. De l'autre, la lutte palestinienne pour l'indépendance a toujours été représentée par Yasser Arafat, au point qu'il en devenu le symbole. Des décennies durant, les propos du Raïs, ses déceptions, ses coups de gueule, le mépris et autres dures épreuves qu'il a dû surmonter, tout cela a fini par tisser des liens indéfectibles entre Yasser et son peuple. Aujourd'hui, les siens se sentent impuissants devant le manque d'informations solides concernant son sort. «Voir un tel combattant dans cet état de faiblesse, si loin de sa propre terre... C'est un désastre». «Ça me fait mal de voir mon président comme ça (…) Lorsque Arafat est revenu en 1994 à Gaza, il a tenu à bout de bras et a fait vivre la cause palestinienne. Mais les Israéliens ont tué cette cause». Au camp de réfugiés de Jabaliya, c'est un calvaire que vivent, au quotidien, les locataires de ce qui est en soi le plus grand camp de réfugiés de la bande de Gaza. Jabaliya, ce sont 100.000 Palestiniens vivant sur une superficie de 3 kilomètres carrés et, notamment, c'est le berceau de la première Intifada en 1987. Considérée comme un fief du Hamas, Jabaliya n'en est pas moins acquise à la popularité de Arafat. Et c'est sur ce point précis que se sont centrées les récentes réunions des dirigeants palestiniens, en parallèle à un éventuel transfert du pouvoir. Les responsables palestiniens craignent, en effet, que le dernier voyage du leader palestinien ne provoque des vagues de confusion ou de violences. Ainsi, c'est à un véritable ballet que se livrent Ahmad Qoreï et Mahmoud Abbas, se réunissant à divers tours de table avec les différents chefs de groupes palestiniens et des factions armées. Premier ministre assurant l'intérim de Yasser Arafat, Ahmad Qoreï avait réuni, à Ramallah, le Conseil national de sécurité. Mahmoud Abbas, ex-Premier ministre et secrétaire général du Comité exécutif de l'OLP, devait présider une réunion du mouvement Fatah, principale composante de l'OLP. Dans la soirée, Qoreï et Abbas devaient rencontrer les chefs du Front populaire de libération de la Palestine (FPLP) et le Front démocratique pour la Libération de la Palestine (FDLP). Ces séries de réunion ont également pour objectif de préparer, n'en déplaise à Dieu, l'après Arafat, afin d'éviter des querelles intestines en cas de décès du leader palestinien. Qoreï ambitionne, en fait, de poursuivre, dans la sérénité, le processus de paix et l'aboutissement, sans rivalité et sans guerre fratricide, à la proclamation d'un Etat palestinien.