Le démantèlement du réseau Errammach à Tétouan et les révélations faites par plusieurs accusés dans cette affaire ont démontré à quel point la corruption a gangrené nos mœurs socio-politiques. La justice marocaine a mis la main sur un dossier des plus graves, durant l'été 2003, dans l'affaire de l'immense réseau de trafic de drogue, dont Mounir Rammach est la plaque tournante. Les découvertes résultant des différentes enquêtes menées par les services de la police judiciaire sur instructions du procureur du Roi sur les trafiquants de drogue ont abouti au démantèlement d'un vaste réseau de drogue. Des découvertes stupéfiantes ont conduit à de nombreuses arrestations à travers le pays. La justice a prouvé que le trafic de drogue n'est plus une simple affaire de dealers de la zone nord, comme les Marocains le pensaient souvent, mais une toile d'araignée à l'échelle nationale qui s'attache d'une façon ou d'une autre les services de hauts fonctionnaires de l'Etat. Comme l'avait confirmé le ministre de la Justice, Mohamed Bouzoubaâ, des cadres de la sûreté nationale, de la Gendarmerie Royale, de l'Administration des Douanes et surtout des magistrats sont impliquées dans ce vaste réseau de barons de la drogue. Tous ont été corrompus ou plus exactement, selon le terme d'usage, ils ont été «achetés». Une vaste «opération mains propres», a été immédiatement entreprise pour décapiter la «pieuvre» qui a pris racine au Maroc. La stratégie de lutte contre la corruption, entreprise par l'Etat, puise sa philosophie dans les Hautes instructions de SM Mohammed VI qui ne laissent passer aucune opportunité pour réaffirmer sa détermination à venir à bout de ce fléau. L'Etat est appelé à observer un contrôle des plus rigoureux et de réprimer sans ménagement tous ceux qui se permettent d'abuser des biens publics ou leur utilisation à des fins personnelles. C'est ainsi que le ministère de la Justice n'a pas hésité d'aller jusqu'au bout dans l'exécution des directives Royales. Ces dernières constituent la base de la stratégie de lutte contre toutes les formes de corruption ayant trait à la chose publique et l'instrument d'éradication des virus qui risquent de s'attaquer au corps de l'Administration, de l'autorité, de la Sûreté et de la justice, bref de l'Etat dans sa globalité. Plus d'hommes de droit que de passe-droits pour combattre la gangrène. Des fonctionnaires parmi lesquels figurent de hauts gradés de la police, de la gendarmerie et des douanes ainsi que des magistrats, ne s'adonnaient pas au trafic à proprement parler. Ils ont été corrompus, et de ce fait, ils ne pouvaient ignorer l'ampleur du mal qu'ils causaient. Ces mêmes responsables fermaient les yeux sur des opérations dont ils n'ignoraient pas le plus souvent les dimensions et les retombées. Certains confectionnaient délibérément des verdicts sur mesure pour innocenter de vrais coupables. D'autres étaient carrément de mèche, et parfois partie prenante, avec les ripoux dans leurs trafics. Tout ce beau monde était pris dans les vapeurs de la vie facile, trop occupé par le cumul des richesses pour se rendre compte du tort qu'ils causaient à leur pays. Les fonctionnaires honnêtes qualifient ce genre de postures de double trahison. D'abord envers l'honneur du fonctionnariat et de la responsabilité qui leur a été confiée, ensuite envers leurs collègues qui se contentent de vivre honnêtement et refusent de toucher à l'argent sale. Ceux qui ont eu le privilège de comprendre que si l'argent est un bon moyen, il est surtout un mauvais conseiller. Le temps finira par démontrer que les choses ne se borneraient pas éternellement au simple trafic et échange argent-marchandise. Les citoyens des villes du nord assistaient régulièrement à des parades en fanfares de gros bonnets mafieux sûrs de l'impunité au point qu'ils ne craignaient guère de se promener armes aux poings. Les règlements de compte aux armes à feu ont été banalisés dans un pays connu dans le monde entier par ses vertus de paix et de tolérance. D'où la ferme réaction du Ministère de la Justice, de ne ménager aucun suspect. D'ailleurs le nouveau rapport de la Banque Mondiale souligne l'importance accordée par le Maroc à la réforme de sa justice et aux efforts entrepris à cet effet par les pouvoirs publics, concrétisés par de nombreuses initiatives. N'empêche, la tâche s'avère difficile compte tenu du retard accumulé et des dérapages enregistrés au niveau de la lutte contre les dérives.