• Deux semaines avant le lancement officiel de l'appel d'offres international prévu le 15 octobre portant sur la cession de terres agricoles marocaines, les opérateurs espagnols étaient bizarrement informés des détails techniques de ce marché. Faut-il y voir une manière de les privilégier dans une opération très juteuse ? • Au ministère de l'Agriculture, on assure que les choses se déroulent dans la transparence. Mais comment se fait-il que des séances restreintes de "briefing" sur les critères de sélection requis en la matière par le gouvernement marocain aient été tenues en Espagne au profit des soumissionnaires potentiels ? Les étrangers en général, espagnols en particulier, partent-ils favoris pour répondre à l'appel d'offre international concernant la cession des terres agricoles de la Sodea et de la Sogeta au secteur privé ? Comme annoncé par ALM (n°748 du mardi 12 octobre), les milieux agricoles espagnols se sont fait écho de terres agricoles marocaines cédées aux entrepreneurs de certains pays européens à un prix symbolique. Le directeur des projets internationaux de l'Association Hispamaroc, Francisco Rubio, a lancé une campagne d'information destinée aux chefs d'entreprises espagnoles spécialisées dans l'agro-industrie notamment dans la région d'Almeria pour les informer de l'appel d'offres lancé par le gouvernement marocain pour "mettre à la disposition des chefs d'entreprises espagnols, néerlandais, belges, portugais et français des terrains agricoles". Lors d'une conférence de presse, le week-end dernier, Rubio a déclaré que "le prix de l'hectare oscillerait entre 100 et 500 euros" et que "le loyer de la surface sera fixé en fonction de l'intérêt des projets pour le gouvernement marocain avec une durée de 99 années". Rubio a ajouté qu'il s'agit de "terrains situés notamment dans la région d'Agadir et au nord de Casablanca". Rubio a aussi expliqué aux entrepreneurs espagnols que "le Maroc cherche des investisseurs étrangers même s'ils ne sont pas des agriculteurs". S'agit-il donc d'un simple travail préalable à l'appel d'offres, ou alors, d'un délit d'initié, sagement orchestré par des partis intéressés ? « Je suis étonné par les commentaires accompagnant cette opération. Effectivement, une rencontre au sommet a bien eu lieu avec le patronat espagnol. D'autres suivront avec les autres patronats européens. Toute l'opération se déroulera conformément à l'appel d'offres international dont les principaux points saillants seront dévoilés, mardi 19 octobre, par le ministre de l'Agriculture lors d'une conférence de presse», tient à préciser Ahmed Hajaji, directeur général de la Sodea. Selon lui, une première phase, portant sur 56.000 hectares répartis en 205 projets, fera l'objet du prochain appel d'offres international. « Il ne s'agit absolument pas de quotas, mais bel et bien d'un appel ouvert aux personnes physiques et morales, marocaines ou étrangères, ayant des références et une expérience en matière agricole, agro-industrielle ou dans la distribution des produits alimentaires », ajoute Ahmed Hajaji. Ainsi, estime le responsable, une déconnection totale par rapport à l'ancienne approche, à base d'une location pure et simple, a été opérée. La meilleure offre sera retenue en fonction du professionnalisme, de l'investissement et de la création de l'emploi. De source proche du ministère de l'agriculture, l'appel d'offre sera, officiellement, disponible le 15 octobre prochain. Comme spécifié, la durée de la convention est fixée à 40 ans pour les projets d'investissement arboricoles, viticoles et agro-industriels et à 17 ans si les projets portent sur les cultures annuelles et l'élevage. L'adjudicataire ne peut faire partie que d'un seul groupement soumissionnaire. Il doit, par ailleurs, se constituer en société de droit privé marocain avant la signature de la convention. D'un autre côté, plusieurs formules sont retenues pour la redevance locative : soit qu'elle est fixée par l'administration, soit qu'elle est proposée par l'adjudicataire à condition qu'elle soit supérieure au minimum fixé par l'administration. Le montant de la redevance est révisable à la hausse tous les 5 ans au taux de 10 %. La sélection des offres se fera selon une notation sur 100 en fonction de la référence du soumissionnaire (15 points), la cohérence du projet (20 points), les investissements proposés (35 points), la création d'emploi (15 points) et la redevance annuelle (15 points). Le principe retenu pour la sélection définitive éliminera automatiquement tout soumissionnaire ayant une note inférieure à 10 points pour le critère relatif à la cohérence du projet, alors que le soumissionnaire retenu sera celui qui aura totalisé le maximum de points. Le déroulement de l'appel d'offre se fera en deux phases. La première, celle de la recevabilité des offres sur la base du dossier administratif et juridique. La seconde, celle de la sélection définitive, du soumissionnaire qui présente les meilleures références techniques et financière ainsi que le meilleur projet en termes de cohérence, de l'importance de l'investissement, des emplois à créer et de la redevance annuelle. La finalisation de la convention avec l'Etat doit intervenir dans un délai maximum de 30 jours après notification des résultats de l'appel d'offres.