Les trois attentats qui ont secoué jeudi soir la péninsule du Sinaï en Egypte, ont fait 34 morts et 105 blessés, selon un bilan provisoire du ministère égyptien de l'Intérieur. L'enquête se poursuit, les spéculations aussi. Trois organisations jusque-là inconnues ont revendiqué les attentats perpétrés en Egypte. Mais dès samedi, Israël n'a pas arrêté de répéter qu'à ses yeux, Al Qaïda est le principal suspect des attentats de jeudi. Une déduction simplifiée par les déclarations de Silvan Shalom ministre israélien des Affaires étrangères, devant les caméras de télévision « Quiconque tente de faire un rapprochement entre les Palestiniens et cela se simplifie la vie », a-t-il déclaré. Et d'ajouter que « Les éléments dont nous disposons montrent que ce genre d'attentat, le fait qu'il ait été commis en de multiples endroits, avec une grande quantité d'explosifs (...) pointe davantage dans la direction d'Al Qaïda. La tentative consistant à le faire porter sur les Palestiniens est erronée ». Pour les responsables israéliens, toutes les thèses conduiraient à Al-Qaïda. Ce qui n'est apparemment pas l'avis des Egyptiens dont le gouvernement n'a pas apprécié ce constat. Ce dernier considère qu'en accusant le réseau de Ben Laden de la responsabilité du triple attentat, l'Etat hébreu a fait preuve de précipitation. Le porte-parole du président Housni Moubarak, Majid Abdelfattah, s'est interrogé dans ce sens en déclarant « Pourquoi devrions-nous nous cantonner à la piste Al Qaïda et mettre de côté les autres groupes qui ont revendiqué les attentats ? ». Et d'ajouter « Nous pensons qu'il s'agit d'une appréciation particulièrement hâtive de la part des Israéliens. Sur quelles bases se fonde cette appréciation ? ». Pour les Egyptiens, il est prématuré de désigner un coupable ou d'avancer avec certitude le mobile de ces attentats. Cependant, sur le terrain, les secouristes israéliens et égyptiens travaillaient côte à côte dans les décombres de l'hôtel Hilton de Taba et les enquêteurs progressaient, alors que le dernier bilan des attentats s'élevait à 34 morts. D'ailleurs à l'issue des attentats, Israël a dit vouloir coopérer avec Le Caire en matière de lutte antiterroriste. La coopération israélo-égyptienne s'est traduite par la présence en territoire égyptien d'équipes de sauveteurs civils et militaires israéliens, ainsi que par la visite dans les décombres de l'hôtel Hilton du chef du Shin Beth, le service de sécurité intérieure d'Israël, Avi Dichter. Selon des enquêteurs égyptiens, s'exprimant sous le couvert de l'anonymat à l'AP, les auteurs des attentats seraient un groupe de huit à dix hommes, dont plusieurs kamikazes, peut-être venus d'Arabie saoudite ou de Jordanie à bord de vedettes rapides. Ils penchent désormais aussi pour la piste Al-Qaïda, comme les Israéliens et les Américains. Autre hypothèse, une cellule dormante locale aurait pu être activée pour ces attentats, qui serait proche de l'Egyptien Ayman Azzawahri, chef du Jihad islamique égyptien avant de fusionner avec le groupe de ben Laden, et devenir le bras droit de ce dernier. Le Premier ministre norvégien, Kjell Magne Bondevik, qui a eu un entretien avec Moubarak à Charm el Cheikh a déclaré à la presse présente que les attentats du Sinaï trouvaient leurs racines dans le conflit israélo-palestinien. Selon le Premier ministre norvégien, Moubarak a affirmé que de telles attaques risquaient de se reproduire tant que des solutions ne seraient pas apportées à ce conflit et à la situation en Irak. Les Palestiniens ont aussi leur propre explication du problème. En Cisjordanie à Ramallah, Nabil Abou Roudaynah, un proche conseiller de Yasser Arafat a confié à la presse que les attaques à la bombe constituaient un signe montrant que l'occupation militaire des territoires palestiniens n'apporterait que davantage de violence dans la région. La cause palestinienne est le pivot pour la sécurité, la paix et l'harmonie dans le monde, a-t-il dit. Abou Roudaynah a souligné qu'Israël et les Etats-Unis doivent tirer des leçons de ces événements et comprendre que sans une solution politique au conflit israélo-palestinien et la création d'un Etat palestinien avec Jérusalem comme capitale, il sera impossible de faire disparaître la violence.