Bien que pour les consommateurs, les courses quotidiennes grattent une bonne part du budget et les obligent à serrer la ceinture, ils ne le font cependant pas pour leur animal de compagnie. Avoir un chat ou un chien, par exemple, nécessite un panier dont le coût est loin d'être dérisoire. Entre aliments et articles d'entretien, le consommateur est obligé des fois à casser sa tirelire. Ce secteur plus connu sous l'appellation «pet food» (aliments pour animaux) est en perpétuel développement. Dans les différents supermarchés, on trouve aujourd'hui des rayons spécialement dédiés pour les produits destinés aux animaux de compagnie. Croquettes, pâtés, paniers de transport, shampoings, litières, parfums et la liste est loin d'être exhaustive, le consommateur a l'embarras du choix. Tout cela pour que l'animal de compagnie mène une vie de chat. Néanmoins, cela a un prix qui n'est pas négligeable. D'ailleurs, ce secteur budgétivore qui a échappé à la crise est lui-même très lucratif pour les industriels. Selon une étude publiée en juillet 2015 par Alcimed, société de conseil en innovation et développement de nouveaux marchés, spécialisée dans les marchés innovants, notamment l'agroalimentaire, biotech et santé, le marché mondial devrait continuer à croître de 5% par an dans les prochaines années, notamment dans les pays émergents, après avoir atteint 90 milliards d'euros en 2014 (soins et nourriture confondus). Les industriels n'hésitent donc pas à investir massivement, à l'image de Mars, le grand groupe agroalimentaire américain qui a mis récemment près de 100 millions d'euros dans un nouveau centre d'innovation, tout en rachetant la division nutrition animale de Procter & Gamble pour près de 2,7 milliards d'euros. Quant au leader mondial de l'agroalimentaire Nestlé, il vend autant de capsules Nespresso, de Nescafé et de soupes Maggi que de croquettes ! Si les industriels n'y vont pas avec le dos de la cuillère en misant gros sur ce secteur, c'est qu'ils savent qu'il épouse des tendances d'alimentation en constante sollicitation. Le consommateur cherche de manière invariable ce qui va faire plaisir à son animal de compagnie. Conscients de cette donne, les industriels ont pensé à tout. Aujourd'hui, les propriétaires de chiens peuvent acheter des boulettes de viandes adaptées au pedigree. Ils peuvent même se procurer des produits pour mini-chiens et chiens seniors âgés de 10 ans et plus. Pour ceux qui ont décidé d'avoir un chat, ils peuvent les régaler avec des croquettes spéciales «chat stérilisé», «chat d'intérieur» et «chat sensible» ou encore les chouchouter avec des biscuits spéciaux cuits au four. Au Maroc, le marché de la fabrication d'aliments pour animaux de compagnie n'est pas embryonnaire. Les deux industriels de ce secteur, à savoir Alf Sahel et Aliments et protéines du nord (APN) y ont vu une sinécure depuis plus d'une décennie. Ils ne se sont pas contentés de produire uniquement des produits pour chiens et chats, ils se sont ouverts également aux produits avicoles et piscicoles. Selon les derniers chiffres de la direction des statistiques et de la veille au sein du ministère de l'industrie, du commerce, de l'investissement et de l'économie numérique, la fabrication d'aliments pour animaux a réalisé en 2013 un chiffre d'affaires de 8.827.711 DH. Les animaux de compagnie, autrefois nourris avec les restes des repas des maîtres disposent aujourd'hui de 300 références dans les hypermarchés. Lors de ces dernières années, la relation qu'entretiennent chats et chiens avec l'être humain s'est nettement améliorée. Alors qu'on ne les ramenait à la maison que pour une mission de garde ou pour chasser les souris, les chiens et chats sont devenus de nos jours des membres de la famille. Et quand l'animal doit être soigné, le propriétaire n'hésite pas à se rendre chez le vétérinaire le plus proche pour une visite, aussi onéreuse soit-elle. Nous avons rendu une visite au cabinet du vétérinaire Youness Mrabet qui nous a révélé que ses clients sont prêts à tout pour que leurs animaux jouissent d'une bonne santé. Quant au prix de la consultation, il reste variable en fonction du diagnostic. Pour les vaccins indispensables de prévention par exemple, cela peut coûter jusqu'à 400 DH. Pour le relooking, les propriétaires peuvent gâter leurs animaux avec des produits dits pet care, disponibles chez les vétérinaires qui réduisent le tartre sur les dents ou d'autres qui rendent le pelage lisse. Là encore, le prix dépend de la qualité des articles mais reste somme toute relativement cher avec des shampoings anti-puces à 100 DH et des parfums pouvant atteindre 200 DH. Chez le vétérinaire, une cliente nous a révélé que sa chienne qui vient de mettre bas, nécessite entre les soins antiparasitaires et les croquettes qui stimulent la lactation 800 DH. «Ma chienne a souffert il y a un an d'une malformation congénitale. Cela m'a coûté très cher et j'ai dû m'endetter. Aujourd'hui je continue toujours de dépenser pour elle sans compter et cela m'importe peu», raconte-t-elle. La croissance du secteur tire des bénéfices non seulement de l'affection inconditionnelle que manifeste le propriétaire à l'égard de son animal mais également de l'urbanisation et du vieillissement de la population. Nos aînés ressentent le besoin de se sentir utiles. Ainsi, les animaux de compagnie leur permettent de satisfaire un besoin d'autrefois, celui de prendre des responsabilités, de se soucier ou de devoir se soucier de quelqu'un. La présence d'un chat ou d'un chien freine l'arrivée de l'effroyable sentiment d'égarement et de solitude face auquel ils sont souvent confrontés. In fine, le secteur du pet food et du pet care est un secteur anti-crise. Quel que soit l'état de santé du budget du consommateur, il ne lésine pas sur les moyens pour que son animal jouisse d'une bonne vie, bonne santé et ce quel que soit le prix.