Lors d'un entretien à la radio anglaise BBC, un haut magistrat britannique a assuré mardi que son pays était «fondamentalement raciste». Explications. L'auteur de ces propos étant le procureur général de la Reine, il va sans dire que cette opinion n'est pas à prendre à la légère. Elle a d'ailleurs suscité de vives réactions politiques, les services du Premier ministre Tony Blair en tête, avant même sa diffusion mardi sur les ondes de la BBC. A la question «pensez-vous que tous les Britanniques soient racistes ?», Sir David Calvert-Smith n'a en effet pas hésité à répondre par un «oui» sans équivoque. «La société toute entière a un problème», a-t-il ajouté alors que le porte-parole de Tony Blair a immédiatement tenté de nuancer ses dires. «Je ne pense pas que nous puissions être en accord avec cette opinion», a-t-il déclaré lundi. «Nous pourrions en revanche reconnaître qu'il existe des défis pour la société dans son ensemble». Les défis, Sir Calvert-Smith, également directeur des poursuites judiciaire du parquet, les connaît certainement. Il dirige d'ailleurs un enquête sur ses propres services mis en cause dans le meurtre d'un jeune Nigérian de 10 ans. Les faits remontent à 2000 lorsque le corps d'un jeune garçon, Damilola Taylor, avait été découvert saigné à blanc dans un immeuble délabré de la capitale. Si selon le procureur, ses services comme la police ont reconnu une forme de «racisme institutionnalisé », celui-ci a estimé que l'ensemble de la société se trouvait dans ce cas. «Selon que l'on parle d'asile ou de sport, différents préjugés ont cours», a-t-il ajouté, évoquant la popularité des joueurs noirs qui évoluent dans l'équipe de football nationale et l'attitude vis-à-vis des clandestins qui affluent par le tunnel sous la Manche. Dans un rapport datant de 2001, le service britannique des poursuites judiciaires avait été reconnu coupable de préjugés raciaux. Les forces de l'ordre avaient même été mises en cause pour leur attitude dans le cadre de l'enquête sur le meurtre d'un jeune Noir, poignardé à Londres en 1993. Si selon un sondage de la Commission pour l'égalité raciale, 86% des Britanniques jugent aujourd'hui qu'avoir la peau blanche n'est pas nécessaire pour se dire citoyen du Royaume, il semble que de ce côté de la Manche, des progrès restent aussi à faire.