Atlas Blue est désormais opérationnelle. La tant attendue compagnie low-cost n'est plus qu'un projet, mais bel et bien une réalité. Un lancement qui enterre bien des doutes sur la marche de la libéralisation du secteur aérien. Atlas Blue vient d'opérer son premier vol, le lundi 26 juillet 2004, son bord, quelque 130 passagers au départ de Lyon et à destination de Marrakech pour le compte du tour-opérateur français Etapes Nouvelles. Un lancement qui avait dans le temps fait planer des doutes quant à sa tenue, mais qui a fini par faire taire plus d'un sceptique, notamment par rapport au respect ou non des délais fixés. Et le nouveau président du directoire de la société, Zouheir Mohamed El Oufir, de souligner, dans ce sens qu' «il n'y a pas eu de retard. Depuis le 10 février, date de la signature par l'Etat et Royal Air Maroc de la convention portant sur la création et le lancement de cette nouvelle compagnie, toutes les étapes préliminaires de la mise en place des fondamentaux de ce nouvel instrument ont été franchies avec succès.» Le lancement d'Atlas Bleue intervient justement suite à une longue réflexion quant au devenir du secteur aérien, mais aussi et surtout celui de la compagnie nationale. Quatre pistes avaient ainsi été explorées. Parmi elles, la création d'une deuxième compagnie aérienne nationale spécialisée dans le charter et le régulier loisirs à bas coûts et recentrage de la RAM sur le régulier. Le bout étant d'aboutir à un pôle marocain concentré autour de deux compagnies nationales fortes et complémentaires. Spécialisée dans le charter et le régulier «loisirs», la nouvelle entité a fixé son siège à Marrakech au niveau du terminal B de l'aéroport de Marrakech-Ménara. En fait, Atlas Bleue disposera d'un terminal propre aux couleurs de la compagnie. Ultérieurement, Atlas Bleue sera dotée de trois bases opérationnelles situées à Marrakech, Agadir ainsi que dans une destination au Nord du Maroc. Elle sera également munie d'une structure de coûts très avantageuse, similaire à celle des compagnies low-cost européennes, rendant possible la pratique de tarifs attractifs. Le vol de lundi représente le point de départ du lancement technique de la compagnie qui s'étalera jusqu'au 30 octobre 2004, avec un avion exploitant des rotations entre Marrakech et différentes villes françaises. Le démarrage industriel s'effectuera à partir du 31 octobre 2004, avec l'exploitation de 6 avions de même type pour desservir la France, la Belgique, l'Italie, la Hollande, l'Angleterre et l'Allemagne, dans un premier temps. On l'aura compris, la nouvelle structure constituera le bras armé du secteur touristique, Atlas Blue étant appelée à accompagner le développement des capacités hôtelières en améliorant la compétitivité du produit « Maroc » et en multipliant au fur et à mesure les dessertes aériennes des destinations encore sous-exploitées. Pour El Oufir, « Atlas Bleue est d'abord un instrument destiné à développer le tourisme. Un instrument à travers lequel nous tablons sur un rythme de progression de 17% par an, avec un million de passagers durant la première année, deux millions d'ici 2008 et quatre million à l'horizon 2012. Ceci, sachant qu'un des corollaires de l'objectif 10 millions de touristes n'est autre que la réalisation d'un trafic de 16 millions de passagers ». Pour atteindre les objectifs tracés, le nouveau schéma retenu privilégie la vente directe. « Le site Web et le Call center d'Atlas Blue seront disponibles fin août 2004 pour les réservations et les ventes sur ses courriers », explique M. El Oufir. La séparation des marchés des deux compagnies marocaines implique la focalisation de la RAM sur les activités de transport régulier domestique et international. Royal Air Maroc continuera de développer les métiers annexes à l'aviation civile, notamment l'assistance en escale, les activités de maintenance industrielle, la fabrication de faisceaux électriques pour avions et la formation du personnel aux métiers de l'aéronautique. Quant au pôle touristique, outre le renforcement de son autonomie et de son indépendance, la stratégie adoptée préconise la séparation des activités « catering » de celles hôtelières. A l'instar des mouvements de privatisation intervenus en Europe à la fin des années 90 aussi bien des compagnies aériennes que des aéroports, le Maroc pourrait connaître dans les années à venir des opérations de transfert au privé. Ceci devrait concerner au premier chef la compagnie historique RAM, sa nouvelle filiale low-cost ainsi que certains aéroports. L'investissement dans ce type de projets serait d'autant plus viable s'il se réalisait par l'intégration de la chaîne économique, via le regroupement d'activités complémentaires. Ceci devrait permettre d'assurer une rentabilité optimisée et une flexibilité accrue par rapport aux aléas du marché. Le montage financier d'un projet d'investissement de la taille d'une deuxième compagnie devra assurément prendre en considération l'aspect extrêmement capitalistique du secteur, afin d'éluder le risque d'insuffisance du fonds de roulement par rapport aux besoins d'exploitation. L'exemple-type à méditer est incontestablement celui des deux premières compagnies privées marocaines, Atlas Air et Mondair, qui n'ont pas fait long feu. • Tarik Qattab et Youssef Chaoui