Suite à un simple malentendu, et sous l'effet de la drogue, toute la rancune que nourrissait Yahia, 20 ans, contre son père qu'il a tué en l'étouffant à l'aide d'un fil électrique. Récit d'une histoire macabre. Samedi 5 juin 2004, il est 10h00, quand retentit la sonnerie du téléphone à la sûreté de Hay Mohammedi-Aïn Sebaâ. À l'autre bout du fil, Yahia gémissait : «Mon père a été tué…». Le policier lui a demandé le lieu du crime. «Au quartier Adel», répond-il d'une voix cassée par le chagrin. Avisé, le chef des brigades urbaines de la police judiciaire a donné ses instructions aux éléments de la troisième section pour se mobiliser et s'assurer de la véracité de l'information. En un clin d'œil, ils sont montés dans la fourgonnette et le chauffeur a démarré pour se retrouver, quelques minutes plus tard, dans le quartier indiqué. Les badauds étaient déjà sur les lieux, entourant le fils du défunt et sa mère et les assaillant de questions sur le sort de son père. Pour seule réponse, le fils et la mère laissaient couler des larmes en cascade. Les policiers sont descendus du fourgon et l'un d'eux a commencé à disperser les curieux afin de permettre aux limiers d'entamer leur travail par les premiers constats d'usage. À l'intérieur de la maison, ils ont remarqué le corps sans vie du père étendu par terre. Un constat minutieux a permis aux enquêteurs de remarquer les traces d'un fil au niveau du cou et celles de coups au niveau de la bouche, ainsi que des égratignures sur le visage. «Qui était la veille chez lui ?», demande le chef de la 3ème section judiciaire au fils qui semble très touché par la mort de son père. «Personne», lui répond-il. Pourquoi ? Le défunt est divorcé depuis douze ans. C'était au début des années 80 qu'il s'était marié, après une histoire d'amour avec Zahra. En 1984, leur foyer est égayé d'un enfant qu'ils ont prénommé Yahia. Au fil des années, leur relation conjugale a commencé à se dégrader au point qu'ils ne se supportaient plus l'un l'autre. Le divorce était une solution convenable pour mettre fin à cette relation qui ne pouvait plus avancer d'un iota. En 1992, leur relation a fini par le divorce. Et Yahia, qui avait huit ans, est resté avec sa mère. Cette dernière ne l'a jamais empêché de rendre visite à son père. Il allait parfois passer la nuit chez lui. Il disposait de la clé de la maison pour y rentrer et sortir sans être gêné. «Je venais de rentrer chez lui et je l'ai trouvé mort», dit Yahia au chef de la brigade qui l'écoutait avec attention. Il a précisé qu'il avait tenté de lui mettre un oreiller sous la tête. Seulement, il a remarqué des coups sur son visage. Aussitôt, il a appelé sa mère et a alerté la police. Toutefois, le chef des limiers a remarqué que le poignet droit de Yahia présentait une enflure anormale. Pour se rassurer de ce qui traverse sa tête, il a demandé à Yahia d'ôter son tee-shirt. Regardant sa poitrine et son dos, il a remarqué des blessures qui semblent récentes. Qui l'a blessé ?. Comme un muet, il a gardé le mutisme tout en regardant le policier. Alertés les éléments de la protection civile se sont dépêchés sur les lieux pour évacuer le cadavre vers l'hôpital médico-légal d'Aïn Chok où il devait être soumis à une autopsie. Et Yahia et sa mère ont été conduits vers les locaux du commissariat. Le chef de la brigade a fait entrer Yahia dans son bureau, laissant la mère au-dehors. Outre les investigations, l'enquête policière nécessite parfois la ruse. Les limiers ont demandé à Yahia de leur expliquer les raisons de ses blessures et l'enflure de son poignet. Une question qui semble fortement les intéresser, mais à laquelle, Yahia n'a pas de réponse convaincante. Le chef de la brigade lui a expliqué qu'ils soupçonnaient sa mère. «Non, non!…», crie Yahia en sursautant de sa place. Mais qui est donc l'auteur du crime? Et Yahia crache le morceau. C'est lui l'assassin de son père. Vendredi 4 juin. Il était un peu plus de 23h00. Yahia était sous l'effet de comprimés psychotropes quand il est entré chez son père. Ce dernier, qui était dans un état de santé lamentable et qui n'avait rien mangé depuis l'après-midi, lui a demandé d'aller lui acheter du pain. Yahia a refusé prétextant que les commerces étaient déjà fermés. Aussitôt, le père l'a injurié. Yahia a répondu avec des mots abjects. Perdant ses nerfs, le père a avancé vers le fils et l'a giflé. À ce moment, Yahia a perdu tout contrôle et a commencé à asséner des coups de poings à son père. Perdant son équilibre, ce dernier s'est effondré par terre. Le fils a tiré un fil électrique et a entouré le cou du père qu'il a enserré, ne le relâchant qu'une fois mort. Après quoi, il a jeté le fil électrique dans la poubelle et a quitté la maison pour rebrousser chemin à destination de chez sa mère. Il ne lui a rien révélé. Le matin du samedi, il est allé chez son père pour commencer sa pièce théâtrale. Mais il a fini par être démasqué. Regrette-t-il son acte ? Bien que son père ait pris soin de lui de temps en temps, il n'a pas regretté son crime. La raison : Il gardait une rancune contre lui depuis qu'il a répudié sa mère. Yahia a été traduit, mardi 7 juin, devant la Cour d'appel de Casablanca.