Hassan et Chakib étaient associés dans une entreprise d'électroménager. Un malentendu les a séparés. Seulement, le premier a volé la CIN du second et l'a falsifiée pour ouvrir un compte bancaire et distribuer des chèques en bois à droite et à gauche. Chakib, la quarantaine, s'assoit sur une chaise. Devant lui, le chef de la brigade policière à Essaouira. Il tente de se disculper : «Oui Je m'appelle Chakib…mais à Crédor je n'ai jamais demandé de crédit à la consommation auprès de la compagnie…». Le chef de la brigade ne semble pas le croire. «C'est bien toi, Chakib. L, né en 19…, demeurant à…Ton numéro de la carte d'identité nationale est…?», lui demande le policier. «Oui, oui, chef c'est bien moi…mais je n'ai jamais été débiteur envers cette société de crédit à la consommation…», insiste Chakib. Il ne sait quoi faire pour se disculper, pour convaincre le chef de la brigade de son innocence. Le policier commence à scruter la photocopie de la carte d'identité nationale qui est jointe à la plainte, lève ses yeux vers Chakib, regarde une fois encore la photocopie, lève une deuxième fois ses yeux vers Chakib : «Tu as ta carte d'identité nationale ?», lui demande-t-il. «Non je l'ai perdue…», lui répond le jeune homme. «…Tu as fait une déclaration de perte auprès de la police ?», lui demande-t-il. «Non, non…», répond Chakib. Le chef de la brigade lui tend la photocopie de la CIN. Chakib y jette un regard : «… Mais… cette photo n'est pas la mienne!…C'est celle de Hassan qui était mon associé…Comment a-t-il pu se procurer ma carte et y mettre sa photo ?», s'interroge Chakib, ébahi. Le même scénario s'était souvent répété pour Chakib. Il a été arrêté une dizaine de fois, à Agadir, Beni Mellal, El Jadida, Safi, Essaouira, Inzegane…Et à chaque fois avec l'accusation d'émission de chèques sans provision pour différentes sociétés de crédit à la consommation, des sociétés de vente de voitures, des sociétés de ventes d'appareils électroménagers, des opérateurs de téléphones portables et des particuliers… Entre-temps, un homme, bien habillé se présente devant la police judiciaire de Casablanca-Anfa, dépose plainte : «…J'ai vendu ma voiture Palio à Chakib. L… Il m'a délivré deux chèques qui se sont avérés sans provision…». Les éléments de la sixième brigade entament leurs investigations, arrêtent Chakib : «Mais ce n'est pas moi,…C'est Hassan…», dit-il en rejetant catégoriquement l'accusation. Lorsque le plaignant se met devant Chakib, il s'écrie : «ce n'est pas lui…ce n'est pas lui…je connais bien la personne qui m'a vendu la voiture, il fréquente le café (…)». Les éléments de la brigade surveillent les lieux que fréquente Chakib/Hassan. «…Le voilà!…», leur disent Chakib et le plaignant. Les limiers l'accostent et le conduisent au commissariat. Au bureau de la brigade, Hassan avoue sans trop de réticence : «…Je suis Hassan, l'émetteur de ces chèques sans provision…». Il est né en 1955, marié et père d'une fillette. Il a accompagné Chakib dans un projet de vente d'appareils électroménagers à Inezgane. Mais le projet a fait long feu. Un malentendu a empêché les deux associés de poursuivre leur chemin ensemble. Et ça a été la séparation. Seulement, Hassan a mis la main sur la CIN (Carte d'Identité Nationale) de son ex-associé Chakib. Comme pour préparer un mauvais coup. Il s'est adressé à l'un de ses amis, qui lui a confectionné une CIN, en utilisant des procédés informatiques, portant l'identité de Chakib et la photo de Hassan. Il a ouvert par la suite un compte bancaire lui permettant d'avoir un carnet de chèques. Et puis, il a commencé à distribuer des chèques en bois à droite et à gauche au point que la valeur globale des produits achetés par ces chèques a atteint la coquette somme de 690.000 dirhams. Hassan a été traduit en état d'arrestation devant la Chambre Correctionnelle près le Tribunal de Première Instance de Casablanca-Anfa et huit de ses complices demeurent en état de fuite.