L'Association marocaine des pilotes de ligne (AMPL) a tenu samedi 29 mai une conférence de presse où elle a expliqué les raisons qui ont poussé ses membres à faire grève. Les grévistes menacent de reconduire leur mouvement. La crise actuelle de la compagnie souligne une chose essentielle : le modèle économique de la RAM, tel qu'il fonctionne actuellement avec un personnel pléthorique et une masse salariale très lourde, est obsolète. Il faut réinventer l'aérien. Ils ont été 344 pilotes et commandants de bord de la Royal Air Maroc, d'un total de 362, à avoir observé le mouvement de grève entamé le jeudi 27 mai et qui se prolonge jusqu'au lundi. Une grève qui intervient suite à l'annulation d'une réunion devant avoir lieu le 26 mai entre les représentants de l'Association marocaine des pilotes de ligne (AMPL), et le directeur général adjoint Exploitation, Abderrahmane Sadouk. L'ordre du jour n'était autre que le licenciement de six pilotes de ligne. Une décision à laquelle s'était opposée l'AMPL. Pour la direction de la RAM, ce licenciement intervient suite à de graves fautes commises par les pilotes en question et s'inscrit en total dans le respect de la réglementation interne de la compagnie. Chez les grévistes, cette décision, jugée arbitraire, ne constitue que l'arbre qui cache une forêt de sources de malaise. Ayant tenu une conférence de presse samedi 29 mai à Casablanca, les représentants de l'association précitée ont déployé un véritable éventail de critiques. Au menu, la fermeture de la direction à la négociation, le recours au personnel navigant étranger, mais aussi et surtout les choix managériaux de la compagnie. Sur ce dernier volet, les pilotes reprochent à la direction la non-application des protocoles d'accords du 31 juillet 2001 ainsi que le maintien en réserve et les changements de pilotes, au nombre de 8000 changements par mois, avec tous les risques que cela comprend. Parmi les revendications de l'AMPL, figurent notamment la titularisation des stagiaires ayant une expérience de plus 12 ans au sein de la Compagnie, la résorption des reliquats relatifs aux congés et la réglementation de la programmation des vols. Quoi qu'il en soit, ce mouvement de grève n'est pas sans avoir d'impact sur le trafic aérien de la RAM. Pour l'AMPL, le taux d'annulation des vols aurait atteint 80%. « Pour le 27 et le 28 mai, l'ensemble des vols programmés était de 171 vols. Seuls 43 ont été effectués, et parmi lesquels 11 ont été affrétés », peut-on lire dans un communiqué de ladite association. Des chiffres qui jurent avec ceux communiqués par la RAM. Cette dernière a constitué un comité de crise dès l'annonce de cette grève et mis en place un dispositif d'urgence qui aurait permis d'atténuer les répercussions de cette situation. A commencer par les vols dont une bonne partie aurait été assurée. Royal Air Maroc parle de 85% des passagers prévus le jeudi 27 mai qui ont pu être transportés. Le vendredi 28 mai, ils ont été 71% passagers à avoir été acheminés vers leurs destinations. Samedi 29 mai, seuls 55% d'entre eux ont été transportés. Hier dimanche, le nombre des passagers dont le transport aurait été assuré est de 70%. « Le tout s'est passé sans incidents majeurs. La situation est sous contrôle », assure-t-on à la RAM. Des résultats obtenus à travers l'utilisation des avions de la compagnie avec les équipages n'ayant pas participé à ce mouvement, le transfert des passagers vers des compagnies opérant sur le Maroc et les compagnies en code share avec la compagnie marocaine ainsi que le recours à des affrètements et aux techniques de régulation des vols. La priorité a été accordée aux opérations touristiques notamment les vols charters à destination des principales villes touristiques, l'acheminement des troupes et personnalités devant prendre part au Festival des Musiques sacrées de Fès ainsi que les vols MRE. La RAM a également réussi le transport de 660 dirigeants d'une multinationale au départ de Milan et de Rome pour participer à une convention annuelle à Marrakech. Les vols long-courrier et particulièrement vers New York et Montréal ont été assurés. Des désagréments atténués également grâce au centre d'appel de la RAM, qui a traité une moyenne journalière de 12.000 appels, contre 3500 en temps normal. S'il est un point sur lequel les deux parties semblent être d'accord , c'est bien leur ouverture au dialogue. Mais en attendant, et à l'heure où nous mettions sous presse, le résultat du vote de l'assemblée générale de l'AMPL, devant décider la prolongation ou non de cette grève, n'a pas été communiqué. Cette grève, la deuxième du genre depuis 10 ans, n'en aura pas moins traduit un malaise latent au sein d'une compagnie nationale qui s'apprête à lancer sa nouvelle compagnie low cost, Atlas Blue. Un lancement prévu initialement pour juin 2004 avant d'être reporté à septembre mais qui n'en pose pas moins la question de la suppression de bien d'avantages accordés aux pilotes de la RAM. A commencer par les salaires, variant entre 50.000 et 120.000 Dh, contre 35.000 pour les pilotes-stagiaires, et qui devraient être révisés à la baisse dans le cadre de cette nouvelle compagnie. Un point parmi tant d'autres où l'unanimité est loin d'être le mot d'ordre.