Si les deux premières années de la présidence d'Abdelaziz Bouteflika ont été marquées par la concorde civile et la relance de l'économie, la dernière reste celle de la crise kabyle. Crise qui se généralise dans tout le pays. C'était en avril 2001. A peine deux années à la tête de l'Algérie, et déjà une crise de taille. Le président Bouteflika se retrouve confronté aux émeutes de Kabylie, après qu'un jeune lycéen, Massinissa Guermah, ait été tué par balles dans les locaux de la gendarmerie de Beni Douala. Les affrontements se généralisent dans toute la région kabyle. Des tirs à balles réelles, des dizaines de morts et des centaines de blessés. Le Rassemblement pour la Culture et la Démocratie (démocrate), parti politique implanté en Kabylie, annonce alors son départ du gouvernement de coalition. Malgré la création d'une commission d'enquête, la Kabylie continue de bouillonner jusqu'au nouvel éclatement de mars dernier. Alors que le président algérien semble ne plus ignorer la plate-forme d'El-Kseur, qui rassemble toutes les revendications kabyles, la région se soulève pour réclamer le départ des gendarmes responsables du « printemps noir » 2001. En parallèle des manifestations, la coordination des Aârouch appelle au boycott des élections législatives du 30 mai. Rejet bientôt suivi de celui de plusieurs partis dont le FFS (Front des Forces Socialistes) et le PT (Parti des Travailleurs). En marge de la crise kabyle, resurgissent bientôt tous les maux algériens accentués par dix années de régime d'état d'alerte imposé par la vague terroriste. Chômage, manque de logement, manque d'eau potable et d'électricité : des infrastructures aussi vitales qu'absentes qui entraînent la grogne de toute une population. Le soulèvement social algérien pointe alors son nez depuis l'Est et la région de Constantine. Dans ce contexte, le président Bouteflika veut parer au plus pressé et tente de calmer la ferveur kabyle. Oui, les brigades de gendarmerie sont peu à peu délocalisées, mais les Aârouch continuent de se déclarer « non satisfaits ». Ils réclament à présent la libération de tous les manifestants kabyles et de leurs délégués arrêtés, et pour certains, déjà condamnés à des peines de prison ferme. Et dans ce flou tant social que politique, l'Algérie cache un autre inconnu : le terrorisme. Si les groupes islamistes armés ont subi quelques pertes significatives, la situation sécuritaire est loin d'en être arrivée au calme promis voici trois ans par Abdelaziz Bouteflika. Le décompte macabre des attentats et massacres s'est certes relativement amélioré avec toute de même 2.000 personnes (civils, forces de l'ordre, islamistes armés) tuées dans des violences, durant la troisième année de pouvoir de M. Bouteflika. La grande majorité des attentas enregistrés concernent par ailleurs les zones rurales isolées du centre du pays, et moins les villes renforcées au niveau de la présence sécuritaire. Mais ni la mort en février du chef du GIA, Zouabri, ni les opérations de ratissage menées par l'armée n'ont encore réussi à mettre un terme à cette barbarie. Les dernières actualités le montrent bien : neuf blessés dans deux attentats à la bombe samedi dans un quartier de la capitale, un jeune homme égorgé dans un café samedi soir, dans la région de Collo (Est)… Alors, en ce troisième anniversaire de l'arrivée de Bouteflika à la présidence algérienne, les journaux nationaux posent eux-mêmes la terrible question : «Le départ de Bouteflika est-il une solution à la crise ?». Posant ce grave dilemme, Le Matin ajoute que «à mi-chemin de son mandat, le président Bouteflika est présenté comme le verrou d'un début de solution par la majorité des démocrates et par plusieurs groupes ou personnalités du sérail». Sans aller jusque-là, La Tribune se contente de constater que «des dossiers lourds interpellent Bouteflika», des dossiers sur lesquels le président «doit trancher et redonner espoir aux millions d'Algériens lassés d'attendre sans rien voir venir».